Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

Aix-en-Provence

Ch.-l. d’arrond. des Bouches-du-Rhône ; 114 014 hab. (Aixois).


À une trentaine de kilomètres de Marseille, Aix peut apparaître comme un satellite de la métropole méditerranéenne, aux activités essentiellement administratives et culturelles. Mais l’ancienne capitale de la Provence possède cependant une personnalité indéniable par son capital architectural et son dynamisme actuel, qui lui octroient une place de choix dans le réseau urbain du Midi méditerranéen.


Situation et site

La ville bénéficie d’une situation favorable en bordure de l’Arc, dont la vallée ménage un passage vers l’est, lequel, prolongement naturel du couloir de l’Argens, fut très tôt utilisé par les voies de communication. Le bassin d’Aix présente tous les avantages d’une zone déprimée, autorisant un accès facile vers Salon et La Crau au nord-ouest, l’étang de Berre à l’ouest, Marseille au sud. Les courants d’échanges fort anciens entre les deux péninsules méditerranéennes, Espagne et Italie, ont valorisé le carrefour. Si les grands axes ferroviaires délaissent Aix, la ville bénéficie du passage de la R. N. 7 (de Paris en Italie par la Côte d’Azur), de la R. N. 96 (de Toulon à Sisteron), de la R. N. 8 (vers Marseille). Toute la valeur du passage et l’intensité des échanges apparaissent bien lors des pointes estivales qui drainent vers les secteurs touristiques de l’Est et de l’Italie des flots ininterrompus de véhicules, ce qui pose des problèmes redoutables sur le plan de la circulation urbaine.

Le site profite de la proximité de crêtes calcaires dépouillées de toute végétation, à l’exception de bosquets de pins épargnés par l’homme. Le cloisonnement du paysage, la présence de compartiments naturels à l’échelle humaine constituent un des charmes de la campagne et composent autant de paysages « cézanniens ». Au nord, la cuesta calcaire qui a facilité l’implantation de l’oppidum d’Entremont domine la ville d’une centaine de mètres. Avant de gagner la vallée de l’Arc vers le sud-est, au pied de l’escarpement du Cengle, la R. N. 7 dévale rapidement sur la ville, jalonnée d’une série de maisons individuelles qui montrent l’extension actuelle.

R. D. et R. F.


L’histoire

La ville d’Aix fut fondée en tant que poste romain, en 123 av. J.-C., par le consul Sextius Calvinus, à peu de distance de l’ancien oppidum d’Entremont, capitale de la peuplade des Salyens (ou Salluvii), qu’il venait de vaincre et qui avaient été les maîtres de la plaine entre Rhône et Durance. C’était le premier établissement romain en Gaule, d’ailleurs un simple lieu de garnison. À son rôle de point stratégique et de nœud routier, s’ajoutait l’intérêt de sources thermales encore exploitées, qui lui valurent son nom : Aquae Sextiae, les eaux de Sextius.

En 102 av. J.-C., à la bataille d’Aix, qui se déroula en réalité à Pourrières, à 30 kilomètres, dans la vallée de l’Arc, Marius décima une impressionnante horde de Teutons : la population garda durant des siècles le souvenir de ce carnage.

Devenu colonie sous César et Auguste, Aix s’enrichit des édifices de la grandeur romaine : aqueducs (vestiges près de Meyrargues et à Saint-Antonin-sur-Bayon), amphithéâtre, thermes, temple d’Auguste, remparts. Le culte de Priape avait la faveur de la ville, que Sidoine Apollinaire comparait à Baïes pour son charme. La période antique s’acheva par le passage des Wisigoths (477), suivis d’autres barbares, et par les dévastations des Arabes (731). C’est en 796 seulement que l’on entreprit de réparer les remparts et les principaux monuments. La ville avait alors acquis une indépendance de fait.

Au ixe s., Aix devint la capitale du comté de Provence et, au xiiie s., un foyer littéraire : les comtes de Provence s’y entouraient de troubadours et y tenaient des « cours d’amour ». À la même époque (1206-1290), Aix obtint des privilèges municipaux. On distinguait alors la ville comtale, qui entourait le palais (quartier actuel des Bagniers), et la ville des tours, ou cité archiépiscopale, qui devait tirer son nom de ses fortifications médiévales : cette dernière partie d’Aix n’a pas survécu à la peste noire de 1348 et aux ravages d’Arnaud de Cervole. De 1471 à 1480 s’installa à Aix le plus célèbre des comtes de Provence, le roi René d’Anjou : il attira à sa cour les peintres italiens et flamands, instaura les jeux de la Fête-Dieu, mascarade originale avec chevaux de carton qui fut de tradition jusqu’à la Révolution.

Après la mort du roi René, Aix fut, avec le comté de Provence, rattaché au domaine royal (1487). Une fois passés les fléaux du xvie s. — prise de la ville par les Impériaux en 1524, conflits religieux et massacres de Réformés de 1540 à 1580 —, la ville fut transformée par la création dans ses murs du parlement de Provence (1501) et par l’installation de riches parlementaires imbus de leur dignité, bâtisseurs de somptueux hôtels alliant la dignité classique à une certaine emphase provinciale, défenseurs ardents des privilèges et du particularisme local (la ville ne s’était pas résignée à ne plus être une capitale).

Une tentative de Richelieu pour transférer à Marseille la chambre des comptes déclencha la révolte populaire des Cascaveous (1630) ; les troubles se poursuivirent sous la Fronde. Au xviiie s., toute l’histoire de la ville tient dans les querelles de son parlement. La Révolution entraîna, avec sa disparition, celle de l’aristocratie qui détenait la richesse. Au xixe s., la prospérité de Marseille contrasta avec le déclin d’Aix, dont l’activité commerciale se limita à la vente des produits régionaux (huiles, fruits secs, vins).

R. H.


Le peuplement

La population est restée longtemps à l’aise à l’intérieur du périmètre délimité par les boulevards circulaires, qui traduisent dans le plan d’ensemble la pérennité de l’enceinte démolie il y a seulement un siècle. La partie ancienne de la ville a conservé son caractère d’élégance sobre, mais sans nulle froideur, hérité du xviiie s. Le cours Mirabeau partage la cité en deux secteurs selon un axe est-ouest ; il regroupe les cafés et magasins qui contribuent à son animation et égrène les façades aristocratiques de ses vieux hôtels. L’essentiel du patrimoine historique de la ville se localise au nord du cours : les musées, la cathédrale Saint-Sauveur et son cloître, la bibliothèque Méjanes à l’hôtel de ville. Ces bâtiments, qui contribuent largement au charme de la ville, voisinent avec des immeubles qui regroupent une masse importante de population : ici apparaissent les densités de population les plus élevées, au-dessus de 250 habitants à l’hectare. Au sud du cours Mirabeau, la pression démographique est moins nette, les densités varient de 100 à 250 habitants à l’hectare selon les îlots. Autour du vieux centre historique, dans un premier temps, seules quelques bâtisses se sont établies en fonction des principales voies d’accès ; peu à peu, une ceinture d’habitations en ordre lâche s’est mise en place au-delà de l’enceinte, vers la gare. Celle-ci, d’abord pôle d’attraction pour l’urbanisation, est vite devenue une gêne dans le tissu urbain. À la veille de la Seconde Guerre mondiale apparaissent les premiers lotissements, des pavillons individuels assez proches du centre, dans la banlieue immédiate susceptible d’offrir des relations aisées, mais ne présentant que trop rarement les équipements collectifs nécessaires à la vie des nouveaux quartiers. Ainsi se meuble peu à peu la campagne aixoise sans idée directrice bien définie.