Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
L

logistique (suite)

Logistique et forces navales

Dans la longue histoire des marines de guerre, la logistique joua son rôle tant par l’édification des arsenaux nécessaires à la construction et à l’entretien des navires que par l’implantation outre-mer de bases navales capables de les ravitailler, voire de les réparer.

La Seconde Guerre mondiale, notamment sur le théâtre du Pacifique, marqua le début d’une ère nouvelle pour la logistique navale. Afin d’imposer aux Japonais un combat sans répit, l’US Navy donna un prodigieux développement aux moyens mobiles de soutien logistique, dits trains d’escadre, évoluant dans le sillage des flottes en opérations, qui peuvent être ainsi maintenues constamment à la mer. Ce système continue à être employé par les États-Unis (VIe et VIIe flottes en Méditerranée et en Extrême-Orient) et a été adopté par toutes les marines.

Un train d’escadre comprend :
des ravitailleurs en combustible, qui doivent pouvoir soutenir la vitesse des bâtiments modernes tels que la Seine (France), de 24 000 t pleine charge (dont 9 000 t de mazout), ou l’AOR type « Wichita » américain, de 38 000 t pleine charge (1969). On estime que, en opérations, un porte-avions doit se ravitailler tous les quatre ou cinq jours et un escorteur tous les deux ou trois jours ;
des bâtiments dits de soutien logistique (B. S. L.), navires magasins et ateliers chargés d’assurer la maintenance du matériel et les réparations courantes, tel le Rhin, bâtiment français de 2 500 t pleine charge (1964). À cette catégorie se rattachent les docks flottants américains, capables d’effectuer des carénages (« ARDM-1 » Oakridge) ;
des ravitailleurs en munitions, capables d’assurer contrôle et entretien de torpilles, missiles et munitions de toute nature, tel l’Achéron français, de 10 250 t pleine charge, lancé en 1970 ;
des navires ravitailleurs en vivres, des bâtiments bases...

Alors que les bâtiments logistiques ont été initialement spécialisés suivant la nature du service à assurer et le type de navire à soutenir, on s’oriente depuis 1960 vers la construction de bâtiments logistiques polyvalents de fort tonnage, tels les « AOE » américains, combinaison du pétrolier et du transport de munitions (Sacramento, de 53 600 t pleine charge, vitesse 26 nœuds).

On notera en outre que, durant les deux guerres mondiales, les forces navales ont apporté un soutien considérable aux armées en campagne en assurant, face à la menace aérienne et sous-marine, la protection des convois de navires marchands. Si la guerre atomique conduit à abandonner ce système des convois, devenu trop vulnérable, les marines resteraient chargées d’assurer la sécurité de certains « couloirs de navigation ».

P. D.

➙ Sous-marin.

Loire (la)

Fleuve de France.


C’est le plus long des fleuves français (1 012 km). Elle draine un bassin de 115 120 km2 et arrose Roanne*, Nevers*, Orléans*, Blois*, Tours*, Saumur*, Angers* (Les Ponts-de-Cé), Nantes* et se jette dans l’océan Atlantique à Saint-Nazaire.


Le cours

Née au mont Gerbier-de-Jonc, aux confins du Vivarais et du Velay, à 1 408 m d’altitude, la Loire prend aussitôt, sollicitée par les grandes cassures tertiaires du Massif central, la direction du nord. De gorge en bassin (défilé d’Arlempdes, bassin du Puy, gorges du Velay cristallin, bassin du Forez, seuil de Neulise), elle débouche en plaine à Roanne (268 m). Modeste cours d’eau encore, elle s’attarde en méandres en Sologne bourbonnaise, pour entrer dans le Bassin parisien à Decize (Nièvre). Grossie de l’Allier, son premier grand affluent (410 km), elle amorce en Orléanais, détournée par la subsidence tertiaire de tout le sud du bassin (mer des faluns), une ample inflexion vers l’ouest. Sa vallée, bombée en son centre entre deux dépressions latérales, s’individualise : c’est le Val (Varennes en Touraine, Vallée, en Anjou). Renforcée en Touraine par le drainage berrichon et limousin (Cher, 320 km ; Indre, 265 km ; Vienne, 372 km, grossie de la Creuse, 255 km), en Anjou par le faisceau de la Maine (Mayenne, 200 km ; Sarthe, 285 km ; Loir, 311 km), la Loire traverse le Massif armoricain entre de hauts versants de schistes. Seize kilomètres après Nantes commence l’estuaire, dans une zone tectoniquement déprimée (marais de la Grande Brière).


Le régime

Alimentée sur les neuf dixièmes de son cours par des apports du Massif central, la Loire est profondément marquée, dans son régime, par ses origines. Gonflée en saison froide par des averses méditerranéennes et des pluies océaniques, au printemps par la fonte des neiges (type pluvio-nival), elle connaît en été des maigres prononcés. Ses écarts sont d’autant plus brutaux que ses profils tendus et, à l’exception des calcaires orléanais (résurgence karstique du Loiret), ses sols imperméables successivement cristallins, argileux et schisteux enregistrent sur-le-champ les à-coups du climat. De 68 m3/s à Roanne, le débit s’élève à 164 m3/s à Nevers, 345 à Gien, 607 à Saumur, dans un rapport qui reste partout, entre mois extrêmes (janvier-mars et août), voisin de 6. La Maine elle-même, tard venue avec un module de 140 m3/s seulement, corrige mal sur le fleuve armoricain l’indigence estivale (1 644 m3/s en février et 255 en août à Montjean pour un module de 871).

Capricieux dans ses variations annuelles, le régime l’est plus encore dans ses variations interannuelles. Des étés très chauds et très secs creusent ses minimums à des valeurs dérisoires : 12 m3/s à Gien et 48 à Montjean en août 1949, 5 à Orléans en juillet 1870. Des perturbations climatiques élèvent ses maximums à des valeurs catastrophiques : trombes méditerranéennes d’automne sur le cours supérieur liées à des pluies atlantiques (oct. 1846, sept. 1866), averses océaniques prolongées d’automne et d’hiver sur le cours inférieur (nov.-déc. 1910, janv. 1936), pluies de printemps persistantes mêlées à une fonte des neiges subite (mai-juin 1856). Aucune saison, hormis juillet-août, n’échappe à ses excès. La Loire roulait à Montjean, en 1910, plus de 6 000 m3 d’eau ; au bec d’Allier, en 1846, 1856 et 1866, plus de 9 000, quatre fois le débit de la Seine à Paris au plus fort de la crue de janvier 1910. Aucun siècle ne passe sans qu’elle ne sème la désolation dans sa vallée. Avec un rapport de débits extrêmes de 800, elle est de loin le plus irrégulier des fleuves français. Son lit, tapissé de sables et de graviers qu’elle évacue mal, est fait d’une alternance de « grèves » souvent émergentes et de fosses, ou « mouilles », profondes, entre lesquelles sinue son chenal d’étiage.