Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
R

Recife (suite)

L’art à Olinda et à Recife

Ces villes jumelles — aujourd’hui très inégales (Olinda a 100 500 hab.), mais également importantes pour l’art du Nord-Est brésilien — sont complémentaires par leur site, leur histoire, leurs monuments. Olinda, endormie sur son promontoire au-dessus de l’Océan, apparaît, avec ses couvents et ses jardins, comme une oasis de silence en face de la dynamique et bourdonnante Recife, qui s’allonge vers le sud au ras d’une côte coupée de bras d’eau. Dans l’histoire de l’art, Olinda représente avant tout un xviie s. sévère et monastique, Recife un rococo tumultueux ; mal conçu, l’urbanisme contemporain du grand port a laissé subsister la plupart des églises tout en détruisant leur environnement.

Olinda fut, en 1535, une des premières villes fondées à cette époque des capitaineries qui précéda l’administration par la Couronne. Pendant un siècle et demi, elle demeura une importante métropole religieuse par son évêché, ses collèges (Jésuites) et ses couvents (Franciscains — la maison mère du Brésil —, Carmes, Bénédictins), et cela en dépit des vicissitudes qu’elle connut au xviie s. Lorsque les Hollandais attaquèrent les possessions portugaises d’Amérique, elle fut conquise (1630), incendiée et abandonnée quelque temps au profit de Recife. Des monuments antérieurs, seule subsista en partie Nossa Senhora da Graça, l’église des Jésuites. Les Hollandais chassés en 1654, la reconstruction fut rapide : la plupart des monuments religieux d’Olinda datent de la fin du xviie s. et du début du xviiie. Ils conservent très noblement la simplicité primitive avec leurs nefs rectangulaires à chapelles et chevets plats (N. S. do Carmo, São Bento), leurs façades au décor léger, percées de trois fenêtres et surmontées d’un fronton onduleux, leurs cloîtres dont les sobres arcades évoquent la Renaissance italienne (São Francisco). Sans monuments exceptionnels, Olinda fait survivre, seule des villes du Brésil, cette colonie tropicale du xviie s. dont les tableaux du Hollandais Frans Post (v. 1612-1680) ont fixé l’image.

À Recife, l’activité architecturale s’est trouvée liée à la dévotion et à l’ostentation des riches confréries qui groupaient l’aristocratie, les militaires, voire les prêtres séculiers. Après une période où les deux seuls monuments importants sont le couvent de São Francisco et la « Capela Dourada », chapelle au luxueux décor de bois doré, c’est dans les deux derniers tiers du xviiie s. que la ville définit sa modalité propre de rococo, avec des recherches de plan qui semblent relever d’influences européennes (São Pedro dos Clérigos, aux deux hautes tours de façade et au plan dodécagonal, v. 1728-1782) et la richesse de son décor dans les couronnements tourmentés des façades comme dans la fantaisie du revêtement intérieur (Santo Antônio, N. S. do Carmo et surtout N. S. da Conçeição dos Militares, chef-d’œuvre du rococo de Recife vers 1760).

Cette orientation turbulente et emphatique marque un des pôles du rococo brésilien, l’autre étant le raffinement mesuré des églises d’Ouro Prêto* et du Minas Gerais.

P. G.

récit

Sous Henri IV et Louis XIII, pièce de vers « récitée » dans une mascarade ou un ballet de cour. Après 1600, le récit est parfois chanté quand il a la forme strophique de l’air.


Bien qu’il soit présent dans la plupart des spectacles de cour, le récit constitue néanmoins un genre autonome où, à l’encontre de l’air, la déclamation l’emporte toujours sur l’expression mélodique. Il apparaît d’abord dans les ballets mélodramatiques de Pierre Guédron (v. 1570 - v. 1620) comme une tentative d’assimilation du récitatif florentin. Cependant, conçu ou non pour le ballet, il conserve la même déclamation pour chaque strophe, ce qui réduit considérablement son efficacité. Quand, après la mort de Guédron, le ballet à entrées, sans action réelle, règne en maître, le récit devient plus mélodique. Il acquiert plus de souplesse avec Antoine Boesset (ou Boysset, 1586-1643) et Étienne Moulinié (début du xviie s. - † apr. 1668), qui n’ignorent pas l’art d’outre-monts, mais ne retrouve sa vitalité ancienne qu’avec Jean de Cambefort (1605-1661), avant que Lully le transforme et crée le véritable récitatif* français, en adaptant habilement au goût national la déclamation continue des Italiens.

Au xviie s., on a donné également le nom de « récit » au demi-clavier ajouté à l’orgue* au-dessus du positif et destiné à l’exécution d’un solo (cornet, cromorne, flûte, hautbois...). Muni au xviiie s. de jeux supplémentaires, il finit par constituer au xixe s. un clavier complet du nouvel orgue symphonique.

Le terme a, en outre, été longtemps utilisé pour désigner un solo vocal (récit de basse) ou instrumental (orgue : récit de tierce en taille).

A. V.

 H. Prunières, le Ballet de cour en France avant Benserade et Lulli (Laurens, 1914). / T. Gérold, l’Art du chant en France au xviiie siècle (Istra, Strasbourg, 1921). / N. Dufourcq, la Musique d’orgue française de Jehan Titelouze à Jehan Alain (Floury, 1941 ; 2e éd., 1949).

récitatif

Déclamation librement chantée d’un texte littéraire dans une œuvre dramatique (cantate, opéra, oratorio) et dans une composition vocale (motet, mélodie, lied).


À l’inverse de l’air*, qui suit un plan musical fixe, le récitatif est totalement subordonné aux inflexions de la phrase parlée. Il trouve son origine dans l’ancienne « cantillation » juive dont hérite, au début de l’ère chrétienne, le chant romain. À côté du chant recto tono, psalmodié sur une seule note sans aucune inflexion, on distingue bientôt deux sortes de récitatifs liturgiques : l’un introduit avec : souplesse des cadences à la fin de chaque phrase (Pater noster) ; l’autre, plus varié, s’enrichit de brèves vocalises (antienne, trait) qui soulignent le sens des paroles. Au Moyen Âge, le drame liturgique, les jeux et les mystères, spectacles mêlés de chants, présentent des scènes dialoguées où le récitatif, appelé maintenant à exprimer des sentiments simplement humains, prend parfois le caractère dramatique de celui du futur opéra.