Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
S

séparation des Églises et de l’État (loi de) (suite)

Il faut dire que la séparation de l’Église et de l’État est depuis longtemps un thème électoral du parti républicain : en 1903, 237 députés ont voté contre le budget des Cultes ; en juin de cette même année, une commission de 33 membres, favorable à la séparation, a été élue : son rapporteur, Aristide Briand*, est prêt en juillet 1904 à présenter aux Chambres un texte libéral qui est le sien.


La loi et son application

Mais le ministère Combes est aux prises à une violente opposition qui l’oblige à démissionner le 18 janvier 1905. Dans le cabinet Rouvier, qui lui succède le 24 janvier, le ministre des Cultes est Jean-Baptiste Bienvenu-Martin, qui laisse Briand présenter son projet de séparation : celui-ci est discuté à la Chambre de mars à juillet 1905. Pour Briand, militant socialiste pressé d’en finir, « les réformes sociales ne seront pas possibles tant que les querelles religieuses n’auront pas cessé ; les querelles religieuses ne cesseront que si les catholiques acceptent la séparation ; et les catholiques n’accepteront la séparation que si elle n’est pas braquée sur l’Église comme un revolver ». D’autre part, Briand espère ainsi enlever à ses adversaires radicaux le principal aliment à leur anticléricalisme.

La loi de séparation, votée par la Chambre (3 juill.) et le Sénat (6 déc.), est promulguée le 9 décembre 1905. Elle assure la liberté de conscience et la liberté des cultes en France, mais rompt le concordat de 1801. Désormais, la République « ne reconnaît » ni « ne salarie aucun culte ». Après quatre années durant lesquelles les ministres des cultes seront indemnisés, toute subvention leur sera retirée. La loi attribue les biens ecclésiastiques à des associations cultuelles, organismes composés en majorité de laïques et qui tiennent leur capacité de la loi civile de 1901, sans préciser qu’elles ne pourront être formées en dehors de l’autorité épiscopale.

De graves difficultés vont naître du fait que cette loi importante a été votée sans négociation avec le Vatican (la rupture entre Rome et Paris étant d’ailleurs antérieure). Pie X, par l’encyclique Vehementer (11 févr. 1906), condamne le principe de la séparation comme brisant l’« harmonieuse concorde établie entre la société religieuse et la société civile ». Mais ce n’est là qu’un document général. Or, voici que les inventaires des biens d’Église — prévus par la loi du 9 décembre 1905 — provoquent des troubles violents, voire sanglants : le 6 mars 1906, à Boeschepe, en Flandre, un boucher est mortellement blessé. Le 9 mars, le cabinet tombe ; il est remplacé le 14 par le cabinet Sarrien, dans lequel G. Clemenceau* a le portefeuille de l’Intérieur et Briand celui de l’Instruction publique et des Cultes : aussitôt, les inventaires sont suspendus.

Les élections de mai 1906 n’en restent pas moins un triomphe pour le radicalisme, un radicalisme moins sectaire, il faut le dire, qu’au temps de Combes. L’assemblée des évêques de France, réunie le 30 mai, donne son adhésion à l’encyclique Vehementer et aussi à un modus vivendi qui, accepte, en les cléricalisant un peu, les associations cultuelles. Mais Pie X, par l’encyclique Gravissimo (10 août 1906), condamne tout accommodement et donc les cultuelles. Embarrassés, l’épiscopal français et Briand finissent par signer un accord de compromis : la loi du 2 janvier 1907 laisse les « édifices du culte » à la disposition du clergé et des fidèles ; la loi du 13 avril 1908 reconnaît que les fondations seront recueillies par des mutualités ecclésiastiques. Le culte, lui, est assimilé à une réunion publique. Il est donc libre.

Après la Première Guerre mondiale, la Chambre « bleu horizon » (1919-1924) travaille à rétablir les relations de la France avec le Vatican, rétablissement auquel est favorable Alexandre Millerand*, président du Conseil de janvier à septembre 1920. La réouverture de l’ambassade de France au Vatican est votée par la Chambre le 30 novembre 1920, par 391 voix contre 179.

Sans support juridique depuis 1905, l’Église de France obtient la constitution d’associations diocésaines, que Pie XI approuve par l’encyclique Maximam gravissimamque (18 juin 1924). Douée de la personnalité juridique dans le cadre des lois de 1901 et de 1905, l’association diocésaine a pouvoir d’acquérir et de gérer les biens destinés à l’exercice du culte. Ainsi prend fin la querelle née de la loi de séparation, loi qui, si elle a privé l’Église de France d’une grande partie de son support matériel, l’a incontestablement libérée sur le plan spirituel et missionnaire.

P. P.

➙ République (IIIe).

 L. V. Méjan, la Séparation des Églises et de l’État (P. U. F., 1959). / J.-M. Mayeur, la Séparation de l’Église et de l’État (Julliard, coll. « Archives », 1966).

Sept Ans (guerre de)

Conflit européen qui dura de 1756 à 1763.


La guerre de la Succession* d’Autriche (1740-1748) a provoqué dans l’équilibre entre les diverses puissances belligérantes des changements importants qui dominent l’époque suivante et engendrent, huit ans après le traité d’Aix-la-Chapelle, une nouvelle guerre. La paix de compromis signée à Aix-la-Chapelle en 1748 n’a été qu’une trêve, durant laquelle les systèmes d’alliances, sortis affaiblis du conflit, principalement ceux qui unissaient Anglais et Autrichiens, Français et Prussiens, ont évolué.


Du conflit franco-anglais au conflit continental (1748-1755)

La guerre de Sept Ans a pour causes principales l’affrontement franco-anglais à propos de la constitution d’un grand empire colonial dans l’Inde et en Amérique du Nord et le désir de l’Autriche de Marie-Thérèse de reprendre la Silésie, dont Frédéric II s’est emparé en 1740.

En Amérique du Nord, la volonté d’expansion des colons anglo-saxons menace les établissements français en Acadie, sur le Saint-Laurent et dans la région des Grands Lacs. Les Anglais s’opposent également aux Espagnols en Amérique du Sud, où ils cherchent à imposer leur suprématie commerciale. La rivalité coloniale est aussi très vive dans l’Inde, où Dupleix*, mal secondé par la métropole, dispute au gouverneur britannique le Carnatic et le Deccan.