Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
V

Valois (suite)

L’accroissement du royaume

Les Valois, dilatant le domaine royal aux dimensions du royaume, ont encore agrandi assez considérablement celui-ci, notamment au sud de la Loire. Réalisée en trois étapes par Philippe VI* (1343, 1344 et 1349), la cession d’un pays d’Empire, le Dauphiné*, au fils aîné du roi de France, porte pour la première fois la frontière du royaume au sommet des Alpes. En achetant Montpellier à Jacques III de Majorque en 1349, ce même souverain parachève la conquête du Languedoc*.

Pendant plus d’un siècle, cette politique d’expansion se trouve pratiquement interrompue par la guerre de Cent Ans, qui aboutit même à la cession en toute souveraineté de l’Aquitaine au roi d’Angleterre par le traité de Brétigny-Calais des 8 mai et 24 octobre 1360. Faute de l’acceptation par Édouard III des ratifications prévues par ce document, cette amputation territoriale n’est pas valable, mais elle n’est définitivement annulée qu’en 1453 par la victoire de Castillon, qui consacre l’achèvement de la reconquête de la Guyenne et de la Gascogne. Dès lors, les Valois peuvent procéder à de nouvelles acquisitions, et d’abord à celle, temporaire, des comtés de Cerdagne et du Roussillon, que Louis XI s’est fait remettre le 9 mai 1462 par le roi d’Aragon pour prix de son aide contre les Catalans révoltés et que Charles VIII restitue par le traité de Barcelone de janvier 1493. Le legs de la Provence* à Louis XI par Charles du Maine achève de donner en 1481 à la France une vaste façade méditerranéenne, tandis que le double mariage des duchesses de Bretagne* — Anne avec Louis XII (1499-1514) et Claude avec François Ier — et l’édit d’Union de 1532 assurent la possession de leur principauté à l’héritier de ce dernier couple, Henri II, qui l’incorpore au royaume en 1547. Moins heureux dans leur lutte contre les Habsbourg*, auxquels ils s’opposent dès le lendemain de la mort de Charles le Téméraire à Nancy le 5 janvier 1477 et de l’union de sa fille et unique héritière, Marie de Bourgogne, avec Maximilien d’Autriche le 19 août 1477, les Valois doivent renoncer à leur profit d’abord au comté de Flandre, cédé aux termes du traité d’Arras du 23 décembre 1482, puis au comté d’Artois, abandonné à la suite de la paix de Senlis de 1493, qui consacre également la perte de la Franche-Comté, acquise en 1482. Nourries à l’origine par les droits et les ambitions de Charles VII sur le royaume de Naples et de Louis XII sur le Milanais, et enfin par les prétentions de François Ier à la couronne impériale, les guerres d’Italie* (1494-1559), qui opposent la France non seulement à l’Italie mais aussi à l’Empire, se soldent par l’abandon des ambitions transalpines des Valois, qui ne conservent en Italie que Turin et Pignerol lors de la signature les 2 et 3 avril 1559 du traité du Cateau-Cambrésis. Mais en gardant les trois évêchés, Metz, Toul et Verdun, occupés en 1552 ainsi que Calais et Guînes, repris aux Anglais en 1558, la France renforce sa frontière du nord et du nord-est, affaiblie depuis la fin du xve s. par la perte de la Flandre et de l’Artois. Au total, l’œuvre territoriale des Valois apparaît donc nettement positive.


L’œuvre militaire et financière

• L’armée. Pour vaincre l’Anglais, combattre l’Aragonais et l’Allemand et réaliser finalement ces annexions, les Valois renforcent leurs alliances traditionnelles avec l’Écosse et, au xve s. seulement, avec la Castille. Surtout, ils mettent sur pied un nouvel outil de guerre. Entreprise par Charles V, qui adjoint aux contingents féodaux des compagnies soldées régulièrement et commandées par des capitaines de son choix placés sous la haute autorité de Bertrand Du Guesclin*, connétable de France d’octobre 1370 à sa mort, le 13 juillet 1380, cette œuvre aboutit à la création par Charles VII, pour la première fois en France, d’une armée permanente composée de trois armes essentielles : la cavalerie, l’infanterie et l’artillerie, dont ses successeurs se contentent de modifier l’équilibre, le recrutement et l’équipement à la fin du xve et surtout au xvie s.

Formée le 26 mai 1445 de quinze compagnies d’ordonnance de cent lances régulièrement soldées par le roi, la cavalerie est à l’origine une arme lourde qui joue un rôle essentiel dans le corps de bataille. Elle est renforcée en 1498 par Louis XII d’une cavalerie légère : celle des chevau-légers, dont François Ier diversifie l’armement (arquebusiers à cheval) et le recrutement (stradiots albanais), auxquels se joignent lors des guerres de Religion les reîtres allemands armés de pistolets. Elle perd pourtant sa prépondérance numérique puisqu’elle ne réunit plus que le quart des effectifs au début du xvie s. et que le dixième au milieu.

Cette prépondérance est alors passée à l’infanterie royale née de l’ordonnance de 1448, qui crée les francs archers. Recrutés obligatoirement à raison d’un archer par paroisse, ces derniers jouent un rôle important dans la lutte contre les Anglais ; mis en déroute à Guinegatte en 1479, ils disparaissent après la défaite de Pavie en 1525. En fait, depuis 1480, l’infanterie royale se compose essentiellement de volontaires groupés en bandes françaises ou suisses (plus tard gasconnes, picardes ou piémontaises), dont Louis XII fixe les effectifs à cinq cents hommes par l’ordonnance du 12 janvier 1505. Avec François de Guise (1519-1563) agissant sur l’ordre de François II, ces bandes deviennent enfin en 1560 des régiments, qui, à eux seuls, constituent l’infanterie française. Quant à l’infanterie étrangère au service du roi, elle se compose d’abord de Suisses fournis par les cantons au roi de France en vertu de la Paix perpétuelle de 1516 ; mais elle comprend aussi depuis 1494 des lansquenets recrutés en Allemagne et qui servent de troupes de choc, efficaces seulement en rase campagne. Composée de piquiers (français), de hallebardiers (suisses et lansquenets) et de quelques arquebusiers (20 p. 100 des effectifs), auxquels se substituent les mousquetaires après 1559, cette infanterie combat essentiellement à l’arme blanche.