Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Rio de Janeiro (suite)

Toute cette activité industrielle fait vivre à peu près un tiers de la population. Elle doit une grande partie de son existence aux investissements de la bourgeoisie nationale, les capitaux étrangers n’y participant que pour 10 à 15 p. 100 au total, ce qui constitue une nouvelle différence entre Rio de Janeiro et São Paulo, où ceux-ci représentent près des trois quarts de l’investissement total. Rio de Janeiro ne conserve donc qu’un rôle secondaire au niveau de la croissance industrielle.


La population

L’essor des jonctions, mais aussi les limites des perspectives de croissance économique expliquent tout à la fois l’augmentation considérable de la population depuis le premier recensement de 1872 et la perte de sa place de première ville du Brésil en 1960. En 1872, la ville était neuf fois plus peuplée que São Paulo ; en 1950, elle comptait encore 100 000 habitants de plus que la métropole pauliste. Mais, actuellement, Rio est largement devancée par São Paulo, qui dépasse les 6 000 000 d’habitants.

Sans atteindre les taux des villes du nord-est du Brésil, la population de Rio de Janeiro comprend une fraction de marginaux : ce sont des adultes potentiellement actifs, mais qui, n’ayant pu s’insérer d’une façon permanente dans l’économie urbaine, vivent de « petits métiers » ou du salaire d’un seul des membres de la grande famille. La présence de cette fraction très pauvre de la population se reflète dans l’organisation de l’espace urbain par l’existence de bidonvilles, les favelas.


Un espace urbain organisé dans un site exceptionnel


Le site

Rio de Janeiro s’est développée dans une région de moyennes montagnes situées en bordure de mer, fortement disséquées par une érosion très violente et dont le relief a ensuite été partiellement envahi par une remontée du niveau marin. La vallée principale est devenue une baie qui débouche sur la mer par une entrée plus étroite, correspondant à une première ligne de hauteurs de part et d’autre de cette vallée ; ces reliefs sont disséqués en buttes rocheuses élevées, aux formes particulières, les « pains de sucre » (en particulier celui qui porte spécifiquement ce nom, le Pain de Sucre [Pão de Açúcar]). Autour de la baie, la ville a profité soit des vallées adjacentes insérées entre des crêtes rocheuses vigoureuses et parsemées de buttes aux versants très raides, soit, de part et d’autre de la baie, de vastes plages sableuses. Ces dernières s’appuient contre des crêtes rocheuses, comme la plage de Copacabana, ou ont formé des cordons littoraux en avant d’une lagune qui les sépare de l’arrière-pays montagneux, comme dans le cas de la plage d’Ipanema ; chacune de ces plages est limitée par une avancée des zones rocheuses dans la mer en forme de cap disséqué.

Le climat tropical humide, avec une moyenne des températures de 23 °C et une pluviosité abondante (provoquant de graves glissements de terrain), voue cette zone à la forêt tropicale, qu’il a fallu défricher pour construire la ville et qui subsiste sur les versants les plus escarpés. Tous ces éléments naturels donnent un paysage d’une exceptionnelle beauté, particulièrement en hiver, saison plus sèche, aux températures très clémentes, dotée souvent d’un ciel bleu qui donne une luminosité éclatante. Au sein de ce site très beau, mais difficilement utilisable, un très grand effort d’aménagement a été nécessaire pour organiser le tissu urbain.


Le centre des affaires

Sur le bord occidental de la baie de Guanabara, un peu avant le débouché vers la mer, une avancée des terres a servi de base à l’installation de la vieille ville de Rio de Janeiro, devenue actuellement le centre des affaires. Celui-ci est donc fait d’un tissu urbain assez complexe : on y trouve d’anciennes petites artères souvent transformées en rues piétonnières, où se sont fixés les commerces de luxe ou les activités nocturnes, comme la rua do Ouvidor, qui était jadis la rue de l’aristocratie, à proximité du palais impérial. À des époques diverses, ce vieux centre a été percé d’artères plus larges : d’abord l’avenida Rio Branco, puis, plus récemment, l’avenida Presidente Vargas ; le long de ces axes se sont construits d’abord, pendant l’entre-deux-guerres, des immeubles d’une dizaine d’étages, puis, après la Seconde Guerre mondiale et surtout après 1960, les grands gratte-ciel qui caractérisent actuellement le centre de Rio de Janeiro. Ils abritent les fonctions bancaires, commerciales et, d’une façon générale, le tertiaire supérieur.

Le centre est donc très varié, d’autant que dans les marges subsistent encore des zones dégradées de l’ancienne ville, dont les maisons se sont progressivement transformées en taudis. Un gros effort a été fait pour aménager ce centre : des collines entières ont été rasées pour constituer un espace plan, et les matériaux de cette démolition ont servi à remblayer une partie de la baie en avant du centre des affaires.


Les quartiers du sud

Au sud de ce centre des affaires se sont développées progressivement les zones résidentielles, qui abritent maintenant la fraction aisée de la population « carioca ». Ce furent d’abord les zones de hauteur au milieu de la forêt, où subsistent des quartiers riches, comme la zone de Tijuca, au sein d’une verdoyante végétation aménagée. Mais, très vite, les quartiers riches gagnèrent les vallées, comme celle de Laranjeiras, et surtout les plages : initialement, à la bordure méridionale du centre des affaires, à l’intérieur de la baie, les plages de Flamengo et de Botafogo ; puis, après 1930 et surtout après 1945, les plages de haute mer. La plage de Copacabana fut d’abord une zone de villas, de part et d’autre des rues qui bordent le littoral. Mais l’étroitesse de l’espace libre entraîna rapidement une hausse du prix des terrains, et les villas furent remplacées par des immeubles de résidence d’une dizaine d’étages, particulièrement en bordure de la plage elle-même, le long de l’avenida Atlântica. De ce fait, Copacabana est actuellement un énorme quartier de plus de 600 000 habitants, déserté par les gens très riches au profit de la classe moyenne aisée. La haute bourgeoisie s’est reportée sur les plages au sud de Copacabana, soit la plage d’Ipanema et les alentours de la lagune, soit, encore plus loin, au-delà d’un grand cap, la plage de Gávea. Mais tout l’espace de cette zone sud n’était pas utilisable par une urbanisation visant au confort et à la construction de luxe, car les plages sont séparées les unes des autres par des collines aux pentes très escarpées. Celles-ci sont occupées par les favelas, zones d’habitations précaires en bois, sans urbanisation ni infrastructure, dont les cabanes forment un contraste très violent avec les habitations des zones basses. C’est le cas notamment à Copacabana, où la plage se trouve appuyée contre un escarpement rocheux entièrement couvert par ces bidonvilles.