Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
V

Vespasien (suite)

Il eut fort à faire à réparer les désordres causés par Néron et par ses successeurs. Il y montra ses défauts et ses qualités de provincial. Sans culture, terre à terre, sans finesses oratoires, sans préjugés, il était prudent et pondéré, lucide, courageux. Pour renforcer son autorité, il insista sur le caractère divin de son pouvoir, assuma les titres d’auguste et de césar et étendit ses pouvoirs par la lex de imperio Vespasiani. Il déclara sans ambages que ses fils lui succéderaient et Titus fut associé à l’Empire dès 71. Les philosophes qui n’avaient pas de sympathie pour un empire héréditaire furent chassés de Rome. Helvidius Priscus († 75), philosophe stoïcien et chef de l’opposition au sénat, fut contraint à s’ouvrir les veines.

Il affecta un train de vie modeste. Il fit démolir la Maison d’or de Néron, n’habita pas les constructions monumentales du Palatin, reçut chez lui sans façons. Il fit bon ménage avec les sénateurs et se montra assidu aux séances du sénat. Celui-ci, décimé par Néron, fut repeuplé de gens semblables à l’empereur, des Italiens ou des provinciaux, raisonnables et conformistes. Ce fut le résultat de la censure, qu’il prit en 73-74 avec Titus et lors de laquelle eut également lieu une vaste révision du cadastre de Rome. Les mœurs de l’aristocratie romaine, suivant l’exemple du prince, changèrent radicalement.

Les questions d’argent se révélèrent primordiales. Le budget était fort mal en point, et les désordres avaient nui à la rentrée des impôts. Vespasien s’efforça de trouver des impôts nouveaux (« l’argent n’a pas d’odeur », disait-il), réévalua et réclama avec rigueur les taxes traditionnelles. Il enleva à la Grèce l’immunité fiscale accordée par Néron. Il s’acharna à récupérer les terres publiques que les particuliers s’étaient appropriées. On raconta qu’il trafiquait des magistratures. On l’accusait de cupidité, d’avarice. Mais c’était une nécessité, et il savait aussi dépenser. Il fut libéral envers les sénateurs en difficulté, envers les cités affligées par des calamités naturelles, envers les intellectuels aussi, et en particulier les professeurs. L’illustre Quintilien (Marcus Fabius Quintilianus, v. 30 - v. 00), auteur d’une classique Formation de l’orateur, fut le premier professeur fonctionnaire. Vespasien eut aussi à restaurer les ruines matérielles. Rome avait beaucoup souffert des troubles des années précédentes, qui avaient complété les effets de l’incendie de Néron. Des quartiers étaient ravagés. L’empereur remit en état rues et aqueducs et rebâtit le Capitole. Il construisit de nouveaux et vastes édifices : un nouveau forum, le temple de la Paix, l’énorme amphithéâtre flavien (Colisée), dont la construction ne put être achevée que sous le règne de Titus, des bains publics. La limite sacrée de Rome, le pomoerium, fut étendue. La statistique publiée à l’occasion de la censure impériale donne un périmètre de ligne d’octroi de 20 km environ, mais les autres chiffres donnés permettent de conclure que la zone bâtie dépassait de beaucoup les limites officielles.

L’armée fut partout bien reprise en main. Découragée, démoralisée sous Vitellius, indisciplinée par la compétition autour de l’Empire, elle fut restructurée. La garde prétorienne fut épurée, réduite en effectif. Trois légions de l’armée de Germanie furent licenciées. Les Italiens semblent s’être détournés du recrutement des légions. Les auxiliaires furent éloignés de leur pays d’origine et commandés par des officiers romains. Les chefs furent soigneusement choisis.

Il restait à pacifier l’Empire. Les provinces s’étaient habituées aux troubles. En Gaule, les Bataves et les Frisons s’étaient révoltés en 69 à l’appel de C. Julius Civilis, Batave mais citoyen romain, chef d’un corps auxiliaire, qui avait fait mine de se rallier à Vespasien, s’était emparé des places fortes romaines de la région des bouches du Rhin et avait incité la Gaule à se révolter. Les Gaulois, soulevés sous la conduite de Julius Sabinus, de Julius Tutor et de Julius Classicus, furent vite pacifiés par Q. Petilius Cerealis. Civilis résista assez longtemps avant d’être refoulé outre-Rhin (70). Vespasien se montra généreux envers les vaincus. En Judée, la guerre se poursuivit sous la conduite de Titus, qui prit Jérusalem après des combats acharnés (70). Le père et le fils triomphèrent ensemble l’année suivante. L’occupation de la région du haut Danube (champs Décumates) supprima un angle rentrant de la ligne de défense de l’Empire (73).

L’Empire vécut ensuite quelques années d’un calme si profond que la paix de Vespasien en devint proverbiale. Toutefois, Cn. Julius Agricola (40-93), envoyé en Bretagne en 77, poursuivit la conquête par l’occupation de l’actuel pays de Galles et la prise de Mona (Anglesey).

Amateur de bons mots, Vespasien déclara, quand il se sentit mourir : « Je me sens devenir dieu » ; puis il se leva en ajoutant : « Un empereur doit mourir debout. »

R. H.

 L. Homo, Vespasien, l’empereur du bon sens (A. Michel, 1949).

Vestris (les)

En ital. Vestri, famille d’artistes italiens, d’origine florentine.


Tommaso Maria Ippolito Vestri, modeste employé du mont-de-piété de Florence, a sept enfants de Béatrice Bruscagli. À la suite d’une irrégularité, il est obligé de quitter sa ville natale avec toute sa famille et se rend à Naples. La « tribu » parcourt un temps l’Italie, puis se sépare lors d’un voyage à Vienne. Le père part pour Milan tandis que la mère séjourne à Dresde, puis se fixe à Paris vers 1745 avec plusieurs de ses enfants, Angiolo Maria (1730-1809), Teresa et Gaetano, puis Violante (1732-1791), qui viendra les rejoindre après un séjour en Angleterre.

Voués au chant ou à la danse, tous les enfants de Tommaso Vestri ne firent pas une carrière artistique brillante. Teresa (Florence 1726 - Paris 1808), belle et séduisante, danseuse de talent, put grâce à ses succès mondains influer sur la destinée de son frère Gaétan. Giovanni Battista (1725-1801), piètre danseur, resta très attaché à Gaétan et vécut dans son entourage direct.