Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
D

Dostoïevski (Fedor Mikhaïlovitch) (suite)

Dostoïevski s’est perdu dans le labyrinthe obscur de ses contradictions, mais sa vie est une trajectoire unique sur le chemin de la souffrance. Il a engendré des démons, des fous, des illuminés ; mais sa pensée est restée vigoureuse et saine. Il a oscillé toute sa vie entre l’acceptation et le refus de Dieu, mais il a poursuivi sa méditation, agenouillé. Et la vraie foi n’est-elle pas celle-là seule qui peut assumer le doute, l’obscurité et la révolte ?

Comment les marxistes lisent Dostoïevski

Interdit pendant plus de trente ans en Union soviétique, Dostoïevski est aujourd’hui réhabilité et reconquiert la Russie. Depuis les derniers mois de 1955, ses œuvres complètes ont subitement réapparu sur le marché, en éditions populaires à gros tirages — les Soviétiques revendiquent son œuvre comme l’expression d’une « révolte contre le monde capitaliste ».

Comment les marxistes lisent-ils Dostoïevski ? « Objectivement », les romans décrivent la situation tragique de l’homme dans l’univers capitaliste de la Russie tsariste, acculé au désespoir, au crime ou au suicide, par la corruption des classes possédantes. « Subjectivement », Dostoïevski considère cette situation comme sans issue, ou, plus précisément, l’issue chrétienne qu’il propose est contraire au processus historique : il a vu dans l’Église orthodoxe « l’alliance vitale des moines et du peuple de Dieu », l’incarnation de la cité de Dieu, et il a commis l’« erreur tragique » de condamner la révolution, influencé sans doute par ses quatre années de bagne, qui le coupèrent des forces vives de la nation.

Les marxistes acceptent donc la vérité objective de l’œuvre et répudient les idées subjectives de l’auteur.

S. M.-B.

 A. Suarès, Trois Hommes : Pascal, Ibsen, Dostoïevski (Gallimard, 1913 ; nouv. éd., 1968). / E. Thurneyssen, Dostoïevski (Zurich, 1921 ; trad. fr. Dostoïevski ou les Confins de l’homme. Éd. « Je sers », 1934). / S. Zweig, Drei Meister : Balzac, Dickens, Dostoïevski (Leipzig, 1921 ; trad. fr. Trois Maîtres : Balzac, Dickens, Dostoïevski, Grasset, 1949). / N. Berdiaeff, l’Esprit de Dostoïevski (en russe, Prague, 1923 ; trad. fr., Stock, 1945). / A. Gide, Dostoïevski (Plon, 1923 ; nouv. éd., Gallimard, 1964). / M. M. Bakhtine, la Poétique de Dostoïevski (en russe, Moscou, 1929 ; 2e éd., 1963 ; trad. fr. Éd. du Seuil, 1970). / R. Guardini, Der Mensch und die Glaube (Leipzig, 1933 ; trad. fr. l’Univers religieux de Dostoïevski, Éd. du Seuil, 1947). / J. Madaule, le Christianisme de Dostoïevski (Bloud et Gay, 1939) ; Dostoïevski (Éd. universitaires, 1956). / H. Troyat, Dostoïevski (Fayard, 1940 ; nouv. éd., 1960). / H. de Lubac, le Drame de l’humanisme athée (Spes, 1946). / K. V. Motchoulski, Dostoïevski, l’homme et l’œuvre (en russe, Ymca Press, 1947 ; trad. fr., Payot, 1962). / D. Arban, Dostoïevski le coupable (Julliard, 1953) ; Dostoïevski par lui-même (Éd. du Seuil, coll. « Microcosme », 1962). / M. L. Slonin, les Trois Amours de Dostoïevski (Corrêa, 1955). / R. Athanassiadis, la Vie passionnée de Dostoïevski (l’Intercontinentale du livre, 1957). / N. Gourfinkel, Dostoïevski, notre contemporain (Calmann-Lévy, 1961). / D. Barlesi, la Vision sociale de Pétersbourg chez Dostoïevski, des « Pauvres Gens » à « Crime et Châtiment » (la Pensée universitaire, Aix-en-Provence, 1962). / P. Evdokimov, Gogol et Dostoïevski (Desclée De Brouwer, 1962). / R. Girard, Dostoïevski, du double à l’unité (Plon, 1963). / E. Sturm, Conscience et impuissance chez Dostoïevski et Camus (Nizet, 1967). / L. P. Grossman, Dostoïevski (trad. du russe, Moscou, 1970). / P. Pascal, Dostoïevski, sa vie, son œuvre (l’Âge d’homme, Lausanne, 1970). / A. Kimov, Dostoïevski (Seghers, 1971). / Dostoïevski vivant. Témoignages (Gallimard, 1972). / J. Catteau (sous la dir. de), Dostoïevski (l’Herne, 1974). / Album Dostoïevski (Gallimard, 1975).

Douai

Ch.-l. d’arrond. du Nord ; 47 570 hab. (Douaisiens). [L’agglomération compte plus de 200 000 hab.]



La ville

Le centre de la ville, à l’intérieur des limites d’une ancienne enceinte du xie s., a un bel aspect urbain, riche en monuments ; la grande artère commerçante (rues de Paris, de Bellain, Saint-Jacques) perpétue l’axe primitif de la ville, orienté nord-sud et qui montre le rôle de contact. La ville est bâtie au contact des terrains crayeux du Bassin parisien et des sables et argiles du bassin de la mer du Nord. C’est le site classique de toutes les villes de la région du Nord. De plus, un changement de régime de la Scarpe y localisa un portus.

Douai était, dès le xe s., une importante ville drapante, mais l’espace enclos par la deuxième enceinte (xiie-xve s., actuellement première couronne de boulevards périphériques) resta longtemps en partie inoccupé. En effet, à la fin du xiiie s., Lille l’emporta sur Douai, où, malgré l’éclat de la tapisserie et de la faïence, l’industrie déclina tandis que se développaient les fonctions commerciales (grains), administratives (parlement), intellectuelles (peinture avec J. Bellegambe ; université créée en 1563) ou militaires. La ville en est encore fortement marquée dans ses fonctions et dans son paysage.

Dans la seconde moitié du xixe s., le charbon provoqua un nouvel essor industriel, marquant la banlieue est (Waziers, Sin-le-Noble). La voie ferrée à l’est et le canal à l’ouest forment deux axes nord-sud le long desquels s’est développée l’industrie ; une banlieue résidentielle se développe en direction du nord-ouest, de l’ouest et du sud-ouest.

Le secteur secondaire occupe 60 p. 100 des actifs de l’agglomération. Les Houillères du Nord et du Pas-de-Calais (qui ont leur siège central à Douai) occupent à elles seules un quart des actifs ; elles sont accompagnées de carbochimie (Grande-Paroisse). Mais Douai n’est pas une ville mono-industrielle. À côté des brasseries, d’industries du papier et carton, la métallurgie est bien représentée : Arbel (2 000 emplois, matériel ferroviaire et gros emboutissage), Ressorts du Nord. À proximité, Auby et Noyelles-Godault produisent la plus grande partie du plomb et du zinc français. Toutes ces industries sont en expansion.