Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
H

holographie (suite)

Dans tout système optique, le rayonnement émis par la source lumineuse est limité par un contour appelé pupille (diaphragme de champ matérialisable ou pupille de l’œil). Le plan de cette pupille divise l’espace en deux sous-espaces : le premier, contenant la source, est l’espace objet ; le second, où se trouve la rétine ou le détecteur photosensible, est l’espace image. Pour ce dernier, le faisceau émis par la source est limité par la pupille. Sur celle-ci, le champ lumineux définit une répartition spatiale d’amplitude et de phase vibratoire. Le principe de Huygens-Fresnel affirme alors que cette répartition est caractéristique du faisceau lumineux pour l’espace image : si l’on remplace la source par une répartition spatiale de sources secondaires réparties sur la pupille de telle façon que leurs amplitudes et leurs phases soient synchronisées avec celles du faisceau incident, on aura restitué, pour l’espace image, la source initiale. D’un autre point de vue, on peut dire qu’en fixant la répartition spatiale d’amplitude et de phase sur la pupille on enregistre intégralement le signal lumineux émis par l’espace objet.

C’est cette opération très complexe que réalise l’holographie, au moyen, il est vrai, de sources de lumière bien particulières, les lasers. Les sources classiques, par exemple les lampes à incandescence, émettent de la lumière dans un désordre plus ou moins complet. Chaque atome émet un rayonnement électromagnétique lorsqu’il reprend sa position d’équilibre après avoir été bousculé, mais il n’existe aucune relation entre les émissions de deux atomes voisins ni entre deux émissions d’un même atome. Le premier point traduit l’incohérence spatiale, et le second l’incohérence temporelle. De telles sources émettent en conséquence un rayonnement dont l’amplitude et la phase sont des fonctions aléatoires de l’espace et du temps. Les vibrations en deux points quelconques du faisceau lumineux sont totalement indépendantes.

On peut, cependant, garder un certain degré de cohérence spatiale en diaphragmant la source de façon telle que seuls les rayonnements issus de quelques atomes voisins nous parviennent. En deux points du faisceau lumineux équidistants de la source, les vibrations ne sont plus totalement indépendantes. On peut faire l’expérience classique des trous d’Young en utilisant comme pupille un écran opaque percé de deux trous situés à des distances égales de la source. Dans l’espace image, on observe alors des franges d’interférence, de contraste d’autant plus faible que le diaphragme est plus ouvert. À la limite, les franges disparaissent. En ouvrant progressivement le diaphragme, on passe donc de la cohérence spatiale parfaite, si celui-ci est réduit à un point source, à l’incohérence totale lorsqu’il est grand ouvert.

L’incohérence temporelle traduit par contre l’indépendance des vibrations en deux points distincts d’un même rayon lumineux. Elle dépend donc de la longueur des trains d’ondes émis par les atomes ; on a incohérence totale si cette longueur est nulle et cohérence parfaite si elle est infinie. La théorie montre que cette « longueur de cohérence » est liée à la monochromaticité du rayonnement ; plus celui-ci est monochromatique, plus les trains d’ondes sont longs, et inversement. Cela est mis en évidence en observant les anneaux à l’infini donnés par l’interféromètre de Michelson. Au voisinage de la différence de marche nulle, le contraste est voisin de 1 ; lorsque l’on translate l’un des miroirs, il diminue d’autant plus vite que la cohérence temporelle est faible. Un moyen simple de l’augmenter est de placer un filtre coloré de bande passante très étroite devant la source. Seules nous parviennent les vibrations transmises par le filtre ; les autres sont stoppées.

Le laser possède un haut degré de cohérence spatiale et temporelle. L’expérience des trous d’Young permet d’observer de très belles franges d’interférence quelle que soit la position des trous. Sur un interféromètre de Michelson, on réussit à observer des anneaux avec des différences de marche de l’ordre de 1 km pour certains lasers, alors que les sources ordinaires les plus monochromatiques ne permettent pas de dépasser quelques centimètres.

En conséquence, le signal électromagnétique émis par le laser n’est plus une fonction aléatoire de l’espace. Il est alors possible de faire passer une surface non fictive par tous les points équiphases. L’optique la nomme surface d’onde et en étudie les déformations dans les circonstances les plus variées. Ainsi, une surface d’onde plane qui traverse une lame à faces parallèles transparente et non homogène en ressort bosselée (fig. 1). La bosse de phase est caractéristique du défaut de la lame, mais elle échappe à l’observation. En effet, l’œil, ainsi que tous les détecteurs photosensibles, n’enregistre que l’amplitude des ondes, et l’information de phase disparaît. Cependant, les procédés classiques du contraste de phase permettent de la mettre en évidence en créant une interférence entre cette onde bosselée et un fond cohérent. Les variations de phase sont ainsi transformées en variations d’amplitude visibles à l’œil.

L’onde issue du laser est plane. Lorsqu’elle est réfléchie par un objet quelconque, elle est profondément modifiée. On obtient l’onde réfléchie à partir de l’onde incidente en menant selon chaque rayon des distances PP′ égales (fig. 2). La surface d’onde réfléchie est donc très compliquée, mais caractéristique du relief de l’objet.

Les procédés de l’holographie permettent d’enregistrer cette surface d’onde complexe, bien que les détecteurs soient sensibles seulement à l’intensité de la lumière, c’est-à-dire au carré de l’amplitude du champ lumineux. En général, l’information contenue dans la phase de l’onde lumineuse disparaît pour cette raison. La photographie ordinaire établit une correspondance point par point entre la répartition d’intensité dans le plan de mise au point et le plan de la pellicule. Elle perd donc toute information de profondeur ou de relief contenue dans la phase. Le codage holographique permet, par contre, de l’enregistrer aussi. La figure 3 montre le schéma du montage d’enregistrement. La lumière issue du laser traverse l’objectif O, puis est séparée en deux parties par une lame semi-transparente S. La première éclaire l’objet, qui diffuse en direction de la plaque photographique ; la seconde l’éclaire directement. Sur la plaque se superposent deux ondes : l’« onde objet », complexe moins caractéristique de l’objet, et un fond cohérent dû à l’onde directe, ou « onde porteuse ». Il y a interférence, car la différence de phase entre les deux ondes est constante dans le temps en chaque point de la plaque. L’émulsion sensible peut les enregistrer par simple exposition. Après développement, il existe en chaque point de la plaque un réseau de franges d’interférence, et la phase de l’onde objet est ainsi enregistrée par comparaison avec une phase de référence connue.