Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
R

Russie (suite)

Les premiers États

Le premier État, l’Ourarthou*. se forme sur le plateau d’Arménie vers le milieu du ixe s. av. J.-C. La politique de conquête de ses rois assure sa suprématie en Transcaucasie au milieu du viiie s. av. J.-C. D’importants travaux sont effectués : on construit des forteresses, des temples et des canaux d’irrigation. L’existence de l’État d’Ourathou prend fin au viie s. av. J.-C. Entre le vie et le ive s. av. J.-C. se forment les royaumes de Colchide et d’Ibérie, en Géorgie*. Un État d’Arménie* indépendant se constitue au iie s. av. J.-C. En Asie centrale vivent les tribus massagètes et saces.


La colonisation grecque et la prédominance mythe

Au viie s. av. J.-C., la colonisation grecque commence au nord et à l’est du littoral de la mer Noire. Les Grecs fondent de nombreuses cités, dont la plus importante est Olbia (créée par les Ioniens). D’après Hérodote, la région qui s’étendait à l’est, du nord du littoral de la mer Noire jusqu’au Don, était peuplée essentiellement de Scythes*. La mise au jour de leurs sépultures a révélé l’intérêt de leur civilisation ; on a découvert des poteries, des objets en bronze, en fer et en métaux précieux, ainsi que des armes. Le véritable État scythe ne s’organisera qu’au iiie av. J.-C. Dans les steppes de la basse Volga et des environs de l’Oural vivent les tribus sarmates et les Méotes.

L’économie de Chersonèsos (Kherson), seule cité dorienne du littoral nord de la mer Noire, repose essentiellement sur l’agriculture, et sa structure politique, comme celle d’Olbia, est calquée sur les cités grecques. Au ive s. av. J.-C., tout le détroit du Kertch, ancien Bosphore cimmérien, jusqu’à l’actuel Novorossisk et à l’embouchure du Don passe à la dynastie semi-grecque des Spartocides (438-109 av. J.-C.). Cette union transforme la vie économique, commerciale et culturelle du Bosphore. À la charnière des iiie et iie s. av. J.-C., les Sarmates chassent les Scythes, qui se rassemblent en Crimée (capitale Neapolis), gouvernée par le roi Scilure. Au iie s. av. J.-C., le Bosphore s’affaiblit économiquement et militairement. Vers 110 av. J.-C., le Bosphore cimmérien, Chersonèsos, Olbia et les autres villes du littoral sont inclus dans le royaume de Mithridate VI Eupator, roi du Pont*. C’est la fin du royaume scythe.


La période romaine

Les tribus autochtones, Scythes, Sarmates, Méotes et Taurisques, deviennent une force militaire redoutable, et ce n’est pas sans difficulté que les Romains réussissent à s’installer sur le Danube inférieur (v. Dacie). Vers le milieu du ier s. av. J.-C., ces derniers sont refoulés par les Géto-Daces commandés par Burebista. Un siècle plus tard environ, l’union des Daces, réalisée par Décébale, leur enlève toute prérogative au nord du littoral. Désormais, les relations entre Rome et le Bosphore resteront stables jusqu’à la fin de l’Antiquité : les Romains ont besoin de l’aide militaire du Bosphore, et celui-ci sera pratiquement indépendant. Pendant la période romaine de son histoire, il connaît un essor économique : le commerce, avec l’exportation du blé et du poisson salé, l’agriculture et la pêche se développent. Les esclaves sont affranchis, et le travail forcé disparaît. On trouve dans les sarcophages des signes symboliques chrétiens datant de la fin du iiie s. Au ive s., un évêché indépendant est constitué en Arménie. Le christianisme pénètre en Transcaucasie. Cependant, les villes de la mer Noire sont épuisées par les luttes des tribus autochtones. Les Barbares* portent des coups terribles au cours des iiie et ive s. : les Alains, union de tribus comprenant des Sarmates, des Scythes et des Méotes, s’avancent loin vers l’ouest, les Goths s’avancent jusqu’au Bosphore. Les armées romaines sont chassées de Chersonèsos et d’Olbia par les Alains et les Goths. Puis les Huns* écrasent les Alains et envahissent les côtes nord de la mer Noire.


La formation de l’État russe


Les Slaves*

Les premières sources écrites sur les tribus slaves les mentionnent vers le ier, iie s. de notre ère (Tacite, Pline, Ptolémée) sous le nom de Vénèdes. Au ive s., on les trouve au nord-ouest des Carpates et à l’embouchure du Danube (Sarmates, Vénèdes). Au vie s., alors qu’ils luttent contre Byzance, les Slaves occupent un vaste territoire du Danube à la Vistule et se divisent en trois groupes : les Sklavènes, les Antes et les Vénèdes. Ils ne sont pas encore constitués en État ; leur organisation sociale est la communauté patriarcale des chefs de tribus et des princes.

Aux viiie s. et ixe s., la répartition des tribus slaves est la suivante : autour de Kiev, les Polianes (« gens de la plaine ») ; au nord de ces derniers, les Drevlianes (« gens des forêts ») ; plus au nord, les Dregovitchi ; à l’ouest des Polianes (Bug supérieur), les Volhyniens ; au sud, les Oulitchi ou Ouglitchi, les Tivertses ; dans les Carpates, les Croates blancs. Se sont installés aussi les Sévérianes, les Radimitchi, les Krivitchi (Smolensk), les Polotchanes, les Slaves d’Ilmen et les Viatiches (Oka).

Du viie au ixe s., les forces productives des Slaves orientaux se développent rapidement : la culture de la terre se fait par le labour, et on emploie les bêtes de trait ; les métiers se développent (ferronnerie, forgeage, travail de l’or, tannerie, tissage et poterie). La production se fait pour l’échange, et naissent alors les plus anciennes villes de Russie : Kiev*, Tchernigov, Smolensk, Novgorod*. Le commerce avec l’Orient, Byzance et les pays baltes par la route « des Varègues aux Grecs » (fin du ixe s.) est d’une grande importance européenne. La Rousskaïa Pravda (Justice de Russie), dont la partie la plus ancienne est Justice d’Iaroslav, composée au xie s., décrit le régime social des Slaves orientaux à la veille de la formation de l’État : l’organisation principale est le mir, communauté rurale, et les mouji, riches guerriers, constituent la puissance politique.


Les Varègues

La dernière étape du long processus du développement des tribus slaves sera l’apparition de la « Rous » (la « terre russe »). Pour certains auteurs, le nom de « Russie » est mentionné dans un manuscrit du vie s. ; au ixe s., on en trouve de nombreux témoignages écrits. Les Russes constituent alors une force puissante. Ils commercent avec l’Empire byzantin*, et leur territoire s’étend du Dniepr moyen au littoral nord de la mer Noire, avec Kiev pour centre. À la même époque, les Slovènes se réunissent autour de Novgorod. La fusion de ces deux groupes formera un État unique, avec Kiev pour capitale. Se situe alors une période de luttes intestines qui durera jusqu’à l’apparition, à Novgorod, du célèbre Riourik († 879).