jazz (suite)
Dès le milieu des années 20, le jazz, associé à la vogue du charleston, éveille à Paris l’intérêt de jeunes intellectuels et artistes, notamment dans le milieu surréaliste. Qu’il s’agisse de copies ou de l’original, la musique négro-américaine, en même temps que l’art nègre, est à la mode dans ces cénacles. En 1932, après la venue d’Armstrong en Europe, se crée en France, sous l’impulsion d’Hugues Panassié, de Charles Delaunay et de Pierre Nourry, le Hot Club de France, association destinée à promouvoir le jazz. Le guitariste Django Reinhardt s’impose alors comme le premier jazzman européen parfaitement original. La même fièvre suscite en Grande-Bretagne et en Suède des vocations musicales et journalistiques. Pendant l’occupation allemande, coupé des États-Unis, le jazz français bénéficie de la popularité du swing et suscite l’enthousiasme des « zazous ». Nombre de musiciens (le saxophoniste Alix Combelle, le trompettiste Aimé Barelli, le clarinettiste Hubert Rostaing, le batteur Pierre Fouad, l’accordéoniste Gus Viseur...) enregistrent et jouent en public.
À partir de 1944, les tendances musicales apparues aux États-Unis déterminent de nouveau l’orientation du jazz européen. À Paris, le New Orléans Revival est illustré par Claude Luter, tandis que d’autres jeunes musiciens commencent à se passionner pour les innovations du be-bop. Mais le recul géographique et le poids des traditions culturelles seront toujours à l’origine d’un décalage des musiciens et amateurs européens par rapport aux styles et aux modes qui apparaissent aux États-Unis. Dans la mesure où l’Europe ne pouvait avoir du jazz américain qu’une connaissance indirecte et retardée (disques, presse, puis concerts), cet éloignement a pu jouer comme décentrement, conférant ainsi à la réflexion critique une certaine perspective qui explique que, pendant longtemps, la critique européenne ait eu — au niveau culturel, sinon directement au niveau commercial — un rôle relativement plus important que la critique américaine. Le développement considérable des moyens de communication et de diffusion, l’assouplissement de certaines barrières politiques et commerciales favoriseront à partir des années 60 une parfaite universalisation du jazz. Jazzmen et jazzfans, festivals et revues spécialisées se multiplieront aussi bien au Japon qu’en Hongrie, en Australie qu’en Argentine ou en Pologne.
P. C. et F. T.
A. Schaeffner et A. Coeuroy, le Jazz (Delpeuch, 1926). / R. Goffin, Aux frontières du jazz (Éd. du Sagittaire, 1932). / H. Panassié, le Jazz Hot (Corréâ, 1934) ; Histoire du vrai jazz (Laffont, 1959). / B. Ulanov, A History of Jazz in America (New York, 1950 ; trad. fr. Histoire du jazz, Buchet-Chastel, 1955). / A. Hodeir, Hommes et problèmes du jazz (Flammarion, 1954) ; les Mondes du jazz (U. G. E., 1970). / H. Panassié et M. Gautier, Dictionnaire du jazz (A. Michel, 1954 ; nouv. éd. 1971). / L. Feather, Encyclopedia of Jazz (New York, 1955). / L. Malson, les Maîtres du jazz (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1955 ; 6e éd., 1972) ; Histoire du jazz (Rencontre, Lausanne, 1967). / N. Shapiro et N. Hentoff, Hear me Talkin’ to ya (New York, 1955 ; trad. fr. Écoutez-moi ça, Corréâ, 1956). / M. W. Stearns, The Story of Jazz (Oxford, 1956). / J. E. Berendt, Das neue Jazzbuch (Francfort, 1959 ; trad. fr. le Jazz, des origines à nos jours, Payot, 1963). / R. Horricks, These Jazzmen of Our Time (New York, 1959 ; trad. fr. Jazzmen d’aujourd’hui, Buchet-Chastel, 1960). / LeRoi Jones, Blues People. Negro Music and White America (New York, 1963 ; trad. fr. le Peuple du blues, Gallimard, 1968) ; Black Music (New York, 1967 ; trad. fr. Musique « noire », Buchet-Chastel, 1969). / A. Clergeat, Dictionnaire du jazz (Seghers, 1966). / B. Vian, Chroniques de jazz (la Jeune Parque, 1967 ; nouv. éd., U. G. E., 1971). / F. Ténot et P. Carles, Dictionnaire du jazz (Larousse, 1967). / P. Carles et J.-L. Comolli, Free Jazz et Black Power (Champ libre, 1971). / H. Renaud (sous la dir. de), Jazz classique et jazz moderne (Casterman, 1971 ; 2 vol.).
On peut également consulter les principales revues françaises : Jazz Hot, Jazz Magazine, Bulletin du Hot Club de France.