Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
R

radiodiffusion (suite)

Dans une deuxième période, qu’on peut situer de 1927 à 1940, la radio consolide son statut, se perfectionne dans le domaine technique et élargit son audience. Dans chaque pays, des dispositions législatives sont prises, qui réglementent l’installation des postes émetteurs et les longueurs d’onde utilisées. Les régimes varient beaucoup, mais peuvent, en gros, se répartir en deux catégories distinctes. Lorsque la radio est laissée à l’initiative privée, elle est en général contrôlée partiellement par des institutions nationales, comme c’est le cas aux États-Unis, mais son exploitation est livrée à la concurrence entre des entreprises qui tirent leurs principales ressources de la publicité. Lorsque c’est l’État qui a le monopole de la radiodiffusion, il considère celle-ci comme un service public et se doit de lui assurer un certain niveau culturel. Cependant, la concurrence des pays voisins de même langue peut l’amener à se préoccuper aussi de garder un public nombreux. Les ressources sont, dans ce régime, généralement assurées par des redevances annuelles exigées des utilisateurs, mais celles de la publicité peuvent aussi, dans une mesure limitée, s’y ajouter parfois. Plusieurs pays connaissent aussi la coexistence de chaînes d’État et de chaînes privées. D’une manière générale, l’essor de la radiodiffusion a été plus rapide dans les cas où n’était pas pratiqué le régime du monopole d’État. Cependant, aujourd’hui, le niveau de saturation est atteint presque partout dans les nations hautement industrialisées. En France, les débuts de la radio s’étaient effectués grâce à des compagnies privées. Mais l’État les racheta les unes après les autres, la dernière à disparaître étant celle de Radio-Paris en 1933.

Du point de vue technique, la radio a connu des transformations importantes : le haut-parleur a remplacé le casque ; le transistor a permis la fabrication de postes récepteurs plus maniables ; la modulation de fréquence a amélioré l’utilisation du spectre et l’audition de la musique.

L’expansion de la radio dans le monde se confirme en même temps. Non seulement la plupart des pays, jusque dans le tiers monde, se dotent d’émetteurs, mais partout le nombre des récepteurs augmente. Aux États-Unis, le nombre des appareils récepteurs était de 3 millions en 1924, de 7 millions en 1928, de 170 millions en 1960, de 285 millions en 1969, ce qui représente alors 1 431 postes pour 1 000 habitants. En Europe, l’expansion fut plus lente au début, puis s’accéléra. En Belgique, par exemple, on comptait 26 récepteurs en 1920, 392 en 1922, 3 000 en 1923, 12 000 en 1924, 35 000 en 1927, 2 640 000 en 1960, 3 300 000 en 1968 (soit 342 pour 1 000 habitants). Au total, on dénombrait plus de 450 millions de récepteurs dans le monde en 1963. C’est en Asie et en Afrique que l’augmentation a été, proportionnellement, le plus rapide depuis 1950, et c’est en Océanie qu’elle a été le plus faible. Parmi les pays les mieux équipés, après les États-Unis, viennent le Canada et la Suède. En France, en 1968, on comptait 314 récepteurs pour 1 000 habitants.


Missions, fonctions, programmes

Dans de très nombreux pays, la radiodiffusion comporte plusieurs chaînes de diffusion, et, dans plusieurs d’entre eux, ces chaînes ont des vocations particulières, l’une d’elles étant, plus que les autres, « culturelle », une autre étant surtout « musicale », cependant que la plus grande partie de l’audience se porte sur des chaînes diffusant des programmes variés. Dans ces derniers, la chanson tient une grande place. D’autres éléments importants des programmes sont, outre la publicité, les reportages, les jeux, les sports, les informations, les feuilletons, les dramatiques. La concurrence de la télévision a conduit la radio à donner une importance accrue aux genres qui nécessitent le moins le concours de l’image. Le rôle prééminent de la musique s’est donc trouvé confirmé, de même que celui des commentaires parlés. La radio conserve sa place privilégiée en tant que dispensateur d’un fond musical et, plus généralement, d’émissions que l’on peut recevoir avec une attention peu soutenue ou bien en se livrant à d’autres occupations et notamment en conduisant une voiture. D’autre part, elle bénéficie de la mobilité et la relative modicité de ses appareils émetteurs. Il lui est donc plus facile qu’à la télévision de se répartir en un grand nombre de programmes, dont certains peuvent s’adresser à des publics minoritaires. En outre, la radio bénéficie d’une meilleure réputation que le petit écran auprès des « intellectuels », non seulement parce qu’elle peut plus aisément dispenser des programmes culturels à des publics choisis, mais aussi parce que la nécessité de recourir à la parole uniquement pour transmettre ses messages la maintient dans la sphère de la communication conceptuelle. Malgré tout, l’écoute de la radio a beaucoup baissé partout où la télévision a fait son apparition. Toutes les statistiques démontrent que les foyers équipés de télévision consacrent nettement moins de temps à l’écoute de la radio qu’ils ne le faisaient auparavant.

Pour se défendre d’une désaffection, qui, de toute manière, ne dépasse pas en moyenne certaines limites, les responsables des programmes radiophoniques cherchent à donner aux émissions un style plus familier ou plus direct ; ils multiplient les dialogues avec le public. On peut dire que, dans les loisirs collectifs des pays modernes, un équilibre commence à s’établir entre la radio et la télévision, et que l’un et l’autre de ces moyens de communication de masse est en train de se donner une vocation spécifique.

J. C.

 A. Huth, la Radiodiffusion, puissance mondiale (Gallimard, 1937). / P. F. Lazarsfeld, Radio Listening in America : The People Look at the Radio again (New York, 1948). / J. G. Williams, Radio in Fundamental Education in Underdeveloped Areas (Unesco, 1950 ; trad. fr. la Radio et l’éducation de base dans les régions insuffisamment développées, Unesco, 1950). / M. Guierre, les Ondes et les hommes (Julliard, 1951). / R. Veille, la Radio et les hommes (Éd. de Minuit, 1952). / G. A. Codding, Broadcasting without Barriers (Unesco, 1959 ; trad. fr. la Radiodiffusion dans le monde, Unesco, 1959). / J. Cazeneuve, Sociologie de la radio-télévision (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1962 ; 4e éd., 1974). / F. Bebey, la Radiodiffusion en Afrique noire (Éd. Saint-Paul, 1963). / P. Descaves et A. V. J. Martin, Un siècle de radio et de télévision (Productions de Paris, 1965). / G. Thoveron, Radio et télévision dans la vie quotidienne (Institut de sociologie, Bruxelles, 1971). / R. Burbage, J. Cazemajou et A. Kaspi, Presse, radio et télévision aux États-Unis (A. Colin, coll. « U 2 », 1972).