Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

animal (suite)

2. Applications de l’éthologie objectiviste. La méthode des leurres est utilisée pour dépeupler une région d’hôtes indésirables tels que les Corneilles en diffusant le cri d’alarme de cette espèce à l’endroit où se trouvent leurs nids ; inversement, on a pu attirer dans un piège des Moustiques mâles en diffusant près de celui-ci la fréquence sonore émise par les femelles de cette espèce.

3. Le conditionnement et l’élevage. Les hôtes d’une porcherie modèle souvent visitée avaient associé la venue d’êtres humains à la nourriture que ceux-ci pouvaient leur apporter. La fréquence des visites renouvelait trop souvent ces réponses d’approche, et il s’ensuivait un ralentissement de la croissance pondérale des Porcs du fait de l’exercice musculaire qu’ils se donnaient ainsi. Un conditionnement « discriminatif » au son d’une cloche a permis de supprimer ces réactions intempestives, tout en laissant possible la venue de visiteurs.

Le danger de croupissement de l’eau dans les abreuvoirs de Bovins domestiques est actuellement évité par l’usage d’un abreuvoir individuel placé dans la stalle de chaque Bovin, et dont le remplissage est subordonné à l’appui du mufle de l’animal sur le fond du récipient et le vidage à la cessation de cet appui. La restriction des mouvements du Bovin est facilitée par l’exiguïté de la stalle, ce qui facilite l’émission de la réponse requise en fixant d’emblée sa « topographie » et en excluant une grande variété d’autres formes d’activité ; de la sorte, le conditionnement de l’animal s’opère rapidement de lui-même.

Si ces applications n’approfondissent pas notre connaissance du comportement animal, elles n’en constituent pas moins des preuves de la fermeté des acquisitions scientifiques déjà réalisées dans ce domaine, du fait même de leurs implications économiques.

• Diversité des domaines d’étude du comportement animal. Éthologie, psychologie expérimentale, conditionnement opérant, tels sont, semble-t-il, les trois principaux modes d’étude du comportement animal.

La diversité de ces disciplines n’est à regretter que si elle entraîne un cloisonnement, mais elle est au contraire un gage de fécondité si elle permet des échanges de résultats et de conceptions. Il ne s’agit, en effet, que d’une différence de points de vue portés sur un même objet, qui est le comportement animal, et, en dépit des particularités des divers problèmes abordés, les règles logiques de l’expérimentation fondent toujours l’accord des esprits quant à la portée des résultats recueillis.


Principaux comportements et aspects divers des conduites chez l’animal

• L’animal et son environnement physique.

1. perception. Le résultat le plus important des études sur les fonctions perceptives chez l’animal réside dans l’extrême diversité des « univers sensoriels » spécifiques, et notamment dans leur différence avec celui de l’être humain. La longueur d’onde n’est pas également perçue par tous les animaux : ainsi, le Rat, dont la rétine ne possède pas de cellules à cônes, ne paraît pas distinguer les couleurs, tandis que les Tortues en sont très capables. Le plan de polarisation de la lumière solaire, qui nous échappe, est très perceptible pour l’Abeille* et peut suffire à guider ses déplacements hors de la ruche.

Dans le domaine de l’audition, nous savons depuis peu que le Chien est capable d’entendre des ultrasons, à tel point qu’on fabrique des sifflets pour chiens policiers. Les Chauves-Souris sont capables de se diriger ainsi et de capturer leurs proies par écholocation ; il en est de même pour certains Cétacés comme les Dauphins. Autre repérage par émission-réception, l’électrolocation est pratiquée par la plupart des Poissons d’eau douce capables d’émettre des décharges électriques.

Les « tropismes » sont actuellement conçus et décrits comme « réactions d’orientation », qui dépendent fortement de l’état de motivation de l’organisme : ainsi, le phototropisme négatif, prétendu caractéristique des Termites, devient positif chez ces animaux à l’occasion du vol nuptial. Par ces réactions, l’animal tend à se maintenir dans son environnement écologique spécifique (biotope), défini par le recoupement de diverses zones de « préférendum », de telle sorte qu’il séjourne dans un lieu qui n’est, pour lui, ni trop chaud ni trop froid, ni trop éclairé ni trop sombre, etc. De tels déplacements peuvent être orientés, comme la plupart de ceux qu’induit une source lumineuse, ou bien ils peuvent résulter d’un effet probabiliste, auquel cas on les dénomme cinèses. Les réactions d’orientation sont ainsi responsables de certaines sortes de migrations, comme celles des Sardines, qui, pour rester dans les eaux dont la température correspond à leur thermopréférendum spécifique, suivent les nappes de transgression océaniques et migrent annuellement du sud au nord et vice versa.

2. orientation spatiale proche. La connaissance des lieux où vit l’animal et caractérisant son biotope est telle que les capacités d’apprentissage nécessairement requises par cette adaptation ont, depuis longtemps, suscité l’étonnement et amené les chercheurs à les étudier : la conclusion actuelle est qu’il n’existe pas de « mystérieux sens de l’espace » et que l’animal utilise tous les indices spatiaux dont il dispose en fonction des particularités de l’environnement et de son équipement sensoriel spécifique : la stéréotypie motrice joue un grand rôle chez le Rat, sous le contrôle, toutefois, des repères locaux de nature visuelle, tactile et olfactive. Par contre, les données visuelles jouent un rôle primordial chez le Pigeon ; les hypothèses concernant sa prétendue sensibilité au champ magnétique terrestre n’ont pu être vérifiées.

3. migrations. L’animal peut quitter son biotope pour une longue durée, se fixer dans un autre lieu très distant et revenir ensuite au premier. Bien que les motivations de ces déplacements soient alimentaires (voyage des Oiseaux d’Europe vers l’Afrique, migration d’avalaison des Saumons) ou sexuelles (retour des Oiseaux d’Europe pour la nidification au printemps, remontée du Saumon), ou les deux, c’est à la suite des comportements de locomotion précédemment mentionnés qu’il convient de les étudier à leur tour. En effet, le principal problème qui se pose à leur sujet concerne les repères d’orientation qui peuvent guider les espèces migratrices, et qui sont parfois surprenants. Par exemple, l’indice spatial qui guide principalement les déplacements lointains des petits Passereaux d’Europe est constitué par la position des repères célestes, y compris les astres nocturnes. Le plus extraordinaire est qu’il y a chez ces espèces une compensation temporelle de l’estimation de l’angle de route à adopter par rapport à ces repères en fonction de la saison à laquelle a lieu la migration. Par contre, on ne sait pas encore comment les Saumons retrouvent l’embouchure de leur fleuve d’origine une fois qu’ils sont en mer, afin de revenir à leur frayère. Lorsqu’on sait que des Saumons de l’Adour, marqués et relâchés par M. Fontaine et R. Vibert, ont été repêchés au large du Finistère, on mesure l’ampleur de tels déplacements marins. En revanche, on sait comment les Saumons se dirigent vers leur frayère une fois qu’ils se sont engagés dans l’embouchure du fleuve, c’est-à-dire comment, à chaque carrefour formé par un affluent, ils discriminent le chemin correct : ce choix est fondé sur l’olfaction, ce qui suppose un extrême développement de cette sensibilité chez le Saumon ; en effet, A. D. Hasler et W. J. Wisby ont montré que l’occlusion des narines chez les Saumons canadiens les amène à s’égarer en s’engageant dans les affluents ne conduisant pas à leur frayère.