Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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spectromètres et spectrographes (suite)

Propriétés des spectrographes

Le schéma de principe des spectrographes est indiqué sur la figure 1. F est la fente d’entrée placée au foyer de l’objectif C, appelé collimateur ; D représente le disperseur, à savoir un réseau ou bien un ou plusieurs prismes ; O est l’objectif de chambre, dans le plan focal duquel on place une plaque photographique. Si la fente source est infiniment fine, son image sur la plaque a une certaine largeur, due à la diffraction provoquée par les dimensions finies du disperseur. Il en résulte que, si dans le spectre de la source existent deux longueurs voisines λ et λ + Δλ de même intensité, on obtient sur la plaque deux images de la fente d’entrée, et, pour séparer ces deux longueurs d’onde, il faut que la distance des deux images soit supérieure ou égale à la largeur de la tache de diffraction. Si est la dispersion angulaire, la distance angulaire des deux images est la largeur de la tache de diffraction est égale à (a étant la largeur de l’onde émergeant du disperseur) ; les deux raies seront séparées si le pouvoir de résolution est alors égal à

On conçoit que ce pouvoir de résolution est théorique, car, si la fente d’entrée est infiniment fine, il ne rentrera dans l’appareil pratiquement aucune énergie et la luminosité sera très faible. On est donc conduit à élargir cette fente, ce qui entraîne un élargissement de l’image de la fente d’entrée, donc une diminution de la résolution. Par contre, si l’on élargit la fente d’entrée, le flux entrant dans l’appareil augmente proportionnellement à la largeur de la fente ; il en va de même du flux tombant sur la plaque photographique et de la surface de l’image de la fente. Il en résulte que l’éclairement de l’image, rapport du flux à la surface, tendra vers une constante E0, qui est l’éclairement obtenu lorsque la fente d’entrée est très large. La figure 2 représente l’évolution de l’éclairement E et de la résolution R en fonction de la largeur de la fente source. On voit, sur cette figure, que l’on n’a pas intérêt à augmenter énormément la largeur de la fente, car, sans gagner sur l’éclairement, donc sur la luminosité de l’appareil, on perd beaucoup en résolution. Le meilleur compromis est obtenu lorsque la largeur de l’image de la fente est égale à la largeur de la tache de diffraction. On obtient dans ces conditions
R = 0,78 R0
et un éclairement E = 0,82 E0.

Jusqu’à présent, nous n’avons pas tenu compte de l’émulsion photographique, qui, d’une image quasi ponctuelle, donne une image de largeur moyenne g, qui, suivant les émulsions, varie entre 10 et 50 μ. Toute image de diamètre inférieur à g se traduira, après développement de la plaque, par une tache de diamètre supérieur ou égal à g. Il ne servirait donc apparemment à rien que la largeur de la figure de diffraction soit inférieure à g, donc que la focale f de l’objectif de chambre soit inférieure au rapport Une application numérique dans laquelle on prendrait g = 20 μ, λ = 0,5 μ et a = 10 cm nous conduirait à prendre un objectif de chambre de focale égale à 4 m ; c’est là une focale très grande, qui entraîne des inconvénients importants au niveau de l’encombrement de l’appareil et de sa stabilité ; d’autre part, l’ouverture égale à donnera un éclairement très faible de l’image de la fente d’entrée. Compte tenu de ces considérations, on prendra dans les montages courants une focale f pour l’objectif de chambre telle que la tache de diffraction soit plus petite que g, si bien que c’est la valeur de g qui déterminera le pouvoir de résolution maximal du spectrographe. On peut montrer que, dans ces conditions, l’éclairement est proportionnel au carré de l’ouverture de l’objectif de chambre et que la résolution est inversement proportionnelle à cette ouverture. C’est là un des caractères fondamentaux des spectrographes ; le produit L × R2 (L = luminosité du spectrographe) ne dépend que des caractéristiques du disperseur et de la plaque photographique. Dans le cas où le disperseur est un prisme utilisé au minimum de déviation, e étant l’épaisseur de la base du prisme et la dérivée de l’indice par rapport à la longueur d’onde. Le choix de la substance du prisme est fait de telle sorte que soit le plus grand possible tout en ayant un prisme de bonne transparence. Dans le visible et dans l’ultraviolet, on utilise le flint, qui est transparent jusqu’à 3 500 Å ; pour les longueurs d’onde plus faibles, on se sert du quartz, transparent jusqu’à 2 000 Å, mais qui présente l’inconvénient d’être biréfringent et surtout d’être quatre fois moins dispersif que le flint ; on utilise également la fluorine CaF2, transparente jusqu’à 1 250 Å, et le fluorure de lithium, transparent jusqu’à 1 050 Å. La limitation vers les grandes longueurs d’onde (de l’ordre du micron) est le fait de la sensibilité spectrale des plaques photographiques. L’angle des prismes n’excède jamais 70°, afin de perdre le moins de lumière possible sur la face d’entrée ; en effet, plus l’angle est grand et plus l’incidence sur cette face d’entrée doit être grande ; or, le pouvoir réflecteur augmente avec l’incidence. Les dimensions d’un prisme n’excèdent pas 10 cm à cause de l’absorption à l’intérieur et aussi de la difficulté d’obtenir de grands volumes de matière suffisamment homogène. On tourne cette difficulté en utilisant des trains de prismes (jusqu’à 3 prismes). Quant à l’objectif de chambre, son ouverture, qui régit la luminosité, est comprise entre et on est limité dans l’augmentation de cette ouverture par la correction des aberrations géométriques. Dans le cas où le disperseur est un réseau, le pouvoir de résolution est R0 = k × N, où k est l’ordre d’interférence et N le nombre total de traits du réseau. Les réseaux par réflexion recouverts d’une couche mince d’aluminium peuvent être utilisés jusqu’à 2 000 Å. De 1 000 à 2 000 Å, pour avoir un facteur de réflexion suffisant, on protège la couche d’aluminium par du fluorure de magnésium. Entre 500 et 1 000 Å, le réseau est gravé sur une couche de platine. Au-dessous de 500 Å, on utilise un réseau concave sous incidence rasante. Un montage très répandu est indiqué sur la figure 3.