Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
S

Sapindales (suite)

Sapindacées

Ce sont des arbres ou parfois des lianes (1 000 espèces, 130 genres) qui vivent dans des régions intertropicales. Ils fournissent des bois très durs (bois de fer : Thouinia striata) ainsi que des fruits comestibles : c’est l’arille (partie tégumentaire externe), qui devient charnue (Litchi : petit arbre fruitier de l’Inde et de la Chine). Le genre Kœlreuteria, et en particulier K. paniculata de Chine, est souvent planté, car il est très décoratif par son feuillage et rustique en Europe. Les Savonniers (Sapindus, 12 espèces des régions tropicales, sauf l’Afrique) ont dans leurs tissus — racines, fruits — des saponines ; celles-ci servent pour le dégraissage des étoffes. On peut encore citer les Cardiospermum et les Paullinia (150 espèces) ; les graines de P. cupana torréfiées donnent un succédané du café ; ces deux genres sont des lianes. Quelquefois, on rattache à cette famille les genres Æsculus (Marronnier) et Billia d’Amérique tropicale, qui pour d’autres auteurs constituent la famille des Hippocastanacées. Le Marronnier d’Inde (Æsculus hippocastanum) est un très bel arbre à feuilles opposées-composées palmées ; les fleurs blanches dissymétriques sont réunies en grappes de cymes scorpoïdes ; malgré son nom, il n’est pas originaire de l’Inde, mais des Balkans (Thessalie, Épire) ; le fruit est intermédiaire entre une capsule et un fruit charnu (capsule recouverte d’un péricarpe coriace épineux). Æsculus pavia (parfois on en fait un genre spécial, Pavia) vit en Amérique du Nord, il a des fleurs rouge foncé et un fruit non épineux. Le fruit de Æsculus hippocastanum (Marron d’Inde) est riche en saponine et sert en pharmacopée, car il contient un vaso-constricteur.


Acéracées

Cette famille comprend surtout le genre Acer, ou Érable (150 espèces), et un autre, Dipteronia (une espèce en Chine) ; elle vit principalement dans l’hémisphère Nord. Les Acer sont des arbres ou des arbustes à feuilles opposées palmatinervées ou composées pennées ; les fleurs, réunies en corymbes, apparaissent avant les feuilles ; elles peuvent être complètes ou incomplètes sur le même pied ; l’ovaire à deux loges donne après fécondation une samare double ; les embryons sont assez souvent verts. De nombreux hybrides existent ; les espèces horticoles les plus connues sont l’A. pseudoplatanus, le Sycomore, l’A. negundo de la région est de l’Amérique du Nord (il présente souvent des formes panachées), A. platanoides, ou érable plane ; A. saccharum est un très bel arbre d’Amérique du Nord ; sa sève contient 5 p. 100 de saccharose ; on le « saigne » environ un mois par an, au printemps, en faisant des trous à la tarière jusque dans l’aubier ; on obtient ainsi environ 30 kg de sève, ce qui correspond à 1 kg de sucre ; cette production n’est vraiment importante que dans les régions où le printemps fait suite brutalement à l’hiver. Le bois de certains érables est employé en ébénisterie et par les tourneurs, ainsi que comme bois de placage.


Autres familles

La famille des Akaniacées ne comprend qu’une seule espèce, un petit arbre vivant en Australie orientale. Celle des Sabiacées (100 espèces, 4 genres) des régions intertropicales asiatiques et américaines renferme des arbres, des arbustes ou des lianes ; celle des Mélianthacées (2 genres, 40 espèces) vit en Afrique du Sud et en Afrique tropicale. Les Didieréacées sont des plantes épineuses très particulières du sud de Madagascar, qui vivent dans des conditions xérothermiques assez rigoureuses ; leur port ressemble un peu à celui des Cactées ; leurs feuilles, petites, alternes, linéaires ou plus ou moins ovales sont groupées par deux au-dessous ou au-dessus des épines. Les genres les plus curieux sont Didierea, Alluaudia, Alluaudiopsis.

J.-M. T. et F. T.

Sapir (Edward)

Linguiste américain (Lauenburg, Allemagne, 1884 - New Haven, États-Unis, 1939).



Sa biographie

Sapir est âgé de cinq ans quand sa famille, d’origine allemande, émigré aux États-Unis et s’installe à New York. C’est à l’université Columbia, où il se spécialise en allemand, qu’il commence à s’intéresser à la linguistique indo-européenne. Sa rencontre avec l’anthropologue Franz Boas*, dont il suit les cours pendant plusieurs années, le conduit à entreprendre des recherches linguistiques nouvelles sur les langues amérindiennes. C’est ainsi qu’il participe à diverses expéditions ethnographiques chez les Indiens de l’Ouest américain. Reçu docteur en anthropologie (1909) avec un mémoire portant sur la description du takelma (Oregon), il est nommé en 1910 directeur de la division anthropologique du Capadian National Museum d’Ottawa, où il poursuit ses recherches sur les langues amérindiennes. Il publie alors Language : an Introduction to the Study of Speech (1921). En 1925, Sapir obtient une chaire de linguistique générale et d’anthropologie à l’université de Chicago. Il publie dans la revue Language, fondée en 1925, des articles où il s’affirme comme un précurseur original du structuralisme* américain. Nommé à l’université Yale en 1931, il y restera jusqu’à sa mort.


Sa place dans la linguistique

Formé dans la tradition néo-grammairienne, mais s’en dégageant par la nouveauté du champ d’application qui s’ouvre à la linguistique avec les langues amérindiennes, Sapir n’appartient cependant pas à la jeune école structuraliste qui s’organise après 1933 (date de publication de Language de Bloomfield*). Il est également à l’écart de la linguistique européenne : le Cours de linguistique générale (1916) de Saussure* est trop récent encore lorsque paraît son livre Language (1921) pour qu’on y voie une influence sur ses propres conceptions ; le cercle de Prague naît quelques années plus tard (1926). Comme beaucoup de précurseurs, Sapir est un solitaire, et cependant ses intuitions fondamentales sur la nature du langage reflètent l’idéologie de son temps.


Sa conception du langage

Pour Sapir, le comportement verbal ne peut être détaché de l’ensemble culturel constituant la communauté sociale. Tout comme les rites religieux, les conduites socialisées, artistiques, etc., le langage est une composante essentielle de la culture et, comme tel, il est par nature symbolique, conventionnel et acquis. Sapir distingue fondamentalement les fonctions instinctives biologiques (digestion, marche, etc.) et les fonctions culturelles, dont le langage est à la fois la plus élaborée et la condition nécessaire à l’existence des autres. Facteur déterminant des relations sociales instaurées dans un groupe social donné, le langage est également un élément essentiel de la personnalité individuelle, à laquelle il permet de communiquer et de s’exprimer. Ces deux notions de communication et d’expression, étroitement liées dans le fonctionnement normal du langage, découlent d’une conception plus générale des relations complexes qui unissent l’individu au monde par l’intermédiaire de la pensée et du langage. Cette conception, connue sous le nom de « l’hypothèse Sapir-Whorf » (par référence au linguiste américain Benjamin Lee Whorf, 1897-1941), est issue de la pratique empirique d’un grand nombre de langues amérindiennes totalement étrangères aux classifications « logiques » pratiquées par les linguistes étudiant les langues indo-européennes.