Courier (Paul-Louis) (suite)
Ce mal aimé — il mourra assassiné par son garde-chasse, un rival — n’a alors rien d’un ermite campagnard : avec une allégresse mordante, il s’emploie, dans plusieurs libelles, à défendre les droits des paysans, qu’on empêche notamment de danser, tout en gardant l’illusion d’être l’un des leurs. Espoir déçu. Du moins Paris, que tout amuse, s’arrache ses lettres et pamphlets — une vingtaine en tout —, qui valent à leur auteur une série de procès politiques retentissants. Courier n’est pas mécontent de tout ce tapage : sa plume alerte et malicieuse a su trouver le mot qui fait mouche. Les rieurs sont de son côté, mais qu’on ne s’y trompe pas : les attaques contre le gouvernement et l’Église portent plus sur l’extérieur des choses que sur les principes. Elles restent superficielles. Le pamphlétaire n’est pas Voltaire : les brûlots qu’il lance se rapprochent des chansons de Béranger, le talent en plus. L’esprit, chez lui, s’attache aux petits faits. Ce qui sauve aujourd’hui cet écrivain de bonne compagnie, c’est l’ironie toute socratique, la vivacité du trait, la naïveté feinte, le style volontairement archaïque. Il a peu écrit, mais ce peu est parfait et on lit toujours sa traduction de Daphnis et Chloé.
A. M.-B.
A. Lelarge, P. L. Courier (P. U. F., 1925). / P. Arbelet, Trois Solitaires : Courier, Stendhal, Mérimée (Gallimard, 1934). / L. Desternes, Paul-Louis Courier et les Bourbons (Éd. des « Cahiers bourbonnais », Moulins, 1962). / Numéro spécial de Europe, Paul-Louis Courier (1966).