Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
G

Genet (Jean) (suite)

Au cœur d’une fresque grouillante (25 tableaux, 100 personnages) se détache un misérable trio arabe : Saïd, sa femme Leïla, sa Mère. C’est la Mère qui, avec les putains du bordel, mènera tout le cérémonial. Quant à Saïd, voleur, incendiaire, lâche, traître, assassin, il ne cesse de s’enfoncer plus avant dans l’infamie, Christ à rebours qui tenterait d’atteindre le Mal absolu. Genet, aux deux tiers de la pièce, fait mourir l’un après l’autre, avec une sorte de discrète tendresse, tous ses personnages. Il leur suffit de crever un paravent, tout en haut de la scène, pour se retrouver, pacifiés, colons et Arabes mêlés, au royaume des morts. Un seul échappera au sort commun : Saïd. L’absolu de l’abjection lui vaut, après avoir été fusillé par les maquisards arabes, de tomber directement au cœur de quelque enfer indicible, dans une chute inverse de l’ascension du Christ. Si la sainteté, comme le fait remarquer Sartre, consiste à « assumer avec une totale humilité l’état de péché inhérent à la condition humaine », alors Saïd est un saint, et Genet aussi... « saint Genet ».

Théâtre de protestation sociale, mais par le moyen du blasphème et de la provocation, théâtre de la cérémonie et de l’image, où les prestiges du langage (du lyrisme à la scatologie) constituent le travesti suprême grâce auquel une poignée de parias explorent les mystères de la condition humaine, le théâtre de Genet s’inscrit, à la suite d’Artaud, contre la « chienlit du théâtre occidental ». Comme Artaud, Genet rêve de ce théâtre total (« qui contienne pour le cœur et les sens une espèce de morsure concrète ») dont l’Orient nous propose l’admirable modèle.

Avançant librement sur ses propres chemins, indifférent aux recherches de ses contemporains (les écrivains de l’absurde), Genet a largement contribué pour sa part au renouveau de la littérature théâtrale qui marqua décisivement la France des années 50.

G. S.

 J.-P. Sartre, « Saint Genet, comédien et martyr » dans Œuvres complètes de Jean Genet, t. I (Gallimard, 1952). / G. Bataille, la Littérature et le mal (Gallimard, 1957). / J.-M. Magnan, Jean Genet (Seghers, 1966 ; 2e éd., 1971). / R. N. Coe, The Vision of Jean Genet (New York, 1969).

Les œuvres de Jean Genet

(Publiées aux éditions Gallimard, les Œuvres complètes sont mentionnées ici sous le sigle O.C.)

1942

le Condamné à mort (Fresnes, 11 pages ; O.C. II, 1951).

1944

Notre-Dame-des-Fleurs (l’Arbalète, no 8 ; O.C. II).

1945

Chants secrets (Éd. l’Arbalète, 1945).

1946

Miracle de la rose (Éd. l’Arbalète, 1946 ; O.C. II).

1947

Pompes funèbres (O.C. III, 1953).

Querelle de Brest (O.C. III).

les Bonnes (1re édition dans l’Arbalète, no 12 ; version définitive précédée de Comment jouer « les Bonnes », Éd. l’Arbalète, 1964 ; O.C. IV, 1968). / Création de la 1re version : théâtre de l’Athénée, 1947 ; mise en scène Jouvet, 2e version : théâtre de la Huchette, 1954 ; mise en scène Tania Balachova. / Traductions : anglaise, The Maids (1954) ; allemande, Die Zofen (1957).

Haute Surveillance (la Nef, no 28 ; O.C. IV). / Création : théâtre des Mathurins, 1949. / Traductions : anglaise, Deathwatch (1954) ; allemande, Unter Aufsicht (1957).

1948

Poèmes (Éd. l’Arbalète, 1948 ; O.C. II et III).

’Adame Miroir, argument de ballet, musique de D. Milhaud, chorégraphie de J. Charrat (Éd. Heugel). / Création : théâtre Marigny, Ballets de Paris, de Roland Petit, 1948.

1949

Journal du voleur (Éd. Gallimard, 1949). / Traduction anglaise, The Thief’s Journal (1954).

l’Enfant criminel (Éd. Morihien, 1949-50).

1956

le Balcon (Éd. l’Arbalète, 1956 ; version définitive précédée de Comment jouer « le Balcon », O.C. IV). / Création en anglais, 1957 ; mise en scène Peter Zadek. Création en français : théâtre du Gymnase, 1960 ; mise en scène Peter Brook. / Traductions : anglaise, The Balcony (1957) ; allemande, Der Balkon (1959).

1958

le Funambule, dans l’Atelier d’A. Giacometti (Éd. l’Arbalète, 1963).

les Nègres (Éd. l’Arbalète, 1958 ; 2e édition précédée de Pour jouer « les Nègres », 1964). / Création : théâtre de Lutèce, 1959 ; mise en scène Roger Blin. / Traductions : anglaise, The Blacks (1960) ; allemande, Die Neger (1968).

1961

les Paravents (Éd. l’Arbalète, 1961). / Création en allemand, 1961 ; mise en scène Hans Lietzau. Création en français : Odéon-Théâtre de France, 1966 ; mise en scène Roger Blin. / Traductions : anglaise, The Screens (1962) ; allemande, Wände überall (1960).

génétique

Science de l’hérédité.



Historique

La génétique est probablement aussi vieille que l’humanité. Très vite, les hommes se sont rendu compte qu’un organisme vivant n’engendre que son semblable. Le Roseau engendre un Roseau, et l’Homme un Homme. De même, un individu ressemble plus à ses parents qu’à d’autres individus. Pourtant, dans une même espèce, deux individus ne sont jamais identiques, à l’exception des vrais jumeaux. Hérédité et variation sont les deux phénomènes que la science « génétique » étudie et tente d’expliquer.

Bien avant l’invention de l’écriture, l’Homme a domestiqué, transformé, créé, sélectionné presque toutes les espèces animales et végétales connues aujourd’hui. Le taureau domestique provient du croisement de deux espèces voisines, Bos primigenius et B. longifrons. Le mulet provient du croisement d’un Ane et d’une jument, le bardot est issu du croisement inverse. Le mulet et le bardot sont des individus stériles. La notion d’espèce repose précisément sur cette stérilité ; l’espèce est définie comme un groupe d’individus qui ne peuvent se reproduire qu’à l’intérieur de ce groupe et non à l’extérieur.

La reproduction entre individus étroitement apparentés (endogamie) a depuis toujours été diversement appréciée. Non souhaitée dans les civilisations occidentales modernes, elle a été recherchée par les éleveurs, qui ont adopté ce procédé pour améliorer certaines espèces animales domestiques, le Cheval par exemple.

Dans les civilisations antiques et encore de nos jours, l’endogamie est pratiquée selon des rites extrêmement variés. On connaît également le rôle qu’elle a joué chez les pharaons d’Égypte.