Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
S

sionisme (suite)

Après l’échec des conférences de la table ronde et le rejet, par les sionistes, de plusieurs plans, les Anglais confient à l’O. N. U. le soin de trouver un arrangement. On admet que l’Agence juive soit représentée à la réunion extraordinaire de l’Assemblée générale de l’O. N. U. à Lake-Success (État de New York), le 15 mai 1947. On y crée l’UNSCOP (United Nations Special Comittee on Palestine), qui publie son rapport en août. Pendant les travaux de la commission, une trêve est observée et ses membres sont témoins, à Haïfa, des incidents qui marquent l’arrivée de l’Exodus. L’UNSCOP demande la fin, du mandat, la création de deux États indépendants liés par des relations économiques et un régime spécial de contrôle de l’O. N. U. pour Jérusalem. Ce projet emporte une grosse majorité des suffrages et est accueilli favorablement par les Juifs, tandis que les Arabes le repoussent.

Le 16 décembre, à la deuxième session de l’Assemblée générale, à Flushing Meadow Park (New York), le ministre britannique des Colonies annonce qu’il renoncera au mandat et retirera en 1948 son personnel civil et militaire. Les Russes conseillent le partage, et les Américains adoptent les conclusions de l’UNSCOP. Lors du vote du 29 novembre 1947, la majorité requise des deux tiers est dépassée (33 voix contre 13 et 10 abstentions) ; les États-Unis, l’U. R. S. S., la France et les États de l’Amérique latine votent pour le partage. Les deux États de Palestine doivent accéder à la souveraineté deux mois après la fin du mandat et l’évacuation des Britanniques fixée au 1er août 1948. Une commission de cinq membres de l’O. N. U. assurera l’ordre et préparera le partage. Les Arabes répondent par la grève générale et la guérilla.

La Haganah, mal armée, a à faire face aux attaques des Arabes sur les colonies et les convois. Les Britanniques, neutres en apparence, aident les Arabes et refusent même d’assurer la sécurité de la commission de l’O. N. U., arrivée le 3 mars 1948. Les milieux militaires et industriels américains, opposés à l’établissement de l’État juif et dominés par la crainte de la présence soviétique au Moyen-Orient, font demander par leur ambassadeur, Warren Austin (1877-1962), le 19 mars 1948, un régime provisoire de tutelle en même temps qu’une suspension de la mise en œuvre du partage. L’O. N. U. ayant refusé, Truman recule, malgré les pressions des pétroliers. Le roi Abdullah a passé des accords avec l’Iraq, la Syrie et le Liban afin d’avoir les mains libres en Palestine. La Légion arabe attaque au nord du pays. La Haganah, qui veut s’emparer de la zone prévue pour l’État juif ainsi que de tous les autres territoires où il y a des établissements juifs, libère Tibériade, Haïfa et la Haute-Galilée. Le 1er mai, pendant que les armées des États arabes entrent en lice, le gouvernement de la Palestine cesse ses fonctions, ce qui crée un énorme chaos. Cependant, les Juifs font fonctionner un rudiment d’État juif ; il y a, en effet, depuis mars une assemblée, dont l’Exécutif deviendra plus tard le cabinet de Ben Gourion. Cette assemblée choisit le nom officiel de l’État et annonce qu’après la fin du mandat le gouvernement juif entrera en fonctions. Les succès militaires de la Haganah font monter la cote d’Israël à Lake Success, où l’on sait que le congrès sioniste a décidé que l’État sera proclamé le 14 mai.

Le Haut Comité arabe exhorte les Arabes de Palestine à quitter le pays. Les réfugiés gagnent alors la Transjordanie, où on les concentre dans des camps. Ils deviendront des épaves à la charge de l’O. N. U.

Dès le 1er mai 1948, une administration juive est mise en place. À l’O. N. U., les projets de tutelle le disputent à ceux du partage. Les Arabes préparent leur invasion. Finalement, dans un climat d’intrigues et de projets dilatoires, les Britanniques annoncent, le 13 mai, la fin du mandat. La Légion arabe occupe Jéricho et Ramallah ainsi que la vieille ville de Jérusalem, tandis que les Syriens, repoussés de Haute-Galilée, s’emparent de Michmar ha-Yarden.

Le vendredi 14 mai, les Britanniques se trouvent tous concentrés dans la poche d’évacuation et quittent Jérusalem. À Tel-Aviv, le gouvernement provisoire juif prépare la proclamation de l’État d’Israël, qui est lue et radiodiffusée dans le courant de l’après-midi (v. Israël).

La question s’est posée, dès lors, de savoir si les sionistes, dont l’action était couronnée par l’existence de l’État d’Israël, avaient encore un rôle à jouer, et si les Juifs de la Diaspora pouvaient s’immiscer dans les affaires de cet État. Celui-ci avait besoin du soutien des Juifs du monde entier ; mais il était difficile de définir les relations nouvelles entre le sionisme, la Diaspora et la nouvelle entité israélienne. Les fonctions de chacun et leur champ d’application furent discutés, dès avril 1948, par le Comité d’action sioniste. Il y eut des pourparlers entre le gouvernement israélien et l’Agence juive : le Parlement vota la loi du statut de l’Organisation sioniste en novembre 1952.

Le 26 juillet 1954, un règlement détermina les modalités de la coopération. L’Agence juive, dotée d’une personnalité juridique et exemptée de certaines taxes, serait l’organisme chargé de l’immigration, à l’étranger, et du transfert en Israël des immigrants et de leurs biens ; elle aiderait à leur absorption, s’occuperait de l’immigration des jeunes, des établissements agricoles, de l’achat et de l’amélioration du sol par l’entremise de ses organisations foncières, Keren Kayemet et Keren ha-Yesod ; elle participerait à l’expansion, encouragerait l’investissement en Israël des capitaux privés, aiderait les entreprises culturelles et éducatives, financerait, avec des ressources trouvées par elle-même, ses propres activités et, par un comité bipartite de coordination avec le gouvernement, donnerait son avis sur les projets de loi la concernant elle-même.

Si David Ben Gourion avait été assez peu favorable au sionisme de la Diaspora, qu’il comparait à un échafaudage qui n’a d’utilité que pendant la construction, son successeur, Levi Eshkol (1895-1969), en fut l’apôtre. Une déclaration de mars 1964 promit solennellement l’assistance de l’État pour faire mener à bien le programme d’action de l’Organisation sioniste.

E. G.

➙ Herzl (Theodor) / Israël / Palestine.