Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

Catherine de Médicis (suite)

Aussi Catherine revient-elle à sa politique de paix, elle proclame l’édit d’Amboise (19 mars 1563), qui accorde aux protestants la liberté de conscience et réglemente le culte public, puis elle réconcilie les adversaires, Condé et Montmorency, qui vont reprendre Le Havre aux Anglais. Au service de cette tâche de pacification et de réconciliation. Catherine mettra une persévérance inlassable.

De 1564 à 1566, elle entreprend un long voyage à travers la France par Lyon, la Provence, le Languedoc et Bordeaux, dans le dessein de montrer le jeune roi Charles IX au royaume et de revivifier la foi monarchique des populations. Durant ce voyage, elle réforme, elle ordonne, elle rend la justice ; surtout elle prend contact avec les forces vives du pays.

À son retour, en 1567, les troubles reprennent lorsque Condé et Coligny. pour mettre la légitimité de leur côté, essaient d’enlever le roi. C’est un échec. En mars 1568, la paix de Longjumeau rétablit exactement l’édit d’Amboise. Mécontente des protestants, Catherine commet l’erreur de renvoyer le chancelier Michel de L’Hospital. Se sentant menacés, les huguenots reprennent la lutte, soutenue par le cardinal de Lorraine, Birague et Tavannes. Catherine prend l’offensive en Poitou contre les huguenots, qui sont battus à Jarnac et à Moncontour (1569) par son fils préféré, le duc Henri d’Anjou.

Soucieuse de paix et d’équilibre, craignant les Guises, Catherine signe pourtant en août 1570 la paix de Saint-Germain, qui renouvelle, elle aussi, l’édit d’Amboise, mais avec une innovation qui va se révéler dangereuse : l’octroi aux protestants de quatre places de sûreté, La Rochelle, Montauban, La Charité et Cognac. À ce moment, Catherine semble se rapprocher des calvinistes, fait le projet de marier le duc d’Anjou à Elisabeth d’Angleterre et fait même entrer Coligny au conseil. On décide de l’union du roi de Navarre avec une sœur du roi, Marguerite de Valois, gage d’une politique d’entente entre protestants et catholiques.

Cependant, l’amiral de Coligny, qui est un mauvais diplomate, s’impose peu à peu au faible Charles IX (majeur depuis 1563) et veut dresser le fils contre la mère ; surtout, il persuade le roi d’un vaste projet militaire consistant à attaquer l’Espagne aux Pays-Bas avec l’appui anglais. Catherine, amie de la paix, incrédule quant au succès, sachant que le royaume est trop divisé intérieurement pour poursuivre une politique aussi aventureuse, prend peur, croit voir Philippe II vainqueur et ses enfants détrônés.

C’est pourquoi elle n’hésite pas à faire arquebuser Coligny par un tueur professionnel, le 22 août 1572, mais la victime n’est que blessée ; Charles IX menace, et Catherine, affolée, laisse les Guises organiser le massacre de la Saint-Barthélemy dans la nuit du 23 au 24 août. Ce crime est une grande faute politique : il ne résout pas le problème protestant, puisqu’une autre guerre éclate aussitôt ; de plus, le massacre fait basculer l’équilibre en faveur des Guises et du parti catholique. En 1573, la paix de La Rochelle, la quatrième en dix ans, maintient le « statu quo ».

Lorsque Charles IX meurt en 1574, Catherine rappelle de France l’ancien duc d’Anjou, qui a été élu roi de Pologne en 1573. Mais Henri III n’est pas Charles IX : il entend gouverner par lui-même, et Catherine commence à passer au second plan. Toutefois, elle va continuer sa mission de conciliatrice et de pacificatrice. Son dernier fils, François, le nouveau duc d’Anjou, ancien duc d’Alençon, est un brouillon sans envergure que les calvinistes mettent à leur tête. Catherine part à sa poursuite et le ramène à Paris ; elle signe au traité d’Etigny la « paix de Monsieur » (7 mai 1576), et octroie aux protestants l’édit de Beaulieu, qui leur accorde de grands avantages : la liberté de culte partout, sauf à Paris, et huit places de sûreté. Mais la réaction catholique ne se fait pas attendre. À Péronne, le 8 juin 1576, est créée la Ligue catholique. Les Guises en sont les chefs ; ils s’appuient sur le peuple de Paris et de nombreuses villes, et sont soutenus par l’Espagne. Mais Henri de Navarre se révolte de nouveau, et la vieille reine, infatigable, repart sur les routes et signe avec lui en février 1579 la paix de Nérac.

Ce voyage lui montre les passions religieuses des Français portées au paroxysme. Aussi, désormais, conjointement avec Henri III, va-t-elle s’efforcer avant tout de sauver le pouvoir royal. En 1584, la mort du duc François d’Anjou pose la question de la succession. Le roi n’ayant pas d’enfants, le trône revient au protestant Henri de Navarre. Devant cette menace, on assiste à une recrudescence de la Ligue. Les Guises, au traité de Joinville (31 déc. 1584), s’allient avec Philippe II et décident que la couronne reviendra au cardinal de Bourbon, oncle d’Henri de Navarre.

Débordé, Henri III, sur les conseils de sa mère, cède aux ligueurs et leur livre le pouvoir ; Catherine signe avec le cardinal de Bourbon le traité de Nemours (juill. 1585), qui le reconnaît héritier du trône. Mais elle ne renonce pas pour autant à voir son gendre succéder à son fils, et, l’année suivante, elle le supplie de quitter les calvinistes et de se convertir.

Cependant, la guerre civile se rallume. Le 20 octobre 1587, Henri de Navarre est vainqueur à Coutras. Lorsque le duc Henri de Guise pénètre à Paris contre l’avis du roi, Catherine essaie de s’interposer : voyant la partie perdue dans la capitale, à la suite de la journée des Barricades (12 mai 1588), elle conseille à Henri III de s’enfuir. Le roi se réfugie à Blois, où il convoque les états généraux, pendant lesquels il fait assassiner le duc Henri de Guise et son frère le cardinal de Lorraine. Catherine de Médicis ne joue aucun rôle dans les événements de Blois ; seulement, le 1er janvier 1589, elle fait relâcher le vieux cardinal de Bourbon, qui a été arrêté, et s’emploie à négocier avec lui. Elle meurt peu après.

P. R.

➙ France / Henri II / Religion (guerres de) / Valois.