Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Gdańsk (suite)

1919-1939 : la ville libre de Dantzig

En 1919, le traité de Versailles dote la Pologne restaurée d’un corridor d’accès à la mer par la baie de Dantzig et impose à la ville, allemande à 90 p. 100 (avec un territoire de 1 888 km2 et 356 000 hab.), un statut international sous mandat de la S. D. N.

Le statut du 15 novembre 1920 et l’accord de Varsovie du 24 octobre 1921 limitent sa souveraineté au profit de la Pologne, qui l’englobe dans sa frontière douanière, dirige sa politique extérieure, assure sa défense (base de Westerplatte), utilise ses installations portuaires confiées à un conseil paritaire, exploite ses moyens de communication. La minorité polonaise (12 p. 100 en 1939) jouit d’institutions culturelles autonomes.

Les litiges incessants entre la Pologne et le Sénat, qui cherche à réduire ces droits, excèdent la S. D. N. et déterminent les Polonais à construire le port de Gdynia (1924-1930). La précarité du statut est évidente quand Hitler devient le maître du Reich. Implantés à Dantzig dès 1930, les nazis en contrôlent la Diète en mai 1933, le Sénat en 1934. Dès lors, la terreur politique et les manifestations nationalistes ne cessent de croître. La « question de Dantzig » n’est plus qu’ajournée par Hitler. Le 28 avril 1939, il exige sa restitution. La Pologne ne cède pas : mais qui voudra « mourir pour Dantzig » ? La crise ainsi ouverte aboutit pourtant, le 1er septembre 1939, au déclenchement de la Seconde Guerre mondiale. Presque entièrement détruit par les bombardements aériens (1941-1945), Dantzig est libéré par les Russes (28-30 mars 1945) et, rendu à la Pologne, redevient Gdańsk.


Au sein de la République populaire de Pologne

En juin 1945, sur 132 000 habitants, Gdańsk compte 8 500 Polonais ; dès février 1946, ceux-ci sont 94 000, tandis que les Allemands sont transférés à l’Ouest. La reconstruction de la ville par les autorités polonaises est achevée en 1960 : elle est un modèle de goût et de fidélité au style ancien.

La grève des chantiers navals et les émeutes qui éclatent à Gdańsk le 14 décembre 1970 se propagent à tous les ports, déclenchant la crise qui permet à Gierek d’évincer Gomulka* du pouvoir.

C. G.


La ville actuelle

La fonction de la ville est avant tout portuaire. Le régime socialiste a considérablement développé la vocation maritime de la Pologne, et Gdańsk a bénéficié d’investissements prioritaires. C’est un centre de pêcheries d’importance moyenne, la majeure partie des prises étant assurée par les petits ports de la côte de Poméranie. Le chantier de constructions navales compte parmi les plus actifs de toute l’Europe orientale et livre des bateaux de pêche, des chalutiers, des cargos et des minéraliers à l’U. R. S. S. et à des États occidentaux. Gdańsk est le point d’attache de plusieurs lignes maritimes régulières non seulement avec les ports de la Baltique et de la mer du Nord, mais aussi avec les autres continents. Le trafic de marchandises est plutôt spécialisé dans le transit, les marchandises légères et de valeur. Le trafic annuel, à peu près également réparti entre importations et exportations, s’élevait déjà à 6 Mt en 1950, et, après un léger fléchissement, atteint aujourd’hui les 10 Mt. Enfin, Gdańsk ne peut être séparé de son voisin Gdynia, port fondé entre les deux guerres à l’extrémité du « corridor polonais » afin de concurrencer le trafic de la « ville libre ». Les deux organismes portuaires sont devenus complémentaires, Gdynia se chargeant surtout du trafic de relations lointaines, le total des marchandises en transit s’élevant à 8 Mt.

Gdańsk est ainsi le centre d’une conurbation que les Polonais appellent les trois villes, comprenant la station balnéaire de Sopot (et encore la petite ville historique d’Oliwa). Cette conurbation littorale s’allonge au fond du golfe sur plus de 30 km, les localités étant reliées par une route et une voie ferrée électrifiée. Le chiffre total de population dépasse le demi-million d’habitants. Ceux-ci, après le départ des Allemands de Gdańsk, sont originaires du centre de la Pologne ou des régions annexées par l’U. R. S. S. après la guerre. Ils appartiennent à des classes d’âge relativement jeunes et représentent une main-d’œuvre qualifiée.

La fonction industrielle s’est développée autour de l’activité du port : menuiseries et fabriques d’ameublement, papeteries et fabriques d’allumettes, usines de matières grasses et conserveries. La ville a gardé ou restauré des industries de luxe, issues d’un vieil artisanat lié à la richesse de la population au xviie s., ainsi l’orfèvrerie et l’horlogerie. La vocation intellectuelle est également liée aux techniques navales. La ville est le centre d’un institut de recherches maritimes, d’une école polytechnique. Elle est considérée comme une ville d’avant-garde en Pologne dans les domaines de la littérature et du théâtre. Enfin, la villégiature et le tourisme se sont considérablement développés avec l’aménagement des plages de Sopot et de la pointe de Hel, l’organisation de croisières dans la baie, sur la « côte de l’ambre » à l’est de la Vistule, et le développement des sports nautiques.

Gdańsk comprend trois villes. Le centre historique est situé à 5 km du littoral, le long du fleuve Motława ; il comprend la « Vieille Ville » au nord, la « Ville principale » au centre, le « Vieux Faubourg » au sud. Ces quartiers renferment les principaux monuments historiques : de nombreuses églises gothiques et Renaissance, le beffroi, l’hôtel de ville et des installations liées à l’ancien port (l’arsenal, les greniers à blé).

À l’est, le long du bras occidental de la Vistule appelé la Vistule morte et sur le littoral, se localisent les chantiers navals et les quais du port moderne, avec les principales industries. Enfin, à l’intérieur des terres, sur les premières collines d’origine morainique couvertes de forêts, se sont développés un quartier commercial et administratif, Wrzeszcz, et de nouveaux ensembles résidentiels pourvus d’équipements collectifs, séparés par des parcs de récréation. Dans l’arrière-pays, la région des lacs de Kachoubie constitue l’un des sites de villégiature les plus fréquentés de Pologne.

L’avenir du port est conditionné par l’aménagement d’installations permettant dès 1975 l’arrivée de pétroliers de plus de 100 000 t et la construction par la société British Petroleum d’une raffinerie littorale.

A. B.