Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
E

énergie (suite)

À court terme également, la répartition des réserves accessibles d’uranium n’est pas un facteur négligeable dans les perspectives de croissance et de développement. On connaît mal les réserves de l’U. R. S. S. et des pays de l’Est. On ne sait trop comment évaluer celles de l’Australie, où les découvertes se poursuivent. Pour le Canada, on parle de 360 000 t d’uranium métal ; pour l’Afrique du Sud, de 280 000 t ; pour les États-Unis, de 200 000 t. En France, les réserves utilisables sont estimées à 50 000 t.

Il est difficile de faire des projections dans un domaine en pleine évolution. En fonction des prix de revient, des tensions politiques aussi sur les marchés des autres sources d’énergie, on peut assister à des modifications rapides en ce qui concerne le rythme de construction des centrales. On estime généralement que la part de l’énergie nucléaire sera supérieure à 10 p. 100 de la production énergétique globale à la fin du siècle.

Les conditions de développement de la nouvelle source d’énergie sont très différentes de celles du charbon ou du pétrole. Les difficultés techniques au départ sont telles qu’il n’était pas possible aux entreprises privées de faire les investissements nécessaires. L’effort de recherche fondamentale a été presque partout à la charge exclusive des États. La part qui est faite ensuite à l’industrie privée varie selon les pays et les systèmes économiques, mais, jusqu’à présent, le contrôle de l’État demeure plus important que dans le domaine de la production pétrolière, par exemple. Depuis deux ou trois ans, les choses commencent à se transformer : on semble sortir de la période pionnière, et de grandes sociétés américaines sont prêtes à fournir des équipements dont elles garantissent, grâce à leur expérience, l’efficacité. Cela peut, dans un avenir proche, créer, à côté des groupes nationaux, des groupes internationaux dont l’action risque d’échapper aux gouvernements des pays dans lesquels ils s’implantent.


Les problèmes actuels de l’énergie dans le monde

Au début du siècle, la production et la consommation d’énergie dans le monde étaient extrêmement inégales selon les régions, et les échanges à longue distance demeuraient assez faibles. Cela tenait à la prépondérance, dans la fourniture d’énergie, du charbon : ses réserves sont très inégalement réparties, et les prix de son transport élevés, sauf par mer. Au total, tout semblait condamner les pays sans charbon à la stagnation économique. Seules des nations comme la Chine pouvaient espérer voir se développer un jour leur puissance industrielle.

Aujourd’hui, la situation est tout à fait différente. Les dotations énergétiques paraissent moins inégales qu’elles ne l’étaient autrefois. Les pays tempérés de l’hémisphère Nord disposent d’une part disproportionnée des réserves de charbon. Ils peuvent également utiliser les cours d’eau rapides qui existent dans les régions qui ont été englacées. Les réserves pétrolières sont par contre plus rares, particulièrement en Europe.

Les zones arides de l’Ancien Monde recèlent les gisements les plus riches pour le pétrole et le gaz naturel. Les plates-formes du monde tropical sont moins bien douées, mais, dans le cas de l’Afrique au moins, les ressources hydrauliques sont considérables. Dans le domaine des minerais utilisables pour la production nucléaire, leur situation est sans doute meilleure que ne le laissent supposer les données acquises actuellement.

Est-ce à dire que la situation soit plus satisfaisante qu’elle ne l’était il y a une cinquantaine d’années ? Non, et les chiffres cités plus haut sur les niveaux de consommation en font foi. Les progrès enregistrés dans les techniques de production ont permis aux nations les plus développées de faire face à leurs besoins croissants en recourant de plus en plus à des réserves situées en dehors de leur territoire. La part faite aux pays sous-développés ne s’est guère accrue, même si les niveaux absolus ont progressé, et parfois de manière rapide, en Amérique du Sud par exemple, et aujourd’hui au Moyen-Orient.

Le nombre des nations qui sont capables de satisfaire toute l’étendue de leurs besoins énergétiques s’est restreint. Cela tient à la multiplicité plus grande des formes d’utilisation : il ne s’agit pas, comme au début du siècle encore, de faire marcher des installations industrielles. Il faut approvisionner une multitude de moteurs dispersés et souvent mobiles. Le charbon ne convient plus, l’électricité assure la dispersion, mais pas la mobilité. Les produits pétroliers sont dans une large mesure irremplaçables.

La diversification des consommations a donc fait naître des besoins qui ne peuvent être satisfaits avec des ressources locales, même dans les pays où elles sont abondantes : l’Europe est très vite devenue une zone majeure d’importation pour l’ensemble des produits pétroliers.

L’évolution des prix de revient et des prix de transport n’a fait qu’accélérer ce glissement : l’extraction de la houille demande une main-d’œuvre abondante, si bien que les prix ont tendance à augmenter au fur et à mesure que la rémunération des ouvriers augmente. Pour les produits pétroliers, les progrès dans la prospection ont été tels que l’on n’a pas vu jouer, jusqu’à présent, la loi des rendements décroissants : quoique les réserves mises en valeur soient moins superficielles que les premières découvertes, les prix de revient ont eu tendance à diminuer ; sur le plan géographique, les gisements des pays désertiques du Moyen-Orient, négligés un temps parce que inaccessibles, se sont révélés particulièrement faciles à mettre en valeur ; sur le plan technique, les moyens de prospection ont fait de grands progrès ; le nombre de forages secs a diminué au point que les coûts n’ont pas augmenté trop vite avec la profondeur moyenne des réserves atteintes.

Les sources nouvelles d’énergie sont faciles à transporter. Elles nécessitent des investissements importants, mais dont la plus grande partie est constituée par les équipements mécaniques nécessaires au forage et à l’acheminement des productions. Lors même que les gisements se trouvent dans des zones sous-développées, leur mise en valeur n’offre pas de difficulté : il suffit d’une main-d’œuvre infime pour servir les matériels utilisés au moment de la prospection et, plus encore, pour assurer l’acheminement de la production une fois les installations en route.