Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Terre (suite)

L’observation de plus en plus précise des étoiles, comparée aux garde-temps autonomes de plus en plus réguliers (notamment aux horloges à quartz, puis atomiques), a permis de constater des irrégularités dans la rotation de la Terre. La plus simple est un ralentissement séculaire, c’est-à-dire lent et uniforme, qui fait diminuer la durée du jour sidéral de 0,001 64 s par siècle ; le retard pris de ce fait par l’horloge « Terre » sur un garde-temps physique croît donc comme le carré du temps, atteignant par exemple 50 mn en 10 siècles. Un écart de cet ordre n’est pas insensible quand on peut retrouver une indication d’heure même sommaire pour un phénomène astronomique du passé, comme une éclipse. Il y a ensuite des variations saisonnières, découvertes par N. Stoyko à l’Observatoire de Paris en 1937, et des variations irrégulières, imprévisibles. Ces irrégularités diverses ont obligé les astronomes à revoir la définition de l’heure et à la mettre en accord avec le temps atomique des physiciens, conservé par un certain nombre d’étalons dans le monde. En fait, l’heure diffusée par les signaux horaires du Bureau international de l’heure (B. I. H.) recevait des « coups de pouce », annoncés d’avance chaque fois que ce bureau le jugeait nécessaire, par exemple de 100 ou de 200 m/s. Depuis 1972, ces sauts sont toujours d’une seconde entière, de sorte que, sur les horloges mères des observatoires, on laisse s’écouler les secondes en changeant le nom de la série d’une unité à ce moment, exactement comme quand on ajoute un jour supplémentaire au mois de février dans le calendrier une année sur quatre ou quand, en 1582, on a fait succéder au 4 octobre le 15 octobre lors de la réforme grégorienne du calendrier, dans un but de rattrapage tout à fait analogue.

On connaît certaines causes des irrégularités de la rotation de la Terre : le ralentissement séculaire est dû au frottement des masses liquides sur le fond des océans lors des marées ; la variation saisonnière est liée au régime des vents ; enfin, un facteur périodique est le jeu des mouvements en déclinaison du Soleil et de la Lune, qui modifie la composante du moment d’inertie du globe sur son axe de rotation. Cet axe lui-même n’est pas fixe, et le pôle se déplace sur la surface physique du sol selon une trajectoire complexe, appelée polhodie, en partie prévisible par la théorie et qui comporte une oscillation périodique en un peu plus d’un an (période chandlerienne, du nom de Seth C. Chandler [1846-1913], qui a montré en 1891 l’existence d’une période de 428 jours), une oscillation annuelle, enfin une dérive le long du méridien de longitude + 60°. Le terme annuel fait décrire au pôle une ellipse de 0,15″ sur 0,18″ (soit moins de 5 m sur 6 m) ; la dérive, depuis 1900, se maintient à 0,003″ (soit 1 dm) par an. Un travail considérable et minutieusement organisé entre un certain nombre d’observatoires fondamentaux a permis d’obtenir, par un vaste programme de déterminations d’heure, de longitudes et de latitudes, une connaissance détaillée de toutes ces irrégularités.


La Terre dans l’espace

La Terre décrit autour du Soleil une orbite elliptique de faible excentricité (e = 0,016 7), qui se situe entre celle de Vénus à l’intérieur et celle de Mars à l’extérieur ; on peut représenter l’ensemble de façon approchée par trois cercles concentriques de, respectivement, 110, 150 et 230 . 106 km de rayon. C’est donc Vénus qui peut approcher le plus la Terre (40 . 106 km), tandis que la distance minimale de Mars est assez variable selon les oppositions, en raison de la forte excentricité de son orbite : elle peut varier de 55 à 100 . 106 km. La distance Terre-Soleil a une valeur moyenne voisine de 149,6 . 106 km, valeur que l’on a choisie comme l’unité astronomique de distance. Elle varie entre 147 . 106 km et 152 . 106 km, soit d’environ 1/60 de sa valeur. La Terre est accompagnée dans son mouvement de son seul satellite naturel, la Lune, gravitant autour d’elle en un peu plus de 27 jours à une distance moyenne de 384 400 km. Aussi, ce n’est pas le centre de la Terre qui décrit l’orbite autour du Soleil, mais le centre de gravité du système Terre-Lune. Le rapport des masses étant de 81 à 1, ce point se trouve à la fraction 1/82 de la distance des centres à partir de celui de la Terre, donc à 4 700 km, c’est-à-dire à quelque 1 680 km sous la surface du globe. Ce dernier décrit donc autour du Soleil une trajectoire bouclée autour de l’orbite képlérienne moyenne à raison de treize boucles de 4 700 km de demi-amplitude par an. Il est animé, en outre, d’un certain nombre de mouvements, dont les principaux sont les suivants. Tout d’abord, l’axe de rotation de la Terre, outre les petits déplacements déjà mentionnés, tourne en 25 800 ans autour du pôle de l’écliptique, c’est-à-dire de la normale au plan de l’orbite terrestre ; c’est la célèbre précession des équinoxes qui fait dériver en effet la ligne des équinoxes dans l’écliptique à raison de 50″ par an, découverte par Hipparque dès le iie s. av. J.-C. et qui est due à l’action combinée du Soleil et de la Lune sur le renflement équatorial du globe. Ce mouvement se complique d’un mouvement de boucles de 18,6 ans de période, constituant la nutation, dont le rythme est celui de la rotation du plan de l’orbite lunaire. La Terre est entraînée avec tout le système solaire par la vitesse de translation propre au Soleil dans la Galaxie, à 20 km/s et vers un point dit apex, qui se situe entre Hercule et la Lyre. Enfin, la rotation d’ensemble de la Galaxie se traduit au niveau du Soleil par une vitesse tangentielle d’environ 250 km/s, à laquelle la Terre participe encore, avec, en plus, la composante locale pour la région du Soleil ou vitesse particulière, qui est d’environ 16 km/s. Au-delà du système solaire, l’espace est constitué par le vide interstellaire, c’est-à-dire la matière extrêmement diluée, mais décelable jusqu’aux autres étoiles, dont les plus proches sont à 4 al ; on en connaît sept à moins de 10 al, soit 1014 km.

J. D., P. M. et E. S.