Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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lait (suite)

L’écrémage spontané ne permet pas de récupérer la totalité de la matière grasse. Il laisse dans le lait 5 à 10 g de matière grasse par litre. Les pertes sont donc de l’ordre de 15 à 20 p. 100 de la matière grasse totale du lait. D’autre part, si l’écrémage spontané est effectué à basse température (10-12 °C), il nécessite plusieurs heures, au cours desquelles la flore bactérienne du lait se développe. On obtient toujours des crèmes plus ou moins acides, de moins bonne qualité que celle des crèmes obtenues par écrémage centrifuge.


Écrémage centrifuge

Pour obtenir un écrémage plus complet du lait, on utilise les écrémeuses, appareils dont le principe est le suivant : si l’on fait tourner rapidement autour d’un axe un liquide formé de particules non miscibles, les particules les plus lourdes sont projetées vers l’extérieur, tandis que les particules légères restent au voisinage de l’axe. Le lait que l’on veut écrémer est envoyé au centre d’un récipient cylindrique (bol de l’écrémeuse) qui tourne autour d’un axe vertical à la vitesse de 7 000 tr/mn. Le bol est cloisonné par un nombre variable de disques tronconiques appelés « assiettes », qui facilitent la séparation de la crème et du lait écrémé : le lait écrémé est envoyé vers l’extérieur, la crème vers le centre du bol. Les impuretés lourdes que peut éventuellement contenir le lait (débris divers, caséine floculée, etc.) sont projetées sur la paroi intérieure du bol, où elles adhèrent et constituent les boues d’écrémeuses. L’admission continue du lait à écrémer chasse crème et lait écrémé, qui sont recueillis séparément. Il existe des écrémeuses de débits très différents : 50 à 10 000 litres par heure. Les petits modèles d’écrémeuse sont utilisés dans les exploitations agricoles pour les fabrications fermières de beurre.

Il est intéressant de noter que tous les modèles d’écrémeuses centrifuges permettent d’écrémer le lait avec la même efficacité et laissent environ 0,5 g de matière grasse par litre de lait écrémé.

L’écrémage centrifuge, comme l’écrémage spontané, est d’autant plus facile que la taille des globules gras est plus grande et que la viscosité du lait est plus faible. S’il n’est pas possible de faire varier la taille des globules gras sinon en la réduisant, on peut diminuer la viscosité du lait en le réchauffant. Pratiquement, dans les usines, le lait est porté avant écrémage à une température de 30 à 35 °C environ.

La crème contient, outre la matière grasse, une certaine quantité de lait écrémé (la crème n’est pas autre chose que du lait enrichi de façon importante en matière grasse).

La teneur de la crème en matière grasse est réglée en fonction des techniques utilisées : 30 à 40 p. 100 pour les fabrications en baratte, 80 p. 100 pour certaines fabrications de beurre en continu. L’écrémage est donc un moyen de rapprocher les globules gras les uns des autres. Pour que ces globules se soudent facilement, on procède à la maturation des crèmes.


Maturation de la crème

La maturation de la crème consiste à favoriser dans la crème maintenue à une température de 12 à 18 °C le développement d’une flore lactique spontanée ou sélectionnée suivant que les crèmes ont été ou n’ont pas été pasteurisées. La fermentation lactique provoque une acidification qui a pour conséquence une modification de la charge électrique des globules gras. Lorsque l’acidité de la phase non grasse de la crème atteint 70 degrés Dornic (7 p. 100 d’acide lactique), la moitié environ des globules gras ont une charge électrique positive, ce qui facilite rapprochement et soudure des globules gras.

D’autre part, l’acidification des crèmes provoque une floculation de la caséine, ce qui facilite son élimination au cours du délaitage.

Au cours de la maturation et sous l’effet de ferments pseudolactiques (Betacoccus citrovorus et Betacoccus paracitrovorus), il y a production de diacétyle. Le diacétyle est le corps aromatique responsable de l’arôme et du goût du beurre.


Barattage

Écrémage et maturation ne sont que des opérations préliminaires dans la fabrication du beurre. On peut obtenir du beurre directement à partir du lait : dans certaines tribus africaines, le lait est placé dans des outres en peau que l’on frappe à coups de bâton jusqu’à l’obtention du beurre. D’autre part, dans certaines techniques de fabrication continue (procédé Fritz, procédé Alfa), ce sont des crèmes douces non maturées qui sont mises en œuvre. La formation du beurre est obtenue par une combinaison d’actions mécaniques et d’actions physiques.

La matière grasse du lait est formée d’un nombre important de glycérides, qui ont des points de fusion très différents. Dans les globules gras, les glycérides à point de fusion élevé sont cristallisés à la température ambiante. Ils baignent dans de la matière grasse liquide formée par les glycérides à bas point de fusion. Lorsque l’on soumet la crème à des chocs mécaniques violents, les cristaux de glycérides crèvent les membranes d’une partie des globules gras : les glycérides liquides sont libérés et lient entre eux les globules restés intacts.

La consistance du beurre dépend de la proportion de glycérides à bas point de fusion : au printemps et en été, comme le lait est riche en oléine, glycéride à bas point de fusion, le beurre est mou. C’est par l’action de la température au cours de la fabrication que l’on peut partiellement régulariser cette consistance.

Le barattage consiste donc à soumettre la crème à des chocs violents de façon à obtenir l’éclatement partiel des globules gras. Mais la température à laquelle l’opération est effectuée joue un rôle très important. Si la crème est trop chaude, la formation du beurre est beaucoup trop rapide. Les globules de matière grasse se soudent trop rapidement, et une partie importante des glycérides liquides est entraînée dans le babeurre. Le rendement de l’opération est mauvais. D’autre part, si la formation du beurre est trop rapide, il peut y avoir inclusion d’une trop grande quantité d’eau dans le beurre : le taux d’humidité légal (16 à 18 p. 100 suivant les pays) est dépassé.

La température au moment du barattage doit être réglée en fonction de la composition de la crème et de la consistance du beurre que l’on veut obtenir. Elle varie de 6 °C en été à 18 °C en hiver.