Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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francophones (littératures) (suite)

Georges Schéhadé

(Beyrouth 1910). Il a débuté par des poèmes. L’humour de ses premières œuvres théâtrales, Monsieur Bobb’le (1951), la Soirée des proverbes (1954), se voulait irrationnel et provocant. Mais, comme celui d’Ionesco, il a très vite recouvert des préoccupations plus profondes : l’Histoire de Vasco (1956) parodie la guerre et le militarisme, les Violettes (1960) dénoncent l’angoisse de l’ère atomique.


Littérature francophone d’Indochine

La présence française en Indochine a duré assez longtemps pour donner naissance à une littérature. Tandis que la langue vietnamienne, cessant de s’écrire en idéogrammes, abandonnait ainsi l’imitation servile des classiques chinois pour devenir à la fois plus populaire et plus ouverte, des écrivains tentaient en français d’exprimer le débat de l’Orient et de l’Occident. Pham Quynh (1892-1945), au Viêt-nam, publia en 1938 le premier volume de ses Essais franco-annamites ; au Cambodge, l’Eurasienne Makhali Phal (de son vrai nom Pierrette Guesde) donnait en 1940 son premier roman, la Favorite de dix ans, qui décrivait le cheminement d’une âme d’enfant entre le brahmanisme, le bouddhisme et le christianisme, et sa déception devant l’indifférence religieuse du monde occidental. Il n’y a pas toutefois d’école proprement dite : des romanciers, Tran Van Tung, Nguyen Tien Lang, le Cambodgien Pierre Loch Mach trouveront une ample matière dans les bouleversements de leur pays ; le plus abondant, Pham Van Ky, généralisera, en choisissant son sujet dans l’occidentalisation du Japon (Perdre la demeure, 1961). Mais la plupart vivent et publient en France. La guerre, qui du Viêt-nam a gagné progressivement toute l’Indochine, ne favorise guère l’activité littéraire. Nul ne saurait conjecturer quand et sous quelle forme elle reprendra, ni quelles chances il peut subsister d’une production en notre langue.

A. V.

 E. Larocque Tinker, les Écrits de langue française en Louisiane au xixe siècle (Champion, 1932). / L. G. Damas, Poètes d’expression française (Éd. du Seuil, 1947). / L. S. Senghor, Anthologie de la nouvelle poésie nègre et malgache (P. U. F., 1948). / A. Viatte, Histoire littéraire de l’Amérique française (P. U. F., 1954) ; la Francophonie (Larousse, 1969) ; Anthologie littéraire de l’Amérique francophone (Nizet, 1972). / J. Moscatelli, Poètes en Égypte (Le Caire, 1955). / C. De Rauville, Anthologie de l’océan Indien (Tananarive, 1955). / G. Gouraige, Histoire de la littérature haïtienne (Port-au-Prince, 1960). / P. Pompilus et les frères de l’Instruction chrétienne, Manuel illustré d’histoire de la littérature haïtienne (Port-au-Prince, 1961). / S. Abou, le Bilinguisme arabe-français au Liban (P. U.F., 1962). / L. Kesteloot, Écrivains noirs de langue française : naissance d’une littérature (Institut de sociologie, Bruxelles, 1962 ; nouv. éd., 1965) ; Anthropologie négro-africaine (Gérard, Verviers, 1967). / R. Cornevin, le Théâtre en Afrique noire et à Madagascar (le Livre africain, 1970).

Franklin (Benjamin)

Philosophe, physicien, et homme d’État américain (Boston 1706 - Philadelphie 1790).


Benjamin Franklin entre très jeune au service de son frère, James, qui dirige une imprimerie et publie un journal, le New England Courant. Il apprend alors le métier d’imprimeur et s’initie à l’activité littéraire. Puis, brouillé avec James, il va s’installer à Philadelphie. La ville est alors un centre en pleine expansion, grâce au développement agricole et aux manufactures de l’arrière-pays. Franklin devient, en 1730, propriétaire de The Pennsylvania Gazette ; il en fait un des journaux les plus influents des colonies. En même temps, il édite un almanach, dans lequel il prête sa plume au bonhomme Richard (Poor Richard) ; les adages, les maximes, les conseils de ce personnage imaginaire s’inspirent en partie des moralistes européens, comme La Rochefoucauld, et résument la pensée morale des Américains du xviiie s. Ayant acquis une honnête aisance, Franklin décide en 1748 de prendre sa retraite pour se consacrer aux travaux de l’esprit.

Déjà, en 1727, il avait fondé avec des amis un club, la Junte, où l’on conversait sur des sujets littéraires et scientifiques ; en 1743, ce club devient la Société philosophique américaine. En 1731, par passion de la lecture, Franklin crée la première bibliothèque par abonnement. Vingt ans plus tard, il met sur pied une institution d’enseignement qui deviendra l’université de Pennsylvanie. Lui-même écrit beaucoup.

Deux de ses œuvres sont particulièrement célèbres. La Science du bonhomme Richard, parue en 1757, est traduite dans toutes les langues européennes (y compris le catalan et le gaélique) et en chinois ; le livre sera édité plus de quatre cents fois. L’Autobiographie, commencée en 1771, restera inachevée ; c’est, dans la littérature américaine, le premier récit autobiographique d’un self-made man. À côté de ces deux ouvrages, que d’essais, de dialogues, d’œuvrettes et de « bagatelles » ! Rien de ce qui est humain ne laisse Franklin indifférent.

Ses contemporains voient aussi dans Franklin « le Newton de l’électricité ». En collaboration avec des savants français, il démontre en 1752 la similitude de l’électricité contenue dans les nuages avec celle qu’il a fabriquée. Turgot dira de lui qu’en inventant le paratonnerre « il arracha l’éclair au ciel ». En outre, il se montre ingénieux technicien, soucieux d’applications pratiques ; il améliore le fonctionnement des cheminées et invente les verres à double foyer. Pour rendre service à ses concitoyens, il propose la création de la première compagnie de pompiers et l’organisation de la police des rues. Mais là encore, sa curiosité est toujours en éveil : les méthodes agricoles, la vie des animaux, les prévisions météorologiques, les hôpitaux, l’exploration de l’Arctique, le problème indien sont pour lui autant de sujets de réflexion. Philosophe de la nature, inventeur de gadgets, autodidacte, Franklin reçoit le titre de docteur de plusieurs universités américaines, puis d’Oxford et de Saint Andrews.