Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
S

Sienkiewicz (Henryk) (suite)

En 1886, Sienkiewicz entreprend un nouveau voyage en Turquie, en Grèce et en Italie, puis, deux ans plus tard, en Belgique, en Espagne et en France. Les courants réalistes et psychologiques européens marquent alors ses deux romans de mœurs contemporaines : Sans dogme (1891) et la Famille Połaniecki (1895). D’autres voyages encore : Biarritz, l’Italie, l’Afrique, où il écrit ses Lettres de l’Afrique (1892) et d’où, tombé malade, il doit revenir dans son pays.

En 1896, Quo vadis, récit historique sur les premiers temps du christianisme dans l’Empire romain, lui apporte une réputation universelle. Son dernier roman, les Chevaliers Teutoniques (1900), développement d’un épisode des guerres menées depuis des siècles avec la Prusse, constituera une sorte de prologue à sa grande trilogie.

Dès lors, Sienkiewicz écrit peu : il participe activement à la vie sociale et politique de son pays et lutte contre la germanisation de la Posnanie. En 1900, il reçoit, en don national, la résidence d’Oblęgorek, près de Kielce ; le prix Nobel le couronne en 1905.

La Première Guerre mondiale le surprend en Suisse : avec Ignacy Paderewski (1860-1941), il forme le Comité pour les victimes de guerre en Pologne, mais il meurt bientôt à Vevey. Ses cendres seront ramenées solennellement à Varsovie en 1924.

K. S.

 M. Kosko, la Fortune de « Quo Vadis ? » de Sienkiewicz en France (Champion, 1935 ; 2e éd. Un best-seller de 1900, « Quo Vadis ? », Corti, 1961). / A. Stawar, l’Œuvre de Henryk Sienkiewicz (en pol., Varsovie, 1960). / J. Krzyanowski, la Vie de Henryk Sienkiewicz (en pol., Varsovie, 1968).

Sienne

En ital. Siena, v. d’Italie, en Toscane, au sud de Florence ; 66 000 hab. (Siennois).



L’histoire


La naissance de la commune

Centre étrusque (Sena Etruriae), colonie romaine (Sena Iulia) érigée par Auguste, Sienne doit ensuite son importance à l’insécurité que les musulmans font régner le long du littoral à la suite des invasions barbares. Pèlerins, prélats et fonctionnaires de l’Europe du Nord et du Nord-Ouest renoncent alors, pour se rendre à Rome, à emprunter la Via Aurelia dans son tracé méridional au sud de Pise. Ils bifurquent vers Sienne, où convergent également deux autres routes de première importance : d’une part, la Via Francigena, qui traverse Nevers, Lyon, le Mont-Cenis, Gênes et Lucques ; d’autre part, la route qui, depuis Bologne et par le col de la Futa et Florence, capte le trafic de la Via Emilia ainsi que celui qui provient de Venise.

Sienne, devenue le siège d’un évêché et la résidence d’un gastald lombard au viiie s., puis d’un comte franc au ixe s., est gouvernée au xie s. par le comte impérial et par l’évêque, ce dernier recevant même de l’empereur germanique Henri III (1039-1056) la souveraineté sur la ville vers 1053-1056. Mais, au xiie s., celle-ci se constitue en commune. La ville est gouvernée par des consuls à partir de 1125 (on en comptera trois, dont un du peuple au milieu du xiie s.), puis par un podestat après 1199.

Partant alors à la conquête du diocèse, ou « contado », elle fait réduire tour à tour, par les milices urbaines, les châteaux des grandes familles féodales qui en contrôlaient une partie (Ardengheschi, Pannochieschi, Aldobrandeschi, etc.) et, dans le même dessein, elle assujettit les petites villes telles que Montalcino, Grosseto, qui domine la Maremme toscane, Radicofani, dont les passes contrôlent la route de Rome, Montepulciano, à l’entrée du Val di Chiana. Mais elle ne parvient presque jamais à contrôler Poggibonsi, à 25 km au nord sur la route de Florence, cité guelfe dont les milices établies dans cette agglomération menacent ainsi directement sa propre banlieue et l’obligent, pour se couvrir, à fortifier Monteriggioni et à se déclarer gibeline, donc à adhérer au parti impérial pour mieux résister aux ambitions de sa voisine.


Les compagnies siennoises du xiiie s.

Une telle attitude n’empêche pas Sienne de nouer des liens étroits avec la Cour pontificale, à laquelle ses marchands prêtent des fonds et procurent de nombreux produits. Ces marchands, qui sont organisés en « compagnies » associant nobles et non nobles (popolani), entretiennent des représentants permanents aux foires de Champagne. Depuis le début du xiiie s., ils y achètent les draps français et flamands qu’ils commercialisent ensuite à Sienne ; en même temps, ils s’y font rembourser des prêts consentis sur place et dont le paiement est stipulé en une monnaie autre que celle qui est reçue, l’opération étant facilitée par l’achat à Sienne de monnaies françaises, notamment de provinois à remettre en foire, ainsi que par la mise en place d’un système de courriers partant à jour fixe et assurant une circulation rapide de l’information entre le siège et la succursale des compagnies bancaires de la ville. De taille moyenne, la compagnie de Gallerani établit des représentants permanents à Paris et à Londres ; dès le début du xiiie s., les Piccolomini trafiquent en Champagne et en Angleterre (grande exportation de laine) ; de 1230 à 1280, les Salimbeni, grands propriétaires fonciers, occupent une très forte position internationale, et l’un deux, Salimbene Salimbeni, est assez riche pour prêter 100 000 florins à sa patrie alors en guerre contre Florence ; connus depuis 1121, les Tolomei ont des activités importantes au xiiie s. tant en Angleterre qu’en Champagne ; enfin, les Buonsignori, dont la compagnie, créée en 1209, possède des succursales à Paris, à Rome, à Genève, à Marseille et en Champagne, s’identifient tellement à la prospérité de Sienne que leur ruine au profit des Florentins entraîne celle de leur ville au profit de sa rivale après 1298.


De l’apogée au déclin (1260-1399)

Jusqu’à l’étonnante victoire remportée à Montaperti en 1260 sur Florence, qui perd alors son carroccio au cours du combat, Sienne a disposé des moyens financiers nécessaires tant pour peupler les collines environnantes (50 000 hab. sur 165 ha), sur lesquelles les ordres mendiants édifient leurs églises, que pour financer le paiement de nombreux mercenaires (plusieurs centaines en 1229-1231) ou celui de nombreux artistes.