Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

Amérique latine (suite)

• Les richesses du sous-sol et les industries minières. Des minerais indispensables à la vie économique moderne, comme les minerais de fer, de cuivre, d’étain, de manganèse, et surtout le pétrole ont joué pour les grandes puissances industrielles, au xixe s. et surtout au xxe s., le même rôle d’appât qu’avaient joué l’or et l’argent pour l’Espagne et le Portugal au xvie s. L’essentiel des installations minières est leur propriété (notamment celle des États-Unis, qui absorbent aussi la majeure partie des productions).

Le minerai de fer se trouve en grandes quantités dans les États de Minas Gerais, de Goiás et de Mato Grosso, au Brésil. Après 1945, son extraction prend une grande ampleur, tant pour l’industrie brésilienne que pour l’étranger, en particulier les États-Unis. Les autres grands producteurs de minerai de fer sont le Venezuela et le Chili, qui en exportent respectivement 15 et 6 Mt par an, et où se sont installées les grandes sociétés sidérurgiques des États-Unis.

Les minerais non ferreux étant de très faible teneur, les mines s’accompagnent généralement d’usines de broyage et de concentration du minerai, même lorsque celui-ci est destiné à l’exportation, comme c’est le cas le plus fréquent. La Bolivie offre un exemple de ces petits complexes industriels. Ceux-ci sont situés sur les vastes gisements de minerai d’étain exploités depuis 1945 par les compagnies américaines ; la nationalisation des sociétés minières, qui intervint en 1952, ne modifia d’ailleurs pas la destination du minerai, toujours exporté vers les États-Unis.

Le minerai de cuivre se trouve par grands gisements au nord du Chili (Chuquicamata, Potrerillos). Les plus grandes mines, jusqu’en 1970 sous contrôle américain, sont maintenant propriété chilienne. D’autres gisements de moindre importance sont situés au Pérou, dans le nord-ouest de l’Argentine, au Venezuela et au Brésil. C’est au Brésil qu’on trouve les plus importants gisements de manganèse, dont l’essentiel est fourni par le territoire d’Amapá.

Enfin, la présence du pétrole joue un rôle décisif dans l’afflux des capitaux étrangers. Sauf dans les cas du Brésil et du Mexique, les grands trusts anglo-saxons ont eu longtemps une participation dominante selon les États. Le principal producteur de pétrole est le Venezuela (155 Mt). L’essentiel des installations était aux mains de trois grandes compagnies étrangères : la Standard Oil of New Jersey (Esso) et la Gulf Oil, américaines, et la Royal Dutch Shell, anglo-néerlandaise. Afin de conserver une partie de ses richesses comme base de son industrialisation, le Venezuela limite depuis 1945 les possibilités d’exporter le pétrole brut et s’efforce de créer à l’intérieur du pays des centres de raffinage, tels que ceux de San Lorenzo et de Puerto la Cruz. Des problèmes analogues se posent à l’Équateur, à la Colombie et au Pérou, qui produisent respectivement 10,9, 4 et 3,4 Mt de pétrole.

L’Argentine a, par contre, strictement réglementé la participation des grands trusts internationaux à l’exploitation des gisements de pétrole. L’essentiel du pétrole argentin (production totale de 21,5 Mt) est fourni par le gisement de Comodoro Rivadavia, sur la côte de Patagonie. Le pétrole brut est traité dans les grandes raffineries de Buenos Aires.

Au Brésil, tous les gisements de pétrole sont nationalisés et exploités par la seule compagnie Petrobras. L’essentiel de la production brésilienne (8 Mt au total) est fourni par l’État de Bahia et alimente la raffinerie de Mataripe, installée sur place.

Au Mexique, les gisements de pétrole sont également nationalisés. La production (27 Mt), destinée à la consommation intérieure, alimente les raffineries situées sur les zones de production de la côte orientale et aux environs de Mexico.

Les exportations de produits bruts ou semi-élaborés du sous-sol procurent donc aux différents États des revenus importants, qui permettent plus ou moins de compenser le poids des importations de produits industriels, que la faiblesse des industries d’équipement rend nécessaires.

• La faiblesse des industries d’équipement, en particulier de la sidérurgie. C’est la structure économique et sociale, et non la rareté du charbon, qui permet de rendre compte de l’apparente contradiction que présente l’Amérique latine : pourvus d’un sous-sol riche en minerai de fer de haute qualité, tous les États sont néanmoins importateurs de produits sidérurgiques.

Les capitaux privés locaux ont largement négligé le secteur d’équipement, et en particulier la sidérurgie, qui demande de lourds investissements, amortis seulement à long terme. Tardivement née, la sidérurgie a été, dans la plupart des cas, le fait d’une volonté gouvernementale et de capitaux publics. Ces initiatives d’État ont parfois stimulé l’initiative privée. Ce fut le cas au Brésil après la mise en production du complexe de Volta Redonda en 1946. Un groupe capitaliste brésilien fonda une aciérie à São Paulo. Puis l’essor de la sidérurgie brésilienne attira dès 1959 le capital étranger, en particulier de l’Allemagne de l’Ouest et du Japon. En 1974, le Brésil a produit 7,5 Mt d’acier. Le Mexique suit avec 5 Mt. Au Chili, près de 1 Mt de minerai de fer sont maintenant traitées dans l’aciérie de Huachipato, malgré les diverses pressions longtemps exercées par la Bethlehem Steel pour que la totalité de la production chilienne de minerai de fer continue à être exportée aux États-Unis. Moins bien pourvue en fer ainsi qu’en charbon, l’Argentine possède néanmoins aujourd’hui une sidérurgie qui produit plus de 2,3 Mt d’acier. Plus tardivement, les gouvernements du Venezuela, de la Colombie et du Pérou se sont efforcés de réaliser l’installation d’au moins une usine sidérurgique ; c’est ainsi que le Pérou a produit en 1958 sa première tonne d’acier. Malgré ces efforts, la sidérurgie n’est pas suffisamment développée pour couvrir les besoins des différents pays, qui restent tributaires d’importations qui pèsent lourdement dans leurs balances commerciales.