Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
R

radar (suite)

Les radars qui équipent en 1975 les grands bâtiments de guerre modernes sont spécialisés selon les fonctions qui leur sont dévolues : radars de navigation, de veille surface rapprochée et éloignée, de veille air, de conduite de missions aériennes, d’altimétrie et de tir. Les radars de tir sont toujours associés à des calculateurs spécifiques du système d’arme qu’ils servent et varient beaucoup selon qu’ils sont utilisés pour l’autodéfense antiaérienne, le guidage de missiles surface-surface ou surface-air. De multiples améliorations techniques en ont fait des appareils extrêmement complexes et très difficiles à brouiller. Tel est le radar tridimensionnel français type DRBI 23 (à la fois veille air, désignation d’objectifs et conduite des missions aériennes) dont l’antenne est protégée par un radôme de 11 m de diamètre (il est installé sur la frégate Suffren).

• Radar et informatique. En raison de la multiplicité des informations recueillies par les radars et par les différents autres senseurs du bâtiment de guerre (sonar, équipements électroniques, radio...), les marines de guerre ont été amenées à employer les moyens offerts par l’informatique pour emmagasiner, synthétiser et restituer les éléments nécessaires à la connaissance de la situation et au choix de l’action. Ainsi ont été mis au point des calculateurs capables de recueillir et d’exploiter les informations tactiques. Tels sont les systèmes américain NTDS (Naval Tactical Data System) et français SENIT (Système d’exploitation navale de l’information tactique). Ce dernier, réalisé en 1968, est installé sur les frégates Suffren et Duquesne ainsi que sur le croiseur Colbert, refondu en 1973. Ces calculateurs, associés aux différents senseurs du bord, permettent l’élaboration constante de la situation générale, l’évaluation de la menace, la désignation des objectifs prioritaires, la poursuite et l’identification des mobiles présumés ennemis, la conduite des armes et des transmissions.

L’association au radar de ces réalisations de l’informatique moderne a considérablement renforcé l’intérêt de ce procédé de détection et modifié en profondeur les données de la guerre navale.

A. D. et P. L.

➙ Aérienne (défense) / Arme / Armement / Aviation / Missile.

Radcliffe-Brown (Alfred Reginald)

Ethnologue britannique (Birmingham 1881 - Londres 1955).



Sa vie

Il fait une expédition aux îles Andaman (1906), puis en Australie-Occidentale (1910). Il est ensuite chargé des problèmes de l’éducation à Tonga (1916), puis reçoit une chaire d’anthropologie sociale à l’université du Cap (1921) et d’ethnologie à l’université de Sydney (1925). Il enseigne également l’ethnologie à l’université de Chicago (1931-1937) et l’anthropologie sociale à Oxford (1937-1946). Sa très importante contribution à l’étude de la parenté* dans les sociétés archaïques a permis de mettre au jour le caractère systématique des relations de parenté. Radcliffe-Brown ne s’est pas contenté de décrire ces relations ; il les a aussi analysées et classées ; il a également montré leur rapport étroit avec l’organisation* sociale et, par là, il a bouleversé l’image qu’on se faisait du totémisme*.

Parmi ses œuvres, on peut citer The Andaman Islanders (1922), Social Organization of Australian Tribes (1931), Structure and Function in Primitive Society et Method in Social Antropology, qui ont été publiés après sa mort (1957 et 1958).


La théorie de Radcliffe-Brown

On lui a donné le nom de fonctionnalisme* parce que l’ethnologue a tenté d’étudier la culture en elle-même, au lieu de se référer à son histoire ou à ses rapports avec les individus. Radcliffe-Brown cherche à expliquer chaque élément d’une culture donnée par le rôle qu’il joue, par la fonction qu’il remplit dans celle-ci. Par exemple, dans une société, telle institution doit se comprendre par ce qui la rend utile pour la conservation du mode de vie qui caractérise le groupe dans son ensemble. On examinera comment toutes les parties d’un système social s’harmonisent les unes avec les autres.

Le premier point de cette conception est donc ce qu’on peut appeler son caractère an-historique, que l’on retrouve fortement affirmé dans le structuralisme* de Lévi-Strauss*.

Selon Radcliffe-Brown, en effet, l’explication historique, qui consiste à établir l’origine d’une institution, est particulièrement peu fondée dans le cas des sociétés primitives : pour ces dernières, en effet, les documents historiques n’existent pas ; aussi les anthropologues se rabattent-ils en fait sur l’imagination et inventent-ils des explications pseudo-historiques et pseudo-causales... À cette recherche, si sujette à caution, Radcliffe-Brown préfère ce qu’il appelle la compréhension théorique et qui peut se saisir à deux niveaux. D’une part, à l’intérieur d’une société donnée, il s’agit de comprendre la fonction d’un phénomène social — celui du crime ou de la religion — par rapport à la structure (ou permanence du social) et au processus de vie (ou changement), tout comme, dans un organisme vivant, on comprend la fonction du cœur — pomper le sang — par rapport à la structure formelle et au processus vital. D’autre part, une telle compréhension ne peut jaillir le plus souvent que de la comparaison des sociétés entre elles — tout comme en biologie, elle ne naît que de la comparaison des organismes et de leur fonctionnement.

« Je conçois l’anthropologie* sociale, écrit Radcliffe-Brown, comme la théorie comparative des formes de la vie sociale chez les primitifs. »

Radcliffe-Brown emprunte ses concepts directeurs et ses méthodes aux sciences de la vie, aux sciences naturelles et à la biologie, et c’est ce que lui reproche Lévi-Strauss, en niant que la société puisse être assimilée à un organisme vivant, pour lequel il est impossible d’écarter la notion finaliste de totalité harmonieuse. Allant plus loin, Lévi-Strauss croit même déceler au cœur de la notion de structure, telle que Radcliffe-Brown l’emploie, un présupposé philosophique réaliste : Radcliffe-Brown aurait conçu la structure au cœur de la réalité sociale, au lieu d’y voir un simple modèle conceptuel pour penser cette réalité. C’est pourquoi Lévi-Strauss affirme dans l’Anthropologie structurale (1958) : « Le principe fondamental est que la notion de structure ne se rapporte pas à la réalité empirique, mais aux modèles construits d’après celle-ci. »