Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
B

Benoît XV (suite)

Les appels à la paix seront très nombreux. Benoît XV s’adresse directement aux chefs d’État le 28 juillet 1915 et le 1er août 1917. Dans cette dernière intervention, le pape formule des propositions concrètes : elle a été précédée de conversations entre Pacelli (le futur Pie XII), alors nonce à Munich, et les chanceliers allemands Bethmann-Hollweg et Georg Michaelis. Le pape suggère un désarmement simultané et réciproque, l’acceptation de l’idée d’un arbitrage, la liberté des mers, la renonciation réciproque aux indemnités de guerre, la restitution de ses colonies à l’Allemagne, l’indépendance totale de la Belgique.

Cette initiative n’obtient pas le succès désiré, le haut état-major allemand, réuni le 11 septembre au château de Bellevue, s’opposant à l’indépendance complète de la Belgique. En outre, les puissances de l’Entente trouvent que le projet est trop favorable aux empires centraux, auxquels il n’impose aucune réparation, et qu’il laisse libres d’agir à leur guise à l’est et dans les Balkans. C’est pourquoi, même si l’Allemagne avait accepté la note de Benoît XV, l’Entente n’aurait sans doute pas suivi.

L’autre souci du pape est de maintenir la neutralité du Saint-Siège. Il ne s’oppose pas moins vigoureusement à la déportation des ouvriers, et agit fortement en ce sens par sa diplomatie en Allemagne ; il condamne aussi le bombardement des villes ouvertes. Pour contribuer au soulagement des populations, le pape fait des dons considérables d’argent, facilite l’échange des prisonniers de guerre et leur hospitalisation en Suisse. Cette action charitable se poursuivra après le conflit, surtout au service de l’enfance.

L’œuvre diplomatique de Benoît XV a quelque peu fait oublier ses autres activités, dont certaines furent importantes, tels ses encouragements au parti populaire de Don Sturzo, appelé à un si grand avenir. Dans son encyclique Maximum illud de 1919, il encouragea la formation d’un clergé indigène.

P. R.

➙ Catholicisme / Église catholique / Papauté / Vatican.

 P. Dudon, l’Action de Benoît XV pendant la guerre (G. Beauchesne, 1918). / F. Hayward, Un pape méconnu : Benoît XV (Casterman, 1955).

Bentham (Jeremy)

Moraliste et législateur anglais (Londres 1748 - id. 1832).


Fils d’attorney, Jeremy Bentham a 19 ans lorsqu’il obtient à Oxford son diplôme d’avocat. Révolté par les abus de la procédure anglaise, il consacrera son existence à la réforme du droit, dont il veut fonder les nouveaux principes sur une mathématique des peines et des plaisirs. Parue en 1789, son Introduction aux principes de morale et de législation lui vaut une renommée telle que l’Assemblée nationale française lui confère le titre de citoyen français (1792). Il y répondra par l’adresse Émancipez vos colonies (1793). Dès 1802, un juriste de Genève, Étienne Dumont, réunit les manuscrits de Bentham et les traduit à sa façon sous le titre Traité de législation civile et pénale. En 1823-24, Bentham fonde la Westminster Review, autour de laquelle se groupent les « utilitaristes ». Il meurt en 1832, dans le regret de n’avoir pu faire construire sa prison modèle, le Panopticon.

Les idées principales de Bentham sont exposées dans l’Introduction et dans un ouvrage posthume, Déontologie ou Science de la morale (1834). La raison pratique, estime Bentham, doit se confondre avec la recherche du « plus grand bonheur possible du plus grand nombre ». Qu’est-ce que l’intérêt de la communauté ? La somme des intérêts des divers membres qui la composent. Or l’intérêt de l’individu s’identifie à ce qui accroît la somme totale de ses plaisirs ou diminue la somme totale de ses peines. De là une unité de mesure concrète du bonheur : le principe d’utilité. Se fondant sur une quantification imitée des mathématiques, Bentham réussit à prêter un contenu réel à des mots généralement vagues, tels que vice, vertu, devoir. La vertu est « ce qui augmente la possession du plaisir avec exemption de peine », le vice ce qui la diminue. Cette façon d’objectiver un sentiment quotidiennement éprouvé par les individus se heurte, selon Bentham, à deux principes arbitraires, éternels obstacles à la science du bonheur. Le principe d’ascétisme, une « perversion cléricale » défendue avec des nuances par le parti religieux et par le parti des philosophes, approuve les actions qui diminuent le bonheur des individus ou désapprouve celles qui l’augmentent. Le principe sentimental s’interdit tout critère autre que le caprice. Au contraire, le principe d’utilité calcule le rapport des plaisirs et des peines, dont il faut distinguer la nature (physiques, moraux, politiques, religieux) et qu’il convient de quantifier (intensité, durée, proximité...) afin que le législateur, mathématicien suprême, en tire le meilleur mode de gouvernement des hommes.

R. V.

 L. Stephen, The English Utilitarians (Londres, 1900 ; 3 vol.). / O. Kraus, Zur Theorie des Wertes : eine Bentham-Studie (Halle, 1901). / E. Halévy, la Formation du radicalisme philosophique (Alcan, 1901-1904 ; 3 vol.). / C. M. Atkinson, Jeremy Bentham : his Life and Work (Londres, 1905). / H. G. Lundin, The Influence of J. Bentham on English Democratic Development (Iowa City, 1920). / D. Baumgardt, Bentham and the Ethics of Today (Princeton, New Jersey, 1952). / M. P. Mack, Jeremy Bentham (Londres, 1962).

Benz (Carl Friedrich)

Ingénieur allemand (Karlsruhe 1844 - Ladenburg 1929).


Fils d’un mécanicien sur locomotive, il travaille dans plusieurs usines de sa région natale avant de s’installer, à son compte, dans un modeste atelier où il dirige huit compagnons. En principe, il ne s’agit que de construire et de perfectionner les moteurs à gaz. En réalité, Carl Benz, comme son compatriote et rival Gottlieb Daimler (1834-1900), cherche à réaliser la « voiture sans chevaux » mue par un moteur à explosion. Tous deux travaillent, initialement, sur la motorisation de la bicyclette. Mais, alors que Daimler poursuit patiemment ses recherches pour aboutir à la création de la première motocyclette à cadre ouvert en bois (1885), Benz abandonne rapidement son idée première au profit de la réalisation d’une automobile.