Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
S

Sept Ans (guerre de) (suite)

À partir de juin 1755, c’est l’Angleterre qui prend l’initiative des hostilités contre la France en saisissant ses bateaux de guerre et en attaquant les Français d’Acadie*. En novembre 1755, l’Angleterre fait enlever plus de 300 navires de commerce français par l’escadre de l’amiral Edward Hawke (1705-1781). Après le refus anglais de rendre les prises, l’état de guerre existe officiellement entre les deux pays (janv. 1756).

L’action anglaise s’explique par la crainte de voir la France se remettre rapidement des conséquences de la guerre de la Succession d’Autriche, reconstituer sa marine et restaurer sa prospérité commerciale. En effet, les arsenaux français travaillent sans relâche.

La puissance anglaise, en attaquant tôt et en détruisant une partie de la marine adverse avant les hostilités, a voulu ôter à la France toute possibilité de lui ravir le leadership européen. Mais le conflit franco-anglais met fin également à la trêve sur le continent.


Le renversement des alliances et les débuts du conflit (1755-1757)

Après le traité d’Aix-la-Chapelle, toute la politique de Marie-Thérèse est axée sur la reprise de la Silésie, abandonnée à Frédéric II. Dans ce dessein, le chancelier Friedrich Wilhelm Haugwitz (1702-1765) réorganise les finances et l’armée : en 1755, 140 000 hommes sont prêts à entrer en campagne.

Sur le plan diplomatique, le ministre des Affaires étrangères, Kaunitz (Wenzel Anton von Kaunitz-Rietberg [1711-1794]), sait attendre l’occasion favorable pour se rapprocher d’une France réticente devant une alliance autrichienne : cette occasion lui est fournie par le traité anglo-prussien signé à Westminster le 16 janvier 1756, traité qui garantit à l’Angleterre la possession du Hanovre, dont son roi, George II, est également le souverain.

Ce traité, ressenti à Versailles comme une trahison, provoque le renversement des alliances. Des pourparlers engagés dès août 1755 entre l’envoyé autrichien G. Starhemberg et l’abbé de Bernis (1715-1794), représentant Louis XV, aboutissent au traité de Versailles du 1er mai 1756. Cet accord consacre le rapprochement des deux plus grandes monarchies continentales et inaugure un système diplomatique qui va durer jusqu’à la Révolution.

Au début de la guerre, un succès de la marine française commandée par La Galissonnière (1693-1756), qui s’empare de l’île de Minorque et en chasse la garnison anglaise (mai 1756), isole encore un peu plus les Anglais sur le continent. Les Provinces-Unies proclament leur neutralité, alors que la Suède signe un traité de coopération avec la France (juill. 1756). Pour prévenir les effets de cette coalition naissante, Frédéric II, dès août 1756, se décide à amorcer les hostilités, fort de son armée de 150 000 hommes et de la constitution d’un important trésor de guerre. La Saxe est envahie, Dresde occupée, et l’armée saxonne capitule le 16 octobre à Pirna, mais sa résistance a anéanti le plan initial de Frédéric II (la marche sur Vienne et la défaite autrichienne) et laissé à l’Autriche le temps de rassembler ses forces et de consolider la coalition européenne. Au début 1757, la France et l’Autriche concluent des traités d’alliance avec la Russie, la Suède et le Wurtemberg.

Frédéric II, qui a envahi la Bohême au printemps, est battu à Kolín, près de Prague, par les Autrichiens de Leopold Joseph Daun (1705-1766) [18 juin 1757] ; se voyant encerclé par les coalisés, il doit évacuer les États de l’Autriche, tandis que les soldats de la tsarine Élisabeth pénètrent en Prusse-Orientale (août 1757).


La guerre continentale et les victoires de la Prusse (1757-1762)

Cependant et contre toute attente, le roi de Prusse parvient à battre successivement les armées des puissances coalisées. Il inflige de graves défaites aux Français à Rossbach (5 nov. 1757), aux Autrichiens à Leuthen (25 déc. 1757) et aux Russes à Zorndorf (25 août 1758).

En 1758, l’Angleterre, solidement gouvernée par William Pitt, entreprend de redresser la situation en sa faveur. Elle s’engage à soutenir Frédéric II pour lui permettre de poursuivre la guerre sur le continent et d’y user les forces et les armées françaises. L’Angleterre pourra faire porter tous ses efforts contre la marine et les colonies françaises.

Ce plan finit par réussir, mais de justesse, car Frédéric II, après ses victoires de 1757 et 1758, est battu par les Austro-Russes à Kunesdorf (12 août 1759). Sa situation est presque désespérée à la fin de 1761, lorsque, le 5 janvier 1762, la mort de la tsarine sauve la Prusse du désastre. Le successeur d’Élisabeth, Pierre III, est un Allemand ; grand admirateur du roi de Prusse, il s’empresse de lui restituer les territoires conquis et signe la paix avec la Prusse le 5 mai ; quelques jours après, la Suède se retire à son tour de la coalition. Aussi, Frédéric II peut-il rétablir la situation ; sa victoire du Burkersdorf (21 juill. 1762) lui permet de reconquérir toute la Silésie.


Le conflit franco-anglais sur mer et aux colonies (1758-1762)

Sur mer et aux colonies, l’Angleterre à partir de 1758 parvient à reprendre l’initiative. Elle le doit à l’énergie de son Premier ministre, William Pitt*, qui pousse activement la construction de nouvelles escadres et nomme des chefs de guerre entreprenants.

L’année 1759 est décisive ; la flotte anglaise inflige à la marine française des pertes irréparables sur les côtes du Portugal, au combat de Lagos, et à Quiberon. Maîtresse sur mer, l’Angleterre met fin à la domination française au Canada*, où Montcalm trouve la mort aux plaines d’Abraham, près de Québec (13 sept. 1759).

En Inde, en 1758, les renforts français de Lally de Tollendal (1702-1766) ne réussissent pas à s’emparer de Madras. Les Anglais s’introduisent alors au Bengale, puis au Deccan ; la prise de Pondichéry (janv. 1761) consomme la fin de l’Inde française.

Devant cette série de revers, la France, sous l’influence de Choiseul*, négocie un « pacte de Famille » entre les Bourbons de Paris et ceux de Madrid (15 août 1761) ; ce pacte a pour conséquence l’entrée en guerre de l’Espagne contre l’Angleterre (2 janv. 1762).