Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

courants porteurs (procédé de transmission par) (suite)

Dans une première génération de réalisation, les circuits à grande distance étaient constitués par des paires symétriques. Le développement du trafic entraîna la constitution d’artères de capacité de plus en plus forte (plusieurs centaines de paires, donc de circuits). Dans une deuxième génération, on put limiter le nombre de paires en développant les techniques dites « à courants porteurs », permettant de transmettre simultanément plusieurs communications différentes sur la même paire, augmentant ainsi considérablement le rendement des artères. L’ensemble des signaux transmis ainsi sur une même paire constitue un signal multiplex, obtenu par le moyen de la transposition.


Transposition des signaux électriques

Si, dans un dispositif électrique approprié, on « mélange » deux signaux électriques de fréquence F et f, on obtient à la sortie de l’équipement les produits du mélange qui sont des signaux électriques de fréquence | mF + n f |, m et n étant des entiers quelconques positifs, négatifs ou nuls. Des dispositions techniques particulières et l’usage de filtres électriques permettent d’isoler certaines fréquences, entre autres les fréquences :
F – f(m = + 1, n = – 1) ;
F(m = + 1, n = 0),
F + f(m = + 1, n = + 1).
La fréquence F prend le nom de fréquence porteuse, et les fréquences F ∓ f celui de fréquences latérales. La sélection peut même se limiter au seul signal F + f ou F – f. L’équipement permettant de telles opérations électriques s’appelle un modulateur. Transmis en ligne, le signal F + f, par exemple, peut, après mise en œuvre à la réception, restituer le signal f. Il suffit pour cela que l’on mélange à la réception le signal F + f à un signal local de fréquence F. L’application des mêmes principes permet d’obtenir les produits de démodulation :
m′ F + n′ (F + f).
En isolant l’un des signaux, par exemple f(m′ = – 1, n′ = + 1), on restitue le signal f après l’avoir fait « porter » par la fréquence F.


Constitution des ensembles multiplex

L’ensemble des signaux électriques représentant valablement la gamme naturelle des fréquences vocales significatives constitue un spectre de fréquence qui s’étale de la fréquence minimale 300 Hz à la fréquence maximale 3 400 Hz. Si, dans un modulateur, on mélange un signal de fréquence F non plus avec un signal de fréquence f, mais avec l’ensemble 300/3 400 Hz du spectre vocal, on obtient à la sortie de l’appareil, et après filtrage, l’ensemble des fréquences s’étalant de F + 300 Hz à F + 3 400 Hz, pour la bande supérieure, ou de F – 3 400 Hz à F – 300 Hz, pour la bande inférieure. Le spectre aura toujours pour largeur 3 100 Hz, mais sera transposé de F Hz. À la réception, on pourra, par démodulation, retrouver le spectre de base. En quelque sorte, la voie téléphonique de base sera « portée » par la fréquence F. Si on choisit correctement F, on pourra transmettre sur la même ligne à la fois la bande de base d’une communication téléphonique et la bande transposée d’une seconde communication. Il est dès lors possible de remplir l’espace des fréquences, par des modulations appropriées, en « juxtaposant » de nombreuses voies téléphoniques différentes et en les transmettant simultanément sur le même conducteur. Pour des raisons économiques et technologiques, et pour rendre électriquement possibles les filtrages, on est amené à grouper tout d’abord les voies téléphoniques par paquets de 12 avec 12 modulations primaires. Un tel paquet s’appelle un groupe primaire. Ensuite, les groupes primaires sont transposés en bloc par une modulation dite « secondaire » jusqu’à former 5 fois 12 voies ; c’est le groupe secondaire. Enfin un troisième groupement de 5 groupes secondaires de 60 voies permet de former le groupe tertiaire de 300 voies. On peut également former directement un multiplex par superposition de 16 groupes secondaires, soit 960 voies, appelé groupe général. La superposition de nombreuses voies téléphoniques entraîne l’utilisation des lignes à des fréquences de plus en plus élevées, et la paire symétrique doit céder la place au câble coaxial ou aux faisceaux hertziens et entraîner, dans le premier cas, la mise en place d’amplificateurs intermédiaires dits « amplificateurs de ligne » de plus en plus nombreux et rapprochés. Le développement des techniques du transistor a permis de réduire considérablement le volume des équipements et de porter à 2 700 le nombre de voies téléphoniques transmises sur une même paire coaxiale ; la fréquence maximale est dans ce cas de 12,5 MHz.

G. D.

➙ Câble / Faisceau hertzien / Télécommunications / Téléphonie.

Courbet (Gustave)

Peintre français (Ornans 1819 - La Tour-de-Peilz, Suisse, 1877).


Jean Désiré Gustave Courbet a sa légende, dont il ne faut être qu’à moitié complice. Le réaliste, l’« apôtre du laid », le tombeur de la colonne Vendôme ne sont qu’un des profils d’une nature aussi riche que contradictoire. « Sans idéal ni religion », proclamait-il, mais, avant tout, peintre. Au publiciste Francis Wey, il déclare : « Je peins comme un dieu », et cet orgueil, souvent moqué, manifeste dans son goût presque narcissique de l’autoportrait, est celui d’un homme à l’extraordinaire métier, dont les ambitions, même confuses, sont toujours sauvées par la réussite picturale.

La part, chez Courbet, de l’atavisme familial et géographique est évidente. Le père, mi-hobereau, mi-paysan, un « cudot », synonyme franc-comtois de « chimérique », le grand-père maternel, fidèle aux principes de 1789, la mère, prudente et avisée, expliquent beaucoup de la psychologie complexe du peintre. Quant à Ornans et à la vallée de la Loue, le peintre y trouvera une source continue d’inspiration.

Sa vocation s’affirme très tôt. Après des études quelconques au petit séminaire d’Ornans, puis à Besançon où il s’initie à la peinture et pratique la lithographie, il va à Paris, en 1840, pour faire son droit, en vérité pour peindre. Ses débuts sont obscurs ; on sait qu’il fréquente plusieurs ateliers en élève libre. Mais, s’il échappe au cursus académique, on ne doit assurément pas sous-estimer la formation et la culture du jeune Courbet. Les œuvres des années 1840-1848, que l’on peut qualifier par leur sujet (Guitarrero, 1845, coll. priv.) ou par leur manière (l’Homme à la pipe, 1846, musée de Montpellier) de romantiques, surprennent par la qualité immédiate du métier, la complexité des influences : italiens, de Venise à Naples, espagnols, nordiques sont les modèles auxquels le peintre se réfère. Dans Courbet au chien noir (1842, Petit Palais, Paris), l’autorité de la mise en page, l’élégance du contour enfermant l’animal et son maître, la simplicité de l’effet de clair-obscur, la clarté enfin du paysage sont d’un peintre savant qui rend autant d’hommages à Bellini, Titien et même Bronzino. Avec un arsenal narratif réduit à l’extrême, les Amants dans la campagne (versions au Petit Palais et à Lyon) sont d’un lyrisme sans fadeur, immédiatement populaire.