Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
B

Bulgarie (suite)

Une notable partie de l’industrie de grande consommation se concentre à Sofia. Cette capitale assure le tiers de la valeur nationale de la production industrielle ; elle concentre plus de la moitié des étudiants et des cadres administratifs ; les investissements les plus importants dans le domaine de l’urbanisme et de l’équipement urbain lui ont été consacrés ; elle est le grand centre de redistribution des touristes, qui, avant de se diriger vers les plages, y séjournent volontiers ; enfin, par le trafic de son aéroport, par les facilités qu’elle offre à des réunions de caractère international, le rôle qu’elle joue dépasse le cadre de la Bulgarie.

A. B.

➙ Balkans / Comecon / Danube / Sofia.

 V. N. Zlatarski et N. Stanev, Geschichte der Bulgaren (trad. du bulgare, Leipzig, 1917-18 ; 2 vol.). / J. C. S. Runciman, A History of the First Bulgarian Empire (Londres, 1930). / L. Pastukhov, Histoire bulgare (en bulgare, Sofia, 1949 ; 2 vol.). / D. Kosev, Nouvelle Histoire de la Bulgarie (en russe, Moscou, 1952). / J. Kanapa, Bulgarie d’hier et d’aujourd’hui (Éd. sociales, 1953). / L. A. D. Dellin (sous la dir. de), Bulgaria (New York, 1957). / S. G. Evans, A Short History of Bulgaria (Londres, 1960). / La Bulgarie populaire a quinze ans (Sofia, 1960). / Histoire de la Bulgarie (en bulgare, Sofia, 1961-1964 ; 3 vol.). / M. Macdermott, A History of Bulgaria, 1393-1885 (Londres, 1962). / P. Paraf, Bulgarie (la Nef de Paris, 1962). / Y. Chataigneau (sous la dir. de), Visages de la Bulgarie (Seghers, 1968). / P. Y. Péchoux et M. Sivignon, les Balkans (P. U. F., coll. « Magellan », 1971). / A. Blanc, l’Europe socialiste (P. U. F., 1974).


La littérature bulgare

Les origines de la littérature bulgare, qui est la première littérature nationale d’expression slave, sont de peu postérieures à la conversion des Bulgares au christianisme (v. 685) et sont intimement liées à la christianisation de ce peuple. Pendant neuf siècles environ, la littérature conservera en Bulgarie ce caractère essentiellement religieux et didactique qui l’avait marquée dès ses débuts, et son évolution sera lente. Une deuxième période s’ouvrira pour elle au xviiie s. : c’est celle de la Renaissance bulgare (1762-1878), où, dans la Bulgarie encore asservie aux Turcs, la littérature devient une arme au service de la libération nationale. La constitution d’un État bulgare indépendant en 1878 marque l’avènement d’une troisième période.


La littérature ancienne de la Bulgarie

Les bases de la vieille littérature bulgare furent jetées par Cyrille et Méthode, apôtres des Slaves, et par leurs disciples, qui, chassés de Moravie par le clergé germanique après la mort de Méthode (885), furent recueillis en Bulgarie par le prince Boris. C’est à ce souverain avisé que revient le mérite d’avoir envoyé l’un de ces proscrits, Clément, dans la région d’Ohrid, où il fut le premier évêque de l’Église bulgare et où il se signala par une activité littéraire et apostolique telle que l’un de ses biographes a pu écrire qu’il fut « un second Paul s’adressant à de seconds Corinthiens, c’est-à-dire les Bulgares ». Les lettres atteignirent leur apogée sous le règne du tsar Siméon (893-927), qui fit de sa capitale Preslav, dans la Bulgarie orientale, un important foyer culturel. Si la littérature encouragée par Siméon manque souvent d’originalité, étant faite pour une large part de traductions ou d’adaptations d’œuvres de la littérature chrétienne des Grecs, elle n’en eut pas moins en son temps une immense portée, en prouvant que la langue bulgare était capable de rendre les subtilités de la pensée grecque et en permettant un peu plus tard à d’autres peuples, en particulier aux Russes, de s’initier à un christianisme d’expression slave. Les écrivains les plus connus de l’époque de Siméon sont Constantin de Preslav, Jean l’Exarque et le moine Hrabr, auteur du Traité des lettres, qui est une apologie des lettres slaves. Plus tard, l’hérésie dualiste des bogomiles, qui apparaît sous le règne du tsar Pierre (927-969), suscitera une littérature de combat, dont le monument le plus ancien et le plus intéressant est le Traité contre les bogomiles du prêtre Cosmas.

