Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

Aviz (dynastie d’) (suite)

La fin de la dynastie

L’abandon des places marocaines a montré les limites des possibilités de conquête portugaises. La Mina, jadis exportatrice d’or, coûte plus cher qu’elle ne rapporte. En Orient, le monopole portugais est battu en brèche, et ce sont des navires nordiques qui, maintenant, fréquentent les ports portugais. L’or n’arrive plus au Portugal, et, pour soutenir le commerce, l’argent hispano-américain s’avère indispensable. L’empire s’étouffe. À cet essoufflement correspond un grave malaise dans la métropole. L’essor maritime a entraîné une coupure dans le pays : à l’enrichissement des villes et de la côte correspond un dépeuplement des campagnes et de l’intérieur. Ce ne sont pas les esclaves qui peuvent pallier ce manque de bras. Introduits au début pour les plantations sucrières de l’Algarve, ils sont de plus en plus concentrés dans les villes. Un secteur tertiaire s’est anormalement développé, d’autant que, finalement, la richesse impériale n’a profité qu’à une minorité.

C’est dans ce contexte que se situe la tentative marocaine de Sébastien (1557-1578), vaine épopée chevaleresque qui se termine par le désastre d’Alcaçar Quivir. La crise dynastique n’est que retardée par la proclamation comme souverain du vieux cardinal dom Henri (1578-1580). Deux ans plus tard, à sa mort, deux candidats s’affrontent : Antoine, O prior do Crato, prétendant national que soutiennent les petites gens, et Philippe II d’Espagne ; 1385 ne se renouvelle pas : les classes dirigeantes sont gagnées par la corruption, la bourgeoisie, qui a besoin de l’argent américain, passe cette fois dans le camp castillan. Battu à Alcántara, Antoine doit fuir à l’étranger ; les Cortes de Tomar reconnaissent Philippe comme roi de Portugal.

Pendant soixante ans, le Portugal allait vivre sous une dynastie étrangère.

Sébastien

(Lisbonne 1554 - Alcaçar Quivir 1578), roi de Portugal (1557-1578). Mystique et avide de gloire, il ne put se résigner à l’abandon des places marocaines retombées sous la domination musulmane. L’opération de reconquête, mal préparée, aboutit le 4 août 1578 au désastre d’Alcaçar-Quivir. Aventurée dans un pays hostile, dans des conditions difficiles, l’armée portugaise laissait neuf mille morts sur le champ de bataille. Sébastien lui-même avait disparu : son cadavre ne devait jamais être retrouvé. De là, la naissance et le développement du sébastianisme.

Le messianisme a profondément marqué l’histoire portugaise dans les Temps modernes : tant dans les milieux juifs ou nouveaux chrétiens persécutés que dans les milieux chrétiens imprégnés d’idées millénaristes. La disparition inexpliquée du roi, la mort ou la captivité de l’élite du pays et, bientôt, la perte de l’indépendance allaient susciter une nouvelle vague messianique. Ces malheurs sont considérés comme autant d’épreuves avant le triomphe final de Sébastien, revenu miraculeusement. Si le sébastianisme a animé la résistance nationale lors de la domination espagnole, il ne disparaît pas pour autant avec l’indépendance : les invasions françaises du xixe s. allaient le faire renaître quelque temps.

J. M.

➙ Portugal.

Avogadro (Amedeo di Quaregna e Ceretto, comte)

Chimiste et physicien italien (Turin 1776 - id. 1856).


Fils d’un magistrat de Turin, Amedeo Avogadro, après avoir obtenu sa licence en droit (1795), est d’abord inscrit au barreau de cette ville ; mais il est vite attiré par les sciences physiques, auxquelles il s’est initié presque en solitaire. À la suite d’une communication à l’Académie royale de Turin, dont il devient membre, il est, en 1809, nommé professeur de physique et de mathématiques au collège royal de Verceil. Puis il occupe une chaire de physique supérieure, créée pour lui en 1820 à l’université de Turin. Cette chaire, supprimée deux ans plus tard à la suite de troubles politiques, est rétablie en 1832 et attribuée d’abord à Cauchy. Mais elle revient ensuite à Avogadro, qui la conservera jusqu’en 1850.

Avogadro est l’auteur, en 1811, d’une célèbre hypothèse qui sera, trois ans plus tard, reprise et précisée par Ampère*, et grâce à laquelle pourra s’édifier la notation atomique inaugurée par Dalton*. Elle indique que des volumes égaux de gaz différents, mesurés sous la même pression et à la même température, contiennent le même nombre de molécules.

C’est en partant de plusieurs constatations qu’Avogadro est amené à cette affirmation si simple. D’abord, les gaz sont très compressibles ; il faut donc qu’un espace vide important sépare leurs particules constitutives. Par ailleurs, Boyle* puis Mariotte ont signalé que tous les gaz suivent la même loi de compressibilité ; Gay-Lussac* et Charles ont fait la même constatation pour les lois de dilatation. Il semble en résulter que, dans un volume donné, ce vide entre molécules doit être toujours le même.

Cette hypothèse fournit au surplus une interprétation facile des lois volumétriques de Gay-Lussac sur les réactions chimiques en milieu gazeux. Elle permettra, ce que ne peuvent les seules lois pondérales des combinaisons, de déterminer les formules de constitution des composés chimiques, tout au moins de ceux qui peuvent prendre l’état gazeux : du fait, par exemple, que deux volumes d’hydrogène se combinent à un volume d’oxygène pour donner deux volumes de vapeur d’eau, on doit conclure que la formule de cette dernière est H2O (Dalton l’écrivait HO), que les molécules d’hydrogène et d’oxygène sont diatomiques et se représentent par les formules H2 et O2.

D’autre part, les masses correspondant aux formules doivent être proportionnelles aux densités des gaz. Il devient donc possible de déterminer la masse molaire d’un gaz si l’on connaît celle d’un autre.

En dépit de sa remarquable simplicité et de son extrême fécondité, l’hypothèse d’Avogadro rencontre peu de crédit chez ses contemporains. Il faut dire que les chimistes de l’époque s’intéressent bien plus aux expériences qu’aux théories, l’existence même des atomes étant niée par beaucoup d’entre eux. Au reste, il règne alors une grande confusion entre les atomes, particules constitutives des corps simples, et les molécules, qui caractérisent les corps composés. Ce n’est que cinquante ans plus tard que Cannizzaro, disciple d’Avogadro, établira entre eux une distinction définitive.

On a donné le nom de « nombre d’Avogadro » au nombre de molécules contenues dans une mole ou, ce qui revient au même, au nombre d’atomes contenus dans un atome-gramme. Ce nombre représente en quelque sorte l’échelle selon laquelle la notation chimique est l’image de la réalité atomique. (V. atome.)