Tsiganes (suite)
La langue tsigane (romani, sintó, kaló, dans ses variantes selon les groupes), qui dérive directement du sanskrit, a longtemps paru suspecte, parce que non comprise, aux populations côtoyées par le Tsigane. Elle a fréquemment été interdite par des lois, et souvent les Tsiganes ont été interdits de séjour, refoulés aux frontières ou emprisonnés. Les relations entre Tsiganes et non-Tsiganes (Français ou autres) sont souvent tendues. Le gadjo (non-Tsigane) accuse le Tsigane d’être sale, voleur, de ne pas travailler, et il refuse de le reconnaître comme faisant partie d’une ethnie ayant sa propre culture. Il se fait du nomade, du Tsigane, une image fausse et défavorable, née d’une mauvaise connaissance acquise jour après jour par ouï-dire, stéréotype élaboré à partir de légendes populaires, de cinéma, de télévision, de lecture de la presse. Et son comportement envers le Tsigane découle de cette image fausse et stéréotypée qu’il s’en fait. De même, tous les gouvernements ont adopté une attitude hostile vis-à-vis des Tsiganes, et ce n’est que très récemment que quelques-uns sont devenus plus compréhensifs.
La société tsigane, soumise aujourd’hui à des pressions de plus en plus fortes, se voit imposer par la radio, la télévision, la scolarisation et l’action des travailleurs sociaux, des modèles culturels auxquels elle n’était pas préparée. Une institution aussi fondamentale que la kris chez les Rom est agitée de contradictions de plus en plus vives. Elle perd de son efficacité parce que beaucoup des valeurs traditionnelles sont remises en question, et parce que les problèmes à traiter ne sont plus du même ordre qu’il y a quelques années. La fonction de cohésion sociale lui est de plus en plus difficile à assumer et pour cette fonction, nécessaire à la survie du groupe social, la kris est relayée par un type nouveau d’institutions, notamment un Comité international Rom, fédération d’associations tsiganes nationales, qui prétend intervenir directement auprès des gouvernements et des organismes internationaux (Conseil de l’Europe, O. N. U...). Le passage de la kris à ces nouvelles institutions est synonyme d’une profonde réorganisation du groupe social, d’une véritable mutation.
Les Gitans
Le terme est souvent employé à tort, avec un sens péjoratif, pour désigner l’ensemble des Tsiganes.
Il est utilisé à juste titre pour désigner l’un des trois groupes tsiganes, celui des Kalé (en esp. Calé), disperses en Espagne, en Afrique du Nord et dans le sud de la France essentiellement. Les Kalé sont reconnaissables par leur langue, très influencée par les structures grammaticales espagnoles, et par leur musique et leur chant, flamenco* et cante jondo.
J.-P. L.
O. Gjerdman et E. Ljungberg, The Language of the Swedish Coppersmith Gypsy Johan Dimitri Taikon (Uppsala, 1963). / J.-P. Liégeois, les Tsiganes (Éd. du Seuil, coll. « Microcosme », 1971) ; Mutation tsigane, la révolution bohémienne (P. U. F., 1976). / F. de Vaux de Foletier, Mille Ans d’histoire des Tsiganes (Fayard, 1971). / K. Stoyanovitch, les Tsiganes. Leur ordre social (Rivière, 1974). / J.-P. Clébert, Tsiganes et Gitans (Éd. du Chêne, 1975).
On peut également consulter les revues Études tsiganes (Paris, 1955 et suiv.) et Journal of the Gypsy Lore Society (Liverpool, 1888 et suiv.).