Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
D

Dunkerque (suite)

Dunkerque est encore loin derrière ses voisins du Benelux (Anvers et Rotterdam). Les entrées (24,5 Mt) dépassent largement les sorties (5,4 Mt). Les hydrocarbures tiennent une place relativement modeste (10,6 Mt), et Dunkerque est le premier port français pour les « marchandises sèches » ; les pondéreux en vrac forment l’essentiel (minerais de fer surtout : 9 Mt ; charbon : 1,6 Mt ; céréales, oléagineux, textiles, bois, phosphates). Si les marchandises diverses tiennent peu de place et si la conteneurisation s’est développée lentement (deuxième portique seulement en 1970), le trafic roll-on/roll-off, en revanche, a toujours été très important.

L’augmentation du tonnage des navires est une des causes de la révolution actuelle du port : les profondeurs nécessaires aux gros tonnages sont très proches de la côte à Calais, mais s’en éloignent vers le nord. Le port est aujourd’hui accessible aux navires de 300 000 t grâce à un chenal de 2 km, subparallèle aux bancs. De plus, il se trouve à l’entrée même de cette mer du Nord où les profondeurs sont faibles et qui est la mer la plus fréquentée avec le plus grand ensemble portuaire du monde.

Dunkerque était au sud du delta du Rhin, de la Meuse et de l’Escaut (position géographique accentuée par la politique française). Son appartenance au « delta » était considérée en 1965 comme déplacée, mais, aujourd’hui, Dunkerque s’affirme comme une porte d’entrée naturellement privilégiée du « delta » et des pays de l’Europe du Nord-Ouest.

Le port joue la carte de l’industrialisation à une époque où une grande partie des implantations nouvelles s’installe en bordure de la mer. Les industries « traditionnelles » sont la construction navale (Ateliers et Chantiers de Dunkerque et Bordeaux), l’industrie métallurgique (usine des Dunes : pièces moulées), l’industrie alimentaire (huilerie Lesieur), le raffinage du pétrole (B. P. et C. F. R.), d’une capacité de 1,15 Mt.

L’extension des années 60 a commencé avec la construction de l’usine sidérurgique d’Usinor. En bordure du bassin maritime, Usinor reçoit de l’étranger ses minerais et son charbon. La production de 2,5 Mt d’acier en 1969 devait passer à 8 Mt en 1975. Depuis 1969, une grande cokerie traite des houilles importées. Usinor occupait 6 000 personnes en 1970. À côté se sont installées notamment une fabrique de tubes (Vallourec), une centrale électrique de 500 MW, refroidie à l’eau de mer et une deuxième raffinerie de pétrole (C. F. R.).

Dunkerque n’est pas « le » port de la région du Nord : les ports belges sont aussi proches, c’est vers eux que se dirigent les cours d’eau, et l’on estime qu’ils offrent parfois des avantages. De plus, Dunkerque est souvent considéré par les villes du Nord comme un adversaire (ses succès actuels ne diminuent pas cette rivalité). D’autre part, les infrastructures de liaison ont pris un retard à combler. Si le réseau ferré est bon, la liaison fluviale est portée seulement à 1 350 t (convois poussés de 3 600 t) jusqu’à Denain. Le retard autoroutier se comble, l’autoroute Dunkerque-Lille est achevée. Les mentalités ont changé : Dunkerque fait partie du « delta » : son foreland est exceptionnel. Il doit viser le ravitaillement de l’Europe du Nord-Ouest : déjà son minerai de fer arrive en Sarre ; il cherche maintenant, notamment, à alimenter en pétrole brut la Belgique et la Ruhr ; l’« utopie » des années 60 est devenue l’objectif des années 70. Chaque année voit s’améliorer rapidement les liens avec l’arrière-pays français et européen.

A. G.

➙ France (campagne de) [1940] / Nord (dép. du).

 A. de Saint-Léger, Un chapitre des relations entre la France et l’Angleterre. La question de Dunkerque et du canal de Mardyck à la fin du règne de Louis XIV, 1709-1715 (Tallandier, Lille, 1904). / L. Lemaire, Histoire de Dunkerque des origines à 1900 (Imprimerie du Nord maritime, Dunkerque, 1928). / A. Doumenc, Dunkerque et la campagne de Flandre (Arthaud, Grenoble, 1947). / A. Lepotier, Dunkerque (France-Empire, 1975).

Dunoyer de Segonzac (André)

Peintre français (Boussy-Saint-Antoine, Essonne, 1884 - Paris 1974).


Son père appartenait à une vieille famille originaire du Quercy. Sa mère était la petite-fille de Jean Charles Persil, garde des Sceaux au temps de Louis-Philippe et immortalisé par Daumier sous le sobriquet de « Père Scie ». Ses parents le destinaient à Saint-Cyr, mais il manifesta surtout des dons pour le dessin. On ne contraria pas sa vocation.

En 1901, André Dunoyer de Segonzac est élève à l’académie libre que dirige Luc Olivier Merson. Il échoue au concours d’entrée à l’École nationale supérieure des beaux-arts, entre à l’académie Julian, mais opte bientôt pour l’académie de la Palette, dont les professeurs sont Charles Guérin, Jacques Emile Blanche, Georges Desvallières, Charles Cottet, qui l’orientent vers le Salon d’automne, où il débutera en 1908. Il se lie d’amitié avec Jean-Louis Boussingault (1883-1943), et tous deux font atelier commun. Avec Luc Albert Moreau (1882-1948), ils forment un trio d’inséparables auquel viendront se joindre plusieurs artistes de leurs âge, partisans comme eux de s’exprimer en faisant abstraction des inquiétudes mentales de la génération montante. Ils résistent à l’influence de Guillaume Apollinaire et entendent se laisser aller à leur goût du naturel, à leur amour du réel tel qu’il se présente directement aux yeux. À cet égard, André Dunoyer de Segonzac n’a jamais changé de position.

En 1908, il fait la découverte des beautés de Saint-Tropez, qui va devenir un de ses points d’attache préférés. Il publie en 1909-10 ses dessins d’après les Ballets russes et les danses d’Isadora Duncan. Il voyage en Italie, en Sicile, en Espagne, en Afrique du Nord. Au Salon des artistes indépendants, en 1912, il est remarqué par Roger Marx et vend à Paul Poiret une toile importante (les Buveurs, 1910). En 1914, il fait, à trente ans, sa première exposition particulière, puis il est mobilisé. Après l’armistice, il s’installe à Chaville, où une serre désaffectée devient son atelier. En 1917, il expose à Paris ses dessins de guerre, d’après lesquels il illustrera, de Roland Dorgelès, les Croix de bois (1919) ; la même année, Jean Emile Laboureur (1877-1943) l’initie à la technique de l’eau-forte. En 1920, il expose à Paris et à Londres des paysages et des nus.