Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
J

Java (suite)

De l’ouest à l’est se succèdent les grands cônes du Lawu (3 265 m), du Wilis, du Kelud et du Kawi, puis la masse complexe de l’Arjuna Welirang (3 339 m), dont toute la partie septentrionale s’est affaissée en même temps que se déplaçait le centre d’éruption ; enfin, la section plus rétrécie de l’île (elle ne mesure guère que 60 km de large à l’est de Probolinggo) montre une série de trois blocs volcaniques : celui du Tengger, dominé par le Semeru (3 676 m), le point culminant de Java ; puis le groupe du Lamongan, parsemé de maares (lacs) et de cônes cendreux, de l’Ijang et de l’Argapura ; enfin l’édifice de l’Ijen, grandiose caldeira parsemée de cratères, certains lacustres, dominée par des volcans, dont l’un, le Raung, atteint 3 332 m ; de longs glacis ravinés l’entourent, tombant à l’est dans le détroit de Bali.

Les communications dans la partie orientale de Java sont, néanmoins, faciles, car elles peuvent utiliser les larges couloirs qui contournent les volcans (rivières de Madiun et Brantas) et qui, jusque dans la partie orientale de Java, sont reliés entre eux par des seuils relativement bas. Comme dans le reste de l’île, les côtes septentrionales contrastent par leur animation avec le littoral méridional, d’aspect encore sauvage et quasi désert. Elles sont presque partout très basses, avec des lagunes ; quant à la ride du Rembang, elle se relève et apparaît de nouveau dans l’île de Madura. Dans cette île de 6 000 km2, les sols sont très pauvres et le relief est peu élevé (le point culminant est à 471 m d’altitude).


La surpopulation

Java a toujours paru une terre d’élection pour les hommes, qui s’y sont multipliés de façon extraordinaire. Bien que cette île ne représente que 7 p. 100 de la superficie totale de la république d’Indonésie, soit à peine le quart du territoire français, elle réussit, tant bien que mal, à nourrir 80 millions d’habitants (les deux tiers du peuple indonésien). Une telle densité d’occupation, essentiellement rurale (plus de 600 hab. au km2), n’est réalisée en aucune autre région de la terre sur une superficie dépassant sensiblement 100 000 km2.

Et pourtant, en 1900, il n’y avait que 28 millions d’habitants, avec un taux de croissance qui ne dépassait pas 1,2 p. 100 par an. Depuis les années 1930, la population croît à un rythme beaucoup plus élevé, en raison de la baisse du taux de mortalité, consécutive aux progrès de l’hygiène, et notamment grâce à la politique sociale mise en pratique par la puissance coloniale. Actuellement, ce taux de croissance est de l’ordre de 2,3 p. 100 par an, si bien que l’accroissement qui en résulte (près de 2 millions de personnes par an) risque, à brève échéance, de devenir dramatique ; si, en 1900, il y avait déjà environ 200 habitants au kilomètre carré, dans une dizaine d’années il y en aura plus de 700.

Ce taux d’occupation du sol est bien plus fort encore si l’on se réfère à la surface utile, c’est-à-dire réellement cultivable. Java est une île volcanique, donc montagneuse, et, en dépit de la permanence et de l’accumulation des efforts d’innombrables générations de paysans ingénieux et patients, tout ne peut être cultivé. La situation dans ce domaine est assurément proche d’un maximum, et les progrès techniques parfois envisagés ne sont souvent que des solutions à très court terme.

Si l’irrigation, l’utilisation intensive d’engrais et d’insecticides permettent en maints endroits de doubler la récolte annuelle, l’effort demandé à la terre conduit à son épuisement rapide. Les rendements sont, d’ailleurs, déjà très élevés dans certaines régions de Java, et notamment dans le centre de l’île, où ils atteignent jusqu’à 100 quintaux par hectare pour le riz (grâce à trois récoltes annuelles). La campagne est donc à la limite de ses possibilités sur le plan de la production agricole ; de ce fait, elle ne peut retenir plus longtemps ses excédents de population, qui, chaque année, vont grossir les énormes agglomérations urbaines de l’île, déjà surpeuplées.

Il y a à Java 9 Mha cultivés et 3 Mha de forêts. Ce pourcentage de terres cultivées par rapport à la surface totale est très élevé. La densité acquiert une signification plus précise si on la rapporte aux surfaces cultivées. En 1970, il y avait à Java 833 habitants au kilomètre carré cultivé ; cette surpopulation engendre un taux de chômage extrêmement élevé, qui se concrétise de la façon la plus apparente dans les villes (v. Djakarta).


L’économie agricole

Java concentre la moitié des surfaces cultivées de l’Indonésie. Cette mise en valeur agricole intensive se fait essentiellement sous deux formes. Les plantations occupent 6 000 km2. Le reste des surfaces cultivées (82 000 km2) appartient à des petits propriétaires qui, en général, se consacrent aux cultures vivrières. Celles-ci sont stimulées par une demande très forte ; 38 000 km2 sont exclusivement utilisés pour la culture du riz. Sur ces 38 000 km2 de rizières, 28 000 sont irrigués (sawah) et 10 000 doivent être cultivés à sec (tegalan). Les 44 000 km2 restants servent à d’autres productions agricoles (maïs, manioc, patates douces, arachide, germes de soja, tabac, canne à sucre et café). On constate qu’il s’est produit en trente-quatre années (1933-1967) une très légère augmentation des surfaces cultivées, mais l’augmentation globale de la production qui aurait dû l’accompagner est, finalement, très faible.

Cette évolution traduit bien les efforts déployés par les paysans javanais pour mettre en valeur toutes les terres disponibles afin de répondre à l’accroissement rapide de population qu’a dû supporter leur île depuis les années 30 ; mais cela montre aussi que les défrichements se font à présent sur des terres de plus en plus ingrates à exploiter, ce qui aboutit à une stabilité des rendements.

Néanmoins, on cherche actuellement à substituer aux variétés de riz locales de nouvelles, dont le cycle végétatif est plus court (de 125 à 135 jours), qui répondent beaucoup mieux à l’application intensive des engrais et tolèrent un repiquage plus serré, ce qui permet un accroissement sensible des rendements.