Aviz (dynastie d’) (suite)
La fin de la dynastie
L’abandon des places marocaines a montré les limites des possibilités de conquête portugaises. La Mina, jadis exportatrice d’or, coûte plus cher qu’elle ne rapporte. En Orient, le monopole portugais est battu en brèche, et ce sont des navires nordiques qui, maintenant, fréquentent les ports portugais. L’or n’arrive plus au Portugal, et, pour soutenir le commerce, l’argent hispano-américain s’avère indispensable. L’empire s’étouffe. À cet essoufflement correspond un grave malaise dans la métropole. L’essor maritime a entraîné une coupure dans le pays : à l’enrichissement des villes et de la côte correspond un dépeuplement des campagnes et de l’intérieur. Ce ne sont pas les esclaves qui peuvent pallier ce manque de bras. Introduits au début pour les plantations sucrières de l’Algarve, ils sont de plus en plus concentrés dans les villes. Un secteur tertiaire s’est anormalement développé, d’autant que, finalement, la richesse impériale n’a profité qu’à une minorité.
C’est dans ce contexte que se situe la tentative marocaine de Sébastien (1557-1578), vaine épopée chevaleresque qui se termine par le désastre d’Alcaçar Quivir. La crise dynastique n’est que retardée par la proclamation comme souverain du vieux cardinal dom Henri (1578-1580). Deux ans plus tard, à sa mort, deux candidats s’affrontent : Antoine, O prior do Crato, prétendant national que soutiennent les petites gens, et Philippe II d’Espagne ; 1385 ne se renouvelle pas : les classes dirigeantes sont gagnées par la corruption, la bourgeoisie, qui a besoin de l’argent américain, passe cette fois dans le camp castillan. Battu à Alcántara, Antoine doit fuir à l’étranger ; les Cortes de Tomar reconnaissent Philippe comme roi de Portugal.
Pendant soixante ans, le Portugal allait vivre sous une dynastie étrangère.
Sébastien
(Lisbonne 1554 - Alcaçar Quivir 1578), roi de Portugal (1557-1578). Mystique et avide de gloire, il ne put se résigner à l’abandon des places marocaines retombées sous la domination musulmane. L’opération de reconquête, mal préparée, aboutit le 4 août 1578 au désastre d’Alcaçar-Quivir. Aventurée dans un pays hostile, dans des conditions difficiles, l’armée portugaise laissait neuf mille morts sur le champ de bataille. Sébastien lui-même avait disparu : son cadavre ne devait jamais être retrouvé. De là, la naissance et le développement du sébastianisme.
Le messianisme a profondément marqué l’histoire portugaise dans les Temps modernes : tant dans les milieux juifs ou nouveaux chrétiens persécutés que dans les milieux chrétiens imprégnés d’idées millénaristes. La disparition inexpliquée du roi, la mort ou la captivité de l’élite du pays et, bientôt, la perte de l’indépendance allaient susciter une nouvelle vague messianique. Ces malheurs sont considérés comme autant d’épreuves avant le triomphe final de Sébastien, revenu miraculeusement. Si le sébastianisme a animé la résistance nationale lors de la domination espagnole, il ne disparaît pas pour autant avec l’indépendance : les invasions françaises du xixe s. allaient le faire renaître quelque temps.
J. M.
➙ Portugal.