L’œuvre de Cosmas est toutefois difficilement datable et peut être postérieure à la chute de Preslav (972), qui fut pour la Bulgarie le prélude d’un long asservissement à Byzance, amenant une stagnation des lettres bulgares.

Le second Empire bulgare, qui s’édifia vers 1185 pour s’écrouler en 1393 sous les coups des Turcs, devait permettre, surtout à partir du règne de Jean Alexandre (1331-1371), un essor littéraire autour de la capitale Tărnovo. Ce renouveau littéraire est en rapport étroit avec la prédication de l’hésychasme, mouvement mystique venu de Grèce. La plus haute personnalité du second Empire est Euthyme, qui, nommé patriarche de Tărnovo vers 1375, réussit à faire de cette ville le plus puissant centre culturel non seulement de la Bulgarie, mais de tout le monde slave de rite grec, par sa valeur de théologien, d’écrivain, de grammairien et de pédagogue.

Le prestige de l’école de Tărnovo survécut au patriarcat d’Euthyme, déporté par les Turcs en 1393, grâce à plusieurs disciples de ce prélat, qui, fuyant loin de leur patrie asservie, firent rayonner chez les Serbes, chez les Russes et chez les Roumains l’influence littéraire de la Bulgarie. La domination turque avait éteint chez les Bulgares les foyers culturels, sans toutefois réussir à abolir en eux la conscience nationale. C’est ce qui ressort des quelques œuvres personnelles que l’on peut glaner du xve s. au xviiie s. ainsi que de chants épiques qui seront recueillis plus tard, mais qui se sont élaborés au cours de ces longs siècles d’esclavage et qui expriment les aspirations du peuple bulgare à la revanche.


La Renaissance bulgare

C’est en 1762 que Paisij (v. 1722-1798?), moine bulgare de l’Athos, écrivit son Histoire des Slaves bulgares, petit livre d’une importance telle qu’on a pu l’appeler « l’Évangile de la Renaissance bulgare ». Rompant avec les genres conventionnels de la littérature religieuse, Paisij faisait ici œuvre d’historien et surtout de tribun, en rappelant à ses compatriotes que la Bulgarie asservie aux Turcs avait été jadis une nation libre et puissante, et en exhortant les Bulgares à connaître leur glorieux passé, à cultiver leur langue et à résister aux tentatives d’hellénisation. Dans le prolongement direct de l’œuvre de Paisij se situe celle de l’évêque Sofronij de Vraca (v. 1739-1813), que l’on connaît surtout de nos jours par son autobiographie Vie et souffrances du pécheur Sofronij, éloquente sur la grande misère des Bulgares vers la fin du xviiie s. et le début du xixe. Premier écrivain laïque de la Renaissance, Petăr Beron (v. 1800-1871) traçait dans son Abécédaire au poisson (1824) un programme d’instruction en langue bulgare, qui sera appliqué à partir de 1835 dans les écoles bulgares rénovées. La longue lutte livrée contre le patriarcat grec en vue d’obtenir une Église nationale suscita le pamphlet Bulgarie, notre mère, que le moine Neofit Bozveli (v. 1785-1848) écrivit vers 1846 dans sa prison. C’est également vers le milieu du xixe s. que la poésie bulgare donnait ses premières œuvres de valeur avec Dobri Čintulov (v. 1822-1886), auteur de chants patriotiques, et Petko Slavejkov (v. 1827-1895), qui fit preuve d’un talent plus varié. Bientôt, les frères Dimităr (1810-1862) et Konstantin (1830-1862) Miladinov publiaient leur important recueil intitulé Chants populaires bulgares, composé de plusieurs centaines de poésies populaires recueillies surtout en Macédoine (Zagreb, 1861). Le théâtre bulgare, à son tour, voyait le jour avec les drames historiques de Dobri Vojnikov (1833-1878) et de Vasil Drumev (v. 1838-1901).