Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
S

spectrographie de masse (suite)

• La chambre d’ionisation. On y arrache des électrons aux atomes de l’échantillon de matière étudié, les transformant ainsi en ions positifs, ayant à peu près la même masse m que l’atome, mais portant une charge électrique q = ne égale à une fois ou à plusieurs fois la charge élémentaire e. Cette transformation est obtenue, par exemple, en soumettant les atomes d’une vapeur à basse pression aux chocs des électrons émis par un canon à électrons ; quand il s’agit de matériaux plus réfractaires, on les colle sur une électrode à partir de laquelle on fait éclater un arc électrique.

La chambre d’ionisation communique par un petit orifice avec une enceinte étanche, où des pompes entretiennent un vide assez poussé (pression résiduelle très inférieure au millionième de millimètre de mercure) pour que les ions puissent y circuler sans rencontrer d’obstacle. On trouve dans cette enceinte : une électrode extractrice, un champ magnétique et un collecteur d’ions.

• L’électrode extractrice. Elle est portée à un potentiel négatif – V par rapport à la chambre d’ionisation. Elle attire les ions positifs qui se présentent à l’orifice de la chambre et leur communique ainsi une énergie cinétique

c’est-à-dire une vitesse

(en admettant que leur vitesse initiale à la sortie de la chambre est assez faible et peut être négligée). Cette électrode est elle-même trouée en sorte qu’un grand nombre d’ions la traversent et continuent ensuite une trajectoire en ligne droite avec la vitesse v.

• Le champ magnétique . Il est créé par un électro-aimant dont les pièces polaires nord et sud sont plaquées de chaque côté de l’enceinte à vide aplatie. Il est perpendiculaire à la vitesse  acquise par les ions après traversée de l’électrode extractrice. La force magnétique est perpendiculaire à la fois à et à et, sous son action, les ions décrivent des arcs de cercle de rayon

Les ions légers sont donc plus fortement déviés que les ions lourds, et leurs trajectoires se trouvent séparées. En fait, la déviation dépend du rapport et un ion une fois ionise (n = 1) a la même trajectoire qu’un ion de masse double, mais deux fois ionisé (n = 2) ; cela oblige à une certaine prudence dans l’interprétation des mesures.

• Le collecteur d’ions. S’il s’agit d’un appareil d’analyse, le collecteur est un fil métallique tendu dans l’enceinte parallèlement au champ magnétique  ; les ions ayant la bonne valeur de heurtent ce fil et redeviennent atomes neutres en captant un ou plusieurs des électrons libres qu’il renferme. Le fil métallique se comporte alors comme la source d’un courant électrique ; en mesurant l’intensité I de ce courant, on mesure le nombre d’ions qui ont heurté le fil. S’il s’agit d’un appareil de production, le collecteur est une petite boîte métallique placée derrière une fente fine parallèle au champ magnétique  : seuls peuvent passer à travers la fente les ions qui ont subi la déviation correspondant à la bonne valeur de la boîte doit être refroidie à très basse température pour que les atomes ainsi récoltés restent collés sur sa paroi et n’en ressortent pas.

Les spectrographes de masse d’analyse sont utilisés dans un très grand nombre d’études physico-chimiques et sont employés industriellement pour le contrôle et la détection des fuites dans les enceintes à vide (on détecte le gaz hélium).

En production, ils servent à séparer les différents isotopes d’un même élément : les échantillons isotopiques obtenus peuvent être d’une très grande pureté (proportion des autres isotopes inférieure au millième, voire au dix-millième). Aucune autre technique ne permet d’obtenir d’aussi bonnes puretés, nécessaires aux études de laboratoires. Mais le débit des spectrographes de masse est relativement faible ; c’est pourquoi on utilise d’autres techniques pour réaliser industriellement la séparation isotopique de l’uranium, qui ne nécessite pas une très grande pureté (diffusion gazeuse ou ultracentrifugation).

B. C.

 A. J. B. Robertson, Mass Spectrometry (Londres, 1954). / H. E. Duckworth, Mass Spectroscopy (Cambridge, 1958).

spectromètres et spectrographes

Instruments permettant de déterminer la luminance d’une source ou l’absorption d’une substance en fonction de la longueur d’onde des radiations lumineuses.



Introduction

La spectroscopie, qui représente d’une façon très générale l’ensemble des techniques d’analyse des radiations, a fait l’objet, durant ces vingt dernières années, de très nombreuses réalisations en utilisant des principes et des méthodes très différents de ceux qui régissent les appareils classiques à prismes et à réseaux. Les spectrographes et les spectromètres ne diffèrent que par le récepteur utilisé pour analyser le spectre fourni par des disperseurs tels que les prismes, les réseaux, les interféromètres à deux ondes ou à ondes multiples. Dans les premiers cités, le récepteur est un récepteur d’images (tel qu’une plaque photographique) dont la réponse est une fonction de l’éclairement lumineux. Dans les seconds, c’est un récepteur de flux lumineux (tel qu’une cellule photoélectrique) dont la réponse est une fonction du flux lumineux reçu. On peut rappeler que, si Φ est le flux lumineux tombant sur une petite surface d’aire S, l’éclairement de cette surface est

Le but de la spectroscopie est d’analyser avec la plus grande précision possible la luminance d’une source ou l’absorption d’une substance dans le temps le plus court possible. Cela exige donc de la part de ces appareils d’analyse un certain nombre de qualités ; il faut, notamment, que ceux-ci puissent séparer deux raies très voisines dont les longueurs d’onde diffèrent de Δλ ; cette aptitude à séparer deux raies voisines sera caractérisé par le pouvoir de résolution plus les deux raies sont voisines, c’est-à-dire plus Δλ est petit, plus le pouvoir de résolution de l’appareil devra être grand. Il faut, également, que ces appareils puissent analyser des raies très peu intenses ; cette aptitude sera caractérisée par la luminosité, proportionnelle à l’éclairement de la plaque photographique dans le cas des spectrographes et proportionnelle au flux lumineux tombant sur le récepteur dans le cas des spectromètres. Dans ces appareils, comme dans tout appareil de mesure, le signal est toujours accompagné d’un bruit ; suivant la méthode utilisée en spectroscopie, le bruit prédominant est dû soit au rayonnement lui-même, soit au récepteur ; on s’attachera à obtenir un rapport signal sur bruit maximal. Mais, en général, pour une méthode donnée, la résolution, la luminosité, le temps de mesure, le rapport signal sur bruit ne sont pas indépendants, si bien que l’on ne peut pas gagner sur un de ces facteurs sans perdre sur les autres. P. Jacquinot a montré que la quantité W =  (ou R est la résolution, M le nombre de longueurs d’onde que l’on veut analyser, T le temps que dure l’analyse, L la luminance de la source et α un exposant qui prend la valeur 1 si le bruit est dû au rayonnement et la valeur 2 s’il est dû au récepteur), quantité appelée facteur de mérite de l’appareil, garde dans la plupart des méthodes une valeur constante si le rapport signal sur bruit reste constant. Nous allons voir maintenant les compromis obtenus dans les différentes méthodes de spectrographie et de spectrométrie.