Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

Atlantique (océan) (suite)

L’Atlantique est le plus salé des océans (37,5 p. 1 000). C’est là un trait essentiel de l’océanographie mondiale qui peut paraître paradoxal si l’on compare sa capacité restreinte et l’extension des régions drainées. Une telle anomalie s’explique par l’arrivée d’eau méditerranéenne à forte salinité et par le fait que l’eau puisée par l’évaporation est exportée au-delà des limites des bassins fluviaux affluents. Sauf pour les plates-formes situées devant les grands fleuves, les variations de la salinité de surface demeurent faibles. C’est dans les régions anticycloniques soumises à une forte évaporation que l’on rencontre les eaux les plus salées. Par contre, les pluies et les abondants apports fluviaux de la zone équatoriale favorisent la formation d’une eau peu salée (moins de 35 p. 1 000). Un second minimum, beaucoup plus marqué, apparaît dans les moyennes et hautes latitudes, où l’évaporation est faible et les précipitations copieuses (dans le bassin polaire, la salinité peut descendre très en dessous de 30 p. 1 000). En profondeur, les eaux ont des salinités faibles et constantes (entre 34,6 et 34,9 p. 1 000), identiques à celles des zones froides, dont elles proviennent.

• Les courants. Les caractéristiques des masses d’eau traduisent leur déplacement vers les basses latitudes le long de l’Afrique et un mouvement en sens inverse en bordure de l’Amérique. Une telle circulation, directement calquée sur celle des vents et influencée localement par la forme du vase océanique et par l’augmentation de l’effet de la force de Coriolis avec la latitude, adopte une disposition simple autour de deux cellules, dont la plus importante est située dans notre hémisphère : une masse d’eau chaude à grande vitesse est poussée vers l’Europe par les vents d’ouest (Gulf Stream, dérive nord-atlantique), d’où une partie des eaux revient vers les tropiques, puis de nouveau vers l’ouest sous l’impulsion des alizés. Les deux cellules atlantiques sont séparées par un contre-courant équatorial dirigé vers l’est.

En haute mer, ce schéma d’ensemble ne peut être perturbé par les courants de marée, qui sont encore faibles, puisque l’onde y a une amplitude inférieure à 1 m et même à 0,20 m devant le Brésil du Sud et Porto Rico. Par contre, ces courants dominent sur les marges précontinentales, principalement dans les détroits, derrière les îles et dans le fond des grandes baies.

L’Atlantique est perturbé par des tempêtes de deux types. Les unes sont engendrées dans les régions subpolaires, dans le lit des dépressions migrant vers l’est ; les plus fortes sont celles de l’hémisphère Sud, dont les houles se propagent jusque dans le golfe de Guinée. Les autres tempêtes se développent en fin d’été devant les côtes nord-américaines, lors des passages des ouragans.

En profondeur, la circulation est conditionnée par l’enfoncement des eaux denses (arctiques et antarctiques) au contact des fronts hydrologiques polaires. Il en résulte une stratification de masses d’eau progressant en des directions opposées. Certaines viennent du sud. C’est d’abord l’eau antarctique intermédiaire, lourde, car froide, qui chemine sous les eaux tempérées, puis tropicales jusque vers 20° N. C’est ensuite l’eau antarctique de fond, lourde, car salée, formée en mer de Weddell, dont la plus grande part emprunte les bassins occidentaux jusqu’au sud de Terre-Neuve ; elle pénètre dans l’Atlantique oriental à la faveur des brèches de la dorsale, comme la fosse de la Romanche. Une branche secondaire s’écoulant vers l’Afrique australe voit sa progression bloquée par la dorsale de Walvis. En sens inverse s’écoule l’eau arctique de fond, refroidie lors des rudes hivers de la mer de Norvège et qui déborde au-dessus du seuil Écosse-Groenland pour lentement se répandre jusqu’à l’Antarctide. Au sud du Groenland, l’eau arctique intermédiaire vient se glisser vers 2 000-3 000 m sous son homologue antarctique ; passé 40° S., elle remonte vers la surface et est alors dénommée « eau antarctique circumpolaire ».

Comparé aux autres océans, où les migrations profondes demeurent toujours embryonnaires, l’Atlantique se caractérise par un actif échange en latitude. Cette originalité a une double cause : il est le seul océan où les eaux arctiques ont largement accès ; il présente la particularité unique de voir affluer vers l’hémisphère Nord des eaux australes provoquant un mouvement compensatoire profond dirigé vers le sud. En conséquence, les eaux profondes sont plus riches en oxygène et en produits nutritifs. Si un tel processus de renouvellement n’est pas égal pour tous les bassins atlantiques, puisqu’on a signalé des régions où les eaux demeurent confinées (comme dans la fosse de Cariaco, au nord du Venezuela), cela n’affecte en rien l’ampleur d’une circulation qui confère à l’Atlantique un rôle essentiel dans la balance hydrologique de l’océan mondial.

• La vie atlantique. C’est dans les eaux superficielles, et particulièrement celles des plates-formes continentales, que les phénomènes vitaux connaissent leur plus grand développement, grâce à la pénétration des radiations solaires (permettant la fonction chlorophyllienne) et à l’arrivée de substances nécessaires à la vie. Pour certaines régions de l’Atlantique, comme au large de la Norvège, on a pu mettre en relation la richesse de la pêche et le total des précipitations, la chute des particules entraînées vers la mer étant ralentie par la stratification favorable des eaux.

La vie aquatique revêt deux formes essentielles : ce sont d’une part des champs d’algues, qui peuvent vivre jusqu’à plusieurs dizaines de mètres (50 m dans la Manche, mais plus de 180 m dans les eaux plus claires, comme celles de la Méditerranée) ; d’autre part, du plancton forme de véritables prairies flottantes, très abondantes dans les eaux froides, au voisinage des fronts polaires. Les poissons pélagiques qui fréquentent ces eaux sont soumis à des migrations conditionnées par la densité planctonique et les multiples nuances dans la répartition des températures.