Dresde (suite)
Plus à l’est, l’autre ensemble, celui de la Place Neuve (Neumarkt), était dominé par l’église protestante Notre-Dame (Frauenkirche, 1726-1743), qui devait à l’architecte Georg Bähr ses masses sévères et son imposante coupole de pierre ; mais elle a été réduite par le bombardement à une ruine si informe que l’on doute de l’opportunité d’une restauration. Tout près, l’Albertinum, un ancien arsenal, abrite la riche collection de sculptures de la ville. D’autres palais, pour la plupart fort mutilés, complétaient le visage baroque de Dresde.
C’est à Dresde que s’est déroulée la part la plus importante de la carrière de l’architecte Gottfried Semper*. Bien qu’il parlât le langage de la Renaissance, il a répandu, par son enseignement, des idées fécondes sur le caractère des matériaux et sur leur usage. Son Opéra de Dresde (1837-1841, reconstruit en 1870-1878 après un premier incendie) a passé, surtout en ce qui concerne la salle, pour le plus remarquable théâtre de l’Allemagne.
Le pont Georgij-Dimitroff, à l’emplacement du vieux pont Auguste qui fut, jusqu’au xixe s., la seule communication entre la vieille ville et la nouvelle (située sur la rive droite de l’Elbe), a dans son axe, du côté de celle-ci, la statue de cuivre repoussé et doré d’Auguste le Fort sur un cheval cabré, dont le projet fut fait par le Français Jean Joseph Vinache. L’édifice le plus renommé de cette ville neuve est le « palais japonais » qu’Auguste le Fort fit transformer par le Français Zacharie Longuelune et par Pöppelmann. Il devait recevoir la très riche collection de porcelaines des Électeurs, d’où les singuliers Hermès asiatiques qui servent de supports. Des jardins, on jouit d’une vue plaisante sur la vieille ville, avec ses coupoles et ses flèches conservées en assez grand nombre.
La ville neuve se prolonge vers la lande de Dresde (Dresdner Heide) par la cité-jardin de Hellerau, édifiée à partir de 1909, qui a été un des laboratoires de l’architecture moderne en Allemagne. Y ont travaillé en particulier Hermann Muthesius et surtout Heinrich Tessenow, dont le « Festspielhaus » (1910-1912), dépourvu d’ornements, est un modèle de sobriété et de distinction élégante.
Le rêve d’Auguste le Fort aurait été sans doute de faire de l’Elbe une sorte de voie d’eau triomphale rappelant le Grand Canal de Venise. Sur la rive droite du fleuve, à Pillnitz, il fit construire par Pöppelmann les deux pavillons de sa résidence d’été, dont l’inférieur touche littéralement l’eau. C’est encore une fantaisie à la chinoise, avec des toits dont les extrémités se rebroussent.
P. D. C.