Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
I

Italie (suite)

La guerre. La fin du fascisme

• Le 7 avril 1939, les troupes italiennes envahissent l’Albanie*, qui est annexée au royaume ; mais, en septembre, l’Italie n’est pas prête à entrer en guerre contre la France ; elle ne s’y résout que le 10 juin 1940, son adversaire étant déjà à genoux.

• Désormais, le sort de l’Italie mussolinienne est attaché à celui d’une Allemagne nazie qui triomphe en Europe, mais dont l’Italie se révèle un allié de plus en plus gênant. L’opération italienne contre la Grèce (oct. 1940) échappe au désastre grâce à l’intervention allemande. En Russie, en Afrique — où ils perdront tout leur Empire —, les Italiens ne jouent que des rôles de comparses.

• Quand les Alliés débarquent en Sicile (juill. 1943), les troupes italiennes laissent tout le poids de la guerre aux Allemands.

• Mis en minorité par le Grand Conseil fasciste (24-25 juill. 1943), Mussolini est arrêté le lendemain sur l’ordre du roi. Un gouvernement présidé par le maréchal Badoglio* signe le 3 septembre un armistice avec les Alliés, rendu public le 8. Mais les Allemands résistent ; le roi doit fuir Rome.

• Mussolini, libéré (12 sept.), s’installe à Salo (lac de Garde), où il proclame la République sociale italienne, satellite de l’Allemagne ; Badoglio et le roi déclarent la guerre à l’Axe (13 oct.).

• Les Alliés ne progressent que lentement vers le nord du pays. Si Naples tombe le 1er octobre 1943, Rome n’est délivrée que le 4 juin 1944. La ligne Gothique, qui coupe en deux le pays, n’est enfoncée qu’en avril 1945.

• Cependant, Victor-Emmanuel III a confié la lieutenance générale du royaume à son fils Humbert (5 juin 1944). Le Comité de libération nationale (CNL), présidé par le socialiste I. Bonomi, forme un ministère (juin 1944 - juin 1945) avec les chefs des six partis antifascistes (libéral, démocrate chrétien, démocrate du travail, d’« action », socialiste, communiste).

• Le CNL — de Milan et Rome — s’efforce, tout en aidant militairement, par la guérilla, les Anglo-Saxons, de faire redémarrer le pays et épure les grandes administrations.

• Le 29 avril 1945, dans la haute Italie, les partisans imposent aux Allemands une capitulation signée à Caserte. Mussolini, capturé par les partisans à Dongo, a été exécuté la veille avec sa maîtresse, Clara Petacci, et quinze hiérarques fascistes.

• Juin 1945 : Ferruccio Parri succède à Bonomi ; en décembre, c’est le tour de De Gasperi*, dont l’action sera décisive dans le relèvement de l’Italie ruinée.

P. P.


L’histoire de l’Italie contemporaine


L’après-guerre (1945-1948)

Les forces politiques en présence en 1945, à la fin de la Seconde Guerre mondiale, ont comme élément commun leur longue opposition au fascisme, contre lequel elles ont organisé la résistance armée en Italie du Nord pendant les deux dernières années. La première nécessité est la reconstruction matérielle et économique du pays. Mais beaucoup plus important est le vide dans lequel se trouve l’État, aussi bien dans ses institutions que dans la conscience du peuple, après plus de vingt ans de domination fasciste et d’absence de vie démocratique. Sans doute l’antifascisme est-il un élément unificateur, mais les idées des partis issus de la Résistance (Comité de libération nationale) divergent en ce qui concerne les directions à suivre pour organiser le nouveau système politico-social et la reconstruction nationale. Cependant, ils acceptent un critère de parité entre eux et participent d’une manière paritaire au gouvernement central.


Les forces en présence

Seule force nouvelle, le parti d’action, de souche radicale, est formé d’un groupe d’intellectuels dont beaucoup ont participé, au cours de la dernière décennie, au mouvement antifasciste « Giustizia e Libertà » (Justice et Liberté). Ce parti se caractérise par son hostilité intransigeante à tout compromis avec la situation du préfascisme et avec la monarchie. Orienté vers une forme de socialisme libéral, il n’est uni que dans la critique, car lorsqu’il faut passer à l’action, il diverge sans réussir à établir une liaison efficace avec l’opinion.

Par contre, libéraux, communistes, socialistes et démocrates chrétiens se rattachent à de puissantes traditions historiques, culturelles et politiques.

Les libéraux sont le seul groupe dirigeant qui ait une influence populaire restreinte ; les autres forces, elles sont en mesure de mobiliser les masses.

Les communistes sont les mieux organisés ; ils identifient le fascisme avec la bourgeoisie et visent à la conquête du pouvoir à travers l’action de masse. L’hypothèse de la révolution immédiate comme moyen de réaliser le socialisme étant exclue, le leader Palmiro Togliatti* conçoit le parti communiste comme un parti de masses (et non pas seulement de cadres), orienté vers l’action politique (plutôt que vers l’agitation révolutionnaire) et à la recherche de liaisons avec les techniciens, les intellectuels, les petits entrepreneurs, etc. Les socialistes penchent à cette époque pour un parti unique de travailleurs.

Face aux gauches unies et sous la conduite d’Alcide De* Gasperi, la démocratie chrétienne rassemble le noyau des anciens dirigeants « populaires », d’orientation nettement anticonfessionnelle, et les nombreux représentants de la nouvelle génération, issue de l’Action catholique et des mouvements des universitaires (Federazione universitaria cattolica italiana [Fusi]). La démocratie chrétienne est, sans aucun doute, un mouvement populaire qui, opposé au fascisme, propose une organisation décentralisée de l’État qui se fonde sur les sociétés intermédiaires (famille, associations diverses).


Fin de la monarchie et rupture du tripartisme

La situation politique est tout de suite rendue précaire par la présence à l’extrême gauche du plus fort mouvement communiste de l’Occident et, à l’extrême droite, d’un amalgame de nostalgies fascisantes ou autoritaires.

Le gouvernement formé en décembre 1945 marque l’entrée en scène du leader démocrate-chrétien Alcide De Gasperi, qui sera président du Conseil de huit ministères consécutifs, jusqu’en août 1953.

Les résultats des premières élections politiques du 2 juin 1946 pour l’Assemblée constituante confirment la prédominance des trois formations principales : démocratie chrétienne, parti communiste et parti socialiste.