Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
B

Blake (William) (suite)

L’ « âge d’or »

Guidée par le poète, libérée de ses tabous, l’humanité retrouvera son « âge d’or ». Même le mal que pourraient porter en eux certains individus ne saurait freiner cette marche irrésistible vers la plénitude. Il y suffit que soit oublié le « moi » égoïste (Milton, 1804-1808 ; Jerusalem, 1807-1818). C’est l’amour de l’homme pour son prochain qui conduira les hommes à la conquête de l’immortalité au sein de l’Unité retrouvée.

D. S.-F.

➙ Grande-Bretagne / Romantisme / Surréalisme.

 P. Soupault, William Blake (Éd. Rieder, 1928). / J. Rousselot, William Blake (Seghers, 1964). / J. Blondel, William Blake, émerveillement et profanation (Lettres modernes, 1968). / P. Boutang, William Blake (L’Herne, 1970). / K. Raine, William Blake (Éd. du Chêne, 1975).

Blanc (Louis)

Socialiste français (Madrid 1811 - Cannes 1882).



Journaliste et historien, républicain et socialiste

Né en Espagne, où son père appartient à l’administration du roi Joseph, Louis Blanc doit à la protection royale de poursuivre ses études au collège de Rodez (1821-1830). La révolution de 1830 entraîne la suppression de sa bourse et l’empêche de venir à l’Université de Paris. Il connaît alors des années difficiles et finit par trouver une place de précepteur à Arras, chez un métallurgiste. C’est sans doute ce qui l’oriente vers les problèmes posés par la révolution industrielle. À Arras, il subit aussi l’influence du souvenir de Robespierre, dont il fera son modèle, et celle d’un journaliste libéral, Frédéric Degeorges (1797-1854), directeur du Propagateur du Pas-de-Calais.

En 1834, il revient à Paris et collabore à divers journaux : le National, le Bon Sens, la Réforme. De 1839 à 1842, il est rédacteur en chef de la Revue du progrès. De 1841 à 1848, avec Pierre Leroux et George Sand, il édite la Revue indépendante. Parallèlement, il publie de 1841 à 1844 Histoire de dix ans (1830-1840) et il entreprend en 1847 une Histoire de la Révolution française.


Théoricien de l’organisation du travail

En 1839, un article intitulé l’Organisation du travail, publié dans la Revue du progrès et sans cesse augmenté et corrigé dans les éditions postérieures, attire sur lui l’attention des milieux socialistes.

Louis Blanc voit dans la concurrence un « système d’extermination » pour le peuple, une cause de ruine pour la bourgeoisie, une source de crises pour l’Angleterre, l’origine certaine d’une guerre franco-anglaise pour l’Europe. Il préconise donc une double réforme : politique et sociale. La réforme politique est le moyen, la réforme sociale est le but.

Le socialisme de Louis Blanc se place à mi-chemin entre le socialisme étatique et organisateur de Saint-Simon et le socialisme libertaire et coopératif de Fourier. À son avis, l’État doit prendre en charge les banques, les grandes usines, les entrepôts, les chemins de fer. Dans le secteur demeuré privé, il aidera les ouvriers à créer des « ateliers sociaux » ; il leur fournira des fonds, fixera l’éventail initial des salaires, élaborera le statut. Chaque année, le bénéfice de chaque atelier sera divisé en trois parts ; la première sera répartie également entre les membres ; de la deuxième, la moitié alimentera un fonds d’aide aux vieillards, aux malades et aux infirmes ; l’autre moitié viendra en aide aux industries en difficulté. La troisième part permettra d’acquérir des instruments de travail pour employer ceux qui, voulant adhérer à l’association, présentent les garanties nécessaires. Les capitaux privés sont acceptés ; ils recevront un intérêt fixe, sans participation aux bénéfices.

Louis Blanc est convaincu que les ateliers sociaux élimineront les entreprises privées ; l’esprit d’association l’emportera sur l’individualisme ; la concurrence tuera la concurrence. Les ateliers sociaux se fédéreront dans chaque branche, puis d’une branche à l’autre, et ainsi disparaîtra le commerce, « cette grande plaie de la société ». À la veille de la révolution de février 1848, qu’il a contribué à préparer en participant à la campagne des banquets, Louis Blanc est sans doute le plus célèbre des socialistes vivants.


L’épreuve du pouvoir

Dans le gouvernement provisoire, il est désigné d’abord comme secrétaire, puis comme membre à part entière, avec l’ouvrier Albert. C’est la première participation d’un socialiste au gouvernement. Louis Blanc obtient que soit promise la garantie du « droit au travail ».

Pressé par les manifestations populaires, le gouvernement constitue, au palais du Luxembourg, une « Commission du gouvernement pour les travailleurs », que Louis Blanc préside, assisté d’Albert. En mars, cette Commission met sur pied un plan qui comporte la création d’un ministère du Progrès, l’institution d’un Secteur étatisé (chemins de fer, mines, banques de France, assurances, entrepôts et magasins) et la création d’associations ouvrières, faisant de leurs bénéfices quatre parts égales (amortissement du capital, solidarité sociale, réserves, primes aux travailleurs). Pendant tous ses travaux, elle essaie d’arbitrer les conflits sociaux qui surgissent ; elle est un foyer de propagande socialiste.

Cependant, en dehors de Louis Blanc, le gouvernement crée, pour occuper les chômeurs, des ateliers nationaux, plus proches des ateliers de charité de l’Ancien Régime que des ateliers sociaux de Louis Blanc. L’expérience se solde par un échec coûteux ; l’opinion s’en prend à ces « râteliers nationaux », dont Louis Blanc est tenu injustement pour responsable. Aux élections du 23 avril 1848, Blanc est élu député de Paris, mais de justesse.


Vingt ans d’exil

Exclu du pouvoir exécutif, il est considéré comme l’un des inspirateurs de la manifestation du 15 mai 1848 contre la Constituante. Après la fermeture des ateliers nationaux et l’insurrection de juin, inculpé, il part pour la Belgique, d’où il gagne l’Angleterre. Il y reste jusqu’en 1870, travaillant à une Histoire de la révolution de 1848. En contact avec Étienne Cabet et Pierre Leroux, il demeure à l’écart de l’Internationale. Revenu à Paris après le 4-Septembre, il sert dans la garde nationale. Élu député de Paris le 8 février 1871, il s’élève contre la cession de l’Alsace-Lorraine, désapprouve la Commune, juge insuffisantes les lois constitutionnelles de 1875. Bien qu’il ait réclamé l’amnistie pour les communards, il n’a plus guère l’audience des jeunes générations.