Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
R

Ruhr (la) (suite)

Victoire sans lendemain pour la France, car Poincaré, en refusant toute négociation avec Stresemann, fait le jeu des Anglais. Le 20 octobre 1923, le cabinet britannique propose en effet une enquête internationale pour déterminer la capacité de paiement de l’Allemagne ; Poincaré, paradoxalement, accepte cette proposition. Peut-être espère-t-il le succès du séparatisme rhénan (v. Rhénanie) ? D’autre part, il ne veut pas courir le risque d’une aggravation de la tension franco-anglaise, et il doit compter avec le fléchissement du franc : or, les marchés de Londres et de New York refusent de s’ouvrir à la France tant que celle-ci persistera à vouloir « pacifier l’Europe par la force ».

Dès lors, la voie est ouverte aux compromis. La reprise des paiements allemands au titre des réparations est établie selon les bases prévues, en août 1924, par un Comité international d’experts présidé par l’Américain Charles Dawes (plan Dawes) : des annuités croissantes seront versées par l’Allemagne durant cinq ans seulement. Le Reich s’exécute ; les milieux financiers internationaux s’intéressent de nouveau à son essor économique. La Ruhr est évacuée progressivement par les Français et les Belges entre octobre 1924 et juillet 1925.

À court terme, l’occupation de la Ruhr — humiliante pour l’orgueil allemand et dure dans ses conséquences économiques et sociales — a exacerbé le nationalisme dans un Reich hier divisé et dont les éléments se sont regroupés contre l’occupant en une espèce d’« union sacrée ». À moyen terme, elle donna « une âme au national-socialisme. Elle représente l’acte de naissance du nazisme » (M. Baumont).

P. P.

➙ Allemagne / Briand / Guerre mondiale (Première) / National-socialisme / Poincaré / Rhénanie / Stresemann.

 L. Coupaye, la Ruhr et l’Allemagne (Dunod, 1922). / P. Wentzcke, Ruhrkampf (Berlin, 1930-1932 ; 2 vol.). / W. M. Jordan, Great Britain, France and the German Problem, 1918-1939 (Londres, 1943). / E. Weill-Raynal, les Réparations allemandes et la France (Nouv. Éd. latines, 1948 ; 3 vol.). / J.-C. Favez, le Reich devant l’occupation franco-belge de la Ruhr en 1923 (Droz, Genève, 1969).

Ruminants

Mammifères appartenant au super-ordre des Artiodactyles.


Ils ont en commun la possibilité de ruminer, c’est-à-dire de refouler dans la bouche, pour en parfaire la mastication, des aliments mâchés une première fois, puis emmagasinés dans la panse.

Ils ont en général des cornes kératinisées, insérées sur des cornillons osseux, ou des « bois » (de matière osseuse), insérés également sur le frontal, et cela au moins chez les mâles (à l’exception des Camélidés).

Leurs pattes sont longues ; le métacarpe et le métatarse participent à l’allongement général du membre : les métacarpiens III et IV se soudent, ne formant qu’un seul os, l’os canon ; les métacarpiens II et V ainsi que les métatarsiens II et V subissent toujours une très forte réduction, qui finit par leur disparition totale dans certains genres (Bovidés, Camélidés, et Giraffidés), la plus faible réduction s’observant chez les Tragulidés.


Les dents

La denture des Ruminants est caractéristique. À l’exception des Camélidés, ces Mammifères n’ont ni incisives ni canines à la mâchoire supérieure.

Chaque demi-mâchoire inférieure a trois incisives, auxquelles s’ajoute une canine incisiforme, dont certains auteurs font une quatrième incisive. Les deux dents centrales ont reçu le nom de pinces ; de chaque côté se trouvent les première et deuxième « mitoyennes », puis le « coin », qui est cette pseudo-quatrième incisive. Les dents jugales (molaires) sont à croissance prolongée et de forme prismatique ; leur surface d’usure présente des replis en croissants. Ces replis de dentine dessinent à peu près la lettre D sur les prémolaires et la lettre B sur les molaires ; d’autre part, les croissants tournent leur concavité en dehors pour la mâchoire supérieure et en dedans pour la mâchoire inférieure. La formule dentaire est

L’articulation de la mâchoire inférieure avec le crâne rend possibles les mouvements latéraux de cette mandibule, ce qui facilite la mastication des aliments. Le régime est végétarien, plutôt herbivore que phyllophage.


La rumination

L’estomac est généralement divisé en quatre poches et a une fonction physiologique assez complexe, permettant l’accumulation rapide des aliments.

Il comprend :
— l’estomac antérieur, qui est divisé en deux parties, la panse (ou rumen), vaste poche pouvant avoir une capacité de 250 litres chez le Bœuf, et le réseau (reticulum ou bonnet), ainsi appelé à cause du relief en nid d’abeilles de sa muqueuse interne ;
— l’estomac moyen, ou feuillet (omasum ou psalterium), dont la muqueuse interne contient des plis superposés ;
— l’estomac postérieur, ou caillette (abomasum), dont la muqueuse présente des replis internes spirales. C’est le véritable estomac. La caillette est toujours très volumineuse chez le jeune ruminant soumis au régime lacté.

Sur la paroi de l’estomac antérieur et à son sommet se trouve une gouttière bordée de deux puissants replis musculeux, et qui s’étend du débouché de l’œsophage jusqu’à la caillette. Le rôle de cette gouttière est plus important chez le jeune que chez l’animal adulte. Les glandes digestives se trouvent dans la caillette.

Le jeune Ruminant se comporte dans son jeune âge comme un monogastrique. Sa panse ne fonctionne pas et il ne rumine pas.

Dès les premières heures de sa vie, il reçoit de sa mère son premier lait, le colostrum. Celui-ci a la propriété de contenir, en plus des constituants normaux, des globulines, qui jouent un rôle très important non seulement diététiquement, mais aussi comme facteur d’immunisation passive.

La gouttière œsophagienne étant fermée, le jeune Ruminant reçoit directement son lait dans la caillette. Sous l’action de la présure (labferment ou chymosine), un caillot se constitue dès les premières heures de la vie du jeune.

Il va se rétracter et exsuder un lactosérum très riche en albumines et en globulines, qui passeront directement dans l’intestin. Le caillot est alors lentement solubilisé dans l’estomac, qui continue à le transformer en substances que l’intestin pourra assimiler facilement.

À part les bacilles lactiques de toutes sortes que lui communique sa mère avec son premier lait, le jeune Ruminant n’a pas de flore microbienne étrangère. Ces bacilles lactiques lui sont nécessaires pour transformer son lactose (ou sucre de lait) on acide lactique assimilable.

L’animal a donc à sa disposition un dispositif qu’il n’utilise pas. Mais il est dangereux pour lui d’avoir cet appareil, car, si, par hasard, sa gouttière œsophagienne ne fonctionne pas, le lait pénètre à l’intérieur du rumen, y stagne, et il s’ensuit des fermentations anaérobies qui peuvent entraîner la mort de l’animal.

Le jeune Ruminant est donc monogastrique : c’est le cas du veau de boucherie (veau de lait ou veau blanc), que l’on sacrifie entre 70 et 100 jours, quand il a atteint un poids de 120 à 150 kg.