Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
W

Weimar (république de) (suite)

Le 15 janvier 1933, dans le petit Land de Lippe, les nazis emportent les élections et commencent aussitôt à faire pression pour que Hindenburg appelle Hitler. Schleicher n’obtient pas la dissolution du Reichstag, et l’on propose à Hindenburg un ministre de la Guerre proche des nazis. Le 28 janvier, Schleicher démissionne. Le 29, von Papen, qui négocie pour Hindenburg, rencontre une dernière fois Hitler. Le 30, celui-ci devient chancelier d’un gouvernement de concentration nationale dont von Papen est le vice-chancelier. La république de Weimar est morte.

F.-G. D.

➙ Allemagne / Bavière / Communisme / Hindenburg / Hitler / National-socialisme / Ruhr / Social-démocratie / Stresemann.

 F. Friedensburg, Die Weimarer Republik (Berlin, 1946 ; nouv. éd., Hanovre, 1959). / O. K. Flechtheim, Die KPD in der Weimarer Republik (Offenbach, 1948, 2e éd., Francfort, 1971 ; trad. fr. le Parti communiste allemand sous la république de Weimar, Maspero, 1972). / E. Eyck, Geschichte der Weimarer Republik (Zurich, 1954-1956 ; 2 vol.). / K. D. Bracher, Die Auflösung der Weimarer Republik (Stuttgart, 1955). / G. Badia, Histoire de l’Allemagne contemporaine, 1917-1962 (Éd. sociales, 1962 ; 2 vol.). / F. G. Dreyfus, Histoire des Allemagnes (A. Colin, coll. « U », 1970). / G. Castellan, l’Allemagne de Weimar, 1918-1933 (A. Colin, 1969).

Welles (Orson)

Metteur en scène de cinéma, de théâtre et de radio américain (Kenosha, Wisconsin, 1915).


Orson Welles naît dans une famille d’artistes. Sa mère est pianiste et son père un inventeur farfelu, qui aime surtout voyager aux États-Unis et en Europe avec son fils. Le tuteur du petit Orson, le docteur Bernstein, offre un jour à l’enfant un théâtre de marionnettes, sur lequel il s’initie, dit-on, à la mise en scène. Grâce à lui, le jeune Orson Welles étudie le dessin et la peinture, en arrive même à brosser les décors du théâtre de son école et à illustrer quelques obscurs ouvrages. À la Todd School, où il reste jusqu’à l’âge de quinze ans, il monte et interprète des pièces, notamment un condensé des pièces historiques d’un écrivain qui demeure encore aujourd’hui son préféré, William Shakespeare.

En 1931, il part pour l’Irlande, où il parvient à se faire engager dans un théâtre de Dublin. De retour aux États-Unis, il édite un Shakespeare pour tous et publie des nouvelles dans divers magazines. En 1933, il s’intègre à la troupe de Katharine Cornell, qui lui permettra de conquérir New York après avoir connu les louanges du publie et de la critique de Chicago, où il organise un festival d’art dramatique. Parallèlement, il entre à la radio en 1934, où il collabore aux émissions les plus diverses et apporte son soutien à Roosevelt. Avec le producteur John Houseman, il crée le « Mercury Theatre », qu’il subventionne avec l’aide du gouvernement. Il y monte des pièces sociales, classiques et d’avant-garde. En octobre 1938, son adaptation radiophonique (très libre) de la Guerre des mondes de H. G. Wells sème la panique en Amérique et instantanément le fait connaître. Sans abandonner le théâtre ni la radio, Orson Welles signe en août 1939 un contrat avec la compagnie cinématographique RKO, qui lui assure la réalisation d’au moins un film par an, une liberté totale et des conditions financières exceptionnelles. Ses deux premiers projets échouent, puis il tourne Citizen Kane durant l’été de 1940, et ce malgré l’opposition de W. R. Hearst, le célèbre magnat de la presse, dont il s’est manifestement inspiré pour son film. Bien accueilli par la presse, Citizen Kane est un désastre financier. Les ennuis et la légende d’Orson Welles, l’enfant terrible d’Hollywood, commencent. Welles revient à la radio pour quelques mois, en songeant sans cesse à prendre sa revanche sur un public et une industrie qui ne lui pardonnent pas d’avoir été le premier à remettre en question le principe selon lequel le style, au cinéma, doit passer inaperçu et s’effacer devant l’histoire. Par sa mise en scène révolutionnaire, l’audace de son montage et la complexité de ses mouvements d’appareil, Citizen Kane a, en effet, beaucoup dérouté les professionnels conservateurs d’Hollywood.

Bien décidé à continuer à faire de la « forme » la matière même de ses films à venir, Orson Welles dépense son extraordinaire énergie à préparer la Splendeur des Amberson (The Magnificent Ambersons), qu’il tourne en 1942. Nouvel échec commercial. Welles entreprend un film mineur, Voyage au pays de la peur (Journey into Fear, 1942), que termine, en le signant, Norman Foster. En 1946, il produit, interprète et dirige à Broadway le Tour du monde en 80 jours, d’après J. Verne, spectacle total et cinématographique qui remporte un grand succès. Pour oublier ses échecs publics comme cinéaste, il paraît dans des films tournés par d’autres (Jane Eyre, de R. Stevenson, 1944) et apporte bientôt à chacun de ses personnages une force, une originalité, une ambiguïté que les scénaristes, souvent, ne soupçonnaient pas en écrivant les rôles. Le Criminel (The Stranger), qu’il met en scène en 1946 sur un scénario de John Huston, est un film raté, d’ailleurs renié par lui. Ayant besoin de 50 000 dollars pour monter un spectacle entrepris avec Mike Todd, Welles les emprunte à un producteur de la Columbia et s’engage à faire pour ce prix un film pour cette compagnie. C’est la Dame de Shangai (The Lady from Shanghai, 1947), un « thriller » flamboyant dans lequel Rita Hayworth, qu’Orson Welles a épousée, trouve le rôle le plus insolite de sa carrière. Carrière qui se brise net à cause du film.

Après un Macbeth tourné sans moyens (1947), Welles vient jouer à Paris, réalise une série d’émissions de radio en Angleterre (en 1950 et en 1952) et tourne à la télévision américaine une adaptation du Roi Lear dirigée par Peter Brook. Célèbre comme comédien grâce au Troisième Homme (de Carol Reed, 1948) et à la Rose noire (d’Henry Hathaway, 1950), celui qu’on appelle non sans justesse le « père du cinéma moderne » doit attendre de longs mois avant de tourner en Italie et au Maroc un Othello superbe (1952), qui ne remporte pas plus de succès que ses œuvres précédentes. Toujours d’une activité débordante — émissions de télévision aux États-Unis et en Angleterre, films en France (pour Sacha Guitry notamment) ou en Amérique (Moby Dick, de J. Huston, 1956, qu’il a joué l’année d’avant sur une scène londonienne), romans (une Grosse Légume, 1953 ; Mr. Arkadin, 1954, dont il tire un film en 1955) —, il ne pense qu’à mettre en scène des films où la démesure, le mépris des normes et des genres rétabliraient enfin la seule notion qui lui tienne à cœur : la notion d’auteur total, mégalomane et tout-puissant.