Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
P

prurit (suite)

L’évolution

La multiplicité des facteurs étiologiques tant pour les prurits généralisés que pour les prurits locaux impose le plus souvent un examen clinique complet. Des examens de laboratoire peuvent être nécessaires (urines, selles, sang) afin d’instituer un traitement spécifique.

L’évolution du prurit dépend de sa cause et de sa thérapeutique. Il est des démangeaisons qui persistent des mois, voire des années, altérant alors profondément l’état général par inappétence et insomnie. Le malade devient irritable, anxieux, mélancolique. Le suicide a été observé, en particulier en cas de prurit sénile intense et irréductible.

Des complications locales immédiates ou tardives sont possibles. Un prurit léger et passager n’entraîne l’apparition que d’un érythème simple ou ortié éphémère. Un prurit plus intense est cause d’excoriations linéaires révélatrices (lésions de grattages dues aux ongles) et parfois de folliculites, de lésions punctiformes, pseudo-papules simulant les papules de prurigo.

Les complications tardives sont la lichénification et l’infection.

La lichénification (sans rapport avec les lichens végétaux) résulte d’un grattage intense et prolongé ; elle comporte une pigmentation et un épaississement du tégument. La peau est de coloration terne et brune, et sa surface devient grenue. Sur la zone ainsi modifiée apparaissent des sillons qui forment un quadrillage en réseau. La lichénification s’observe spécialement à la nuque chez la femme et au creux poplité (jarret) chez l’homme. Si, pour se produire, elle exige le prurit, elle est en outre conditionnée par un facteur nerveux propre au sujet, car tous les sujets atteints de prurit n’ont pas obligatoirement de lichénification.

L’infection secondaire, conséquence fréquente du grattage, s’extériorise par l’impétigo, l’ecthyma et surtout les furoncles. Chez les prurigineux chroniques, l’hypertrophie des ganglions lymphatiques est presque de règle, même en l’absence d’infection secondaire.

A. C.

Prusse

En allem. Preussen, ancien pays de l’Allemagne du Nord.


La Prusse a été à la fois une province et un des États allemands et son essor est lié à la dynastie des Hohenzollern*. Province de l’Allemagne de l’Est, elle fut en effet associée, en fait dès 1568 et en droit dès 1618, au destin du margraviat de Brandebourg*, et c’est ainsi que se forma l’État dit « brandeburgo-prussien ». De plus, jusqu’au début du xixe s., la Prusse fut un État de l’Europe et de l’Allemagne orientales, ses possessions à l’ouest de l’Elbe étant toujours peu nombreuses. Les traités de Vienne, en installant la Prusse sur le Rhin, fit de l’État prussien un ensemble qui dominait toute l’Allemagne du Nord en attendant de dominer l’Allemagne tout entière. Cet État prussien, constitué de morceaux très divers, devra sa grandeur, sa puissance et sa gloire à la dynastie qui l’a pensé : les Hohenzollern. Ce sont eux qui donneront à la Prusse un état d’esprit particulier, dû à sa structure socio-économique, mais aussi à l’influence d’un luthéranisme actif nuancé de calvinisme, de piétisme, d’où naîtra le luthéranisme allemand contemporain.

À la fin du ixe s., les Carolingiens établissent sur les bords de l’Elbe une marche militaire qui a pour objet de lutter contre les Slaves du Nord, installés alors dans cette région. Cette marche du Nord se subdivise elle-même au cours du xe s., et c’est ainsi qu’apparaissent le Nordmark, la Lusace et, au sud, la Misnie. En 1134, l’ensemble de cette région est confiée à un seigneur du Harz, Albert l’Ours, qui, vingt ans plus tard, prend la forteresse des peuplades wilzes, Brennabor, qui va devenir Brandebourg. Pendant toute cette période, les Allemands colonisent les territoires entre l’Elbe et l’Oder et y installent une série de couvents qui sont en même temps des forteresses, telle Chorin, et des places fortes qui sont en même temps des marchés, telle Francfort-sur-l’Oder, fondée en 1253. Berlin* même est la réunion de deux villages qui sont placés sous le régime du droit allemand au milieu du xiiie s., avant d’être réunis au début du xive s. Le Brandebourg s’étend peu à peu au-delà de l’Oder. Entre 1250 et 1280, des couvents et des villes sont installés au-delà du fleuve, autour de la future forteresse de Küstrin. Mais les margraves doivent lutter en même temps contre leurs voisins allemands, le duc de Saxe et l’archevêque de Magdeburg, en même temps que contre les rois de Danemark et de Pologne. Au début du xiiie s., le margrave de Brandebourg devient prince Électeur de l’Empire, comme le constate le Sachsenspiegel, recueil de droit saxon rédigé entre 1220 et 1235. Au début du xive s., les Wittelsbach, puis les Luxembourg possèdent le margraviat, et Sigismond, margrave de Brandebourg en 1378 et roi des Romains en 1411, sera en même temps empereur (1433-1437). Mais, criblé de dettes, il donne le margraviat aux Hohenzollern*, famille de petits nobles souabes.

Plus à l’est encore, la Prusse est en dehors de l’Allemagne et, tout au long de l’histoire du Saint Empire, elle reste en dehors des limites de celui-ci. C’est un pays très pauvre, de bois de pins, peuplé de Baltes païens, hostiles à toute tentative de germanisation et de christianisation. C’est ainsi qu’au début du xiiie s. les populations païennes de Prusse menaçaient le duché de Mazovie. En 1226, le duc Conrad demande alors l’aide de l’ordre Teutonique, ordre militaire allemand analogue aux Templiers et à l’ordre de Jérusalem. En échange de son aide, l’ordre obtient pleine suzeraineté en Prusse. En 1230, une véritable croisade est menée avec énergie et habileté. Pour assurer sa puissance, l’ordre construit des forteