Stanislas Ier Leszczyński (suite)
« [...] roi de Pologne toujours élu et toujours détrôné »
Après 1725, le mariage de sa fille Marie avec le jeune Louis XV améliore sa position. Installé à Chambord, doté d’une modeste pension, Leszczyński reçoit l’appui des riches Potocki, qui rallient autour de son nom tous ceux qui rêvent d’un « Piast » par haine du roi saxon. À la mort d’Auguste II (1733), le soutien de la France achève de faire de lui le champion de l’indépendance nationale. Leszczyński traverse l’Allemagne sous un déguisement pour être élu dans l’enthousiasme le 12 septembre 1733. Trois semaines plus tard, une armée russe le chasse au profit d’Auguste III et l’assiège dans Dantzig : une guerre européenne commence. Les 2 000 hommes envoyés enfin par la France ne peuvent débloquer Stanislas : celui-ci s’évade déguisé en paysan, mais il refuse de prendre la tête de la guérilla menée par ses partisans confédérés et, de Königsberg, il revient en France. La diplomatie française l’oblige à abdiquer (26 janv. 1736) et à se contenter du titre de roi et d’une souveraineté nominale sur Bar et la Lorraine* (traité de Vienne, 1738).
Épilogue en légende dorée : la cour de Lorraine
À plus de soixante ans, le roi-duc en retraite commence la carrière qui va assurer sa gloire. Méfiants à son arrivée, ses sujets lorrains ne tardent pas à célébrer les mérites du « duc bienfaisant », qui, malgré des moyens modestes, fonde un grand nombre de collèges, d’hôpitaux, de greniers d’abondance et d’établissement philanthropiques tout en embellissant Lunéville, où il réside, Commercy et surtout Nancy*, qu’il dote d’un des plus beaux ensembles architectoniques du xviiie s. (sur les plans de E. Héré). Stanislas, dont les écrits devaient être réunis en 1763 sous le titre d’Œuvres du philosophe bienfaisant, reçoit à sa cour de Lunéville Montesquieu, et Voltaire y trouve refuge en 1748. Celui-ci encensera longtemps le « meilleur des rois » avant de brocarder le « père Stanislas » par trop soumis au jésuite Joseph de Menoux. L’essentiel des activités littéraires et philosophiques du roi Stanislas gravite autour de l’anarchie de son pays et des moyens d’y remédier. Son œuvre principale, la Voix libre du citoyen (1749), qui aura un grand retentissement en Pologne, propose à ses compatriotes de courageuses réformes (abolition du liberum veto, réorganisation militaire, émancipation des serfs). L’Academia Stanislai, fondée à Nancy, et l’école militaire de Lunéville forment un grand nombre de jeunes patriotes polonais.
Le somptueux mausolée sculpté par L. C. Vassé en l’église Notre-Dame-du-Bon-Secours de Nancy comme la statue colossale par G. Jacquot, érigée en 1831 sur la place Stanislas, célèbrent cette belle « période lorraine » de l’éphémère roi de Pologne, dont l’ambition contribua à ruiner son pays.
C. G.
➙ Lorraine / Nancy / Pologne.
J. Feldman, Stanislaw Leszczynski (en polonais, Wrocław, 1948 ; nouv. éd., Varsovie, 1959). / M. Garçot, Stanislas Leszczynski (Berger-Levrault, 1953). / M. Langrod, la Philosophe politique du roi Stanislas (P. U. F., 1956). / G. Doscot, Stanislas Leszczynski et la Cour de Lorraine (Rencontre, Lausanne, 1969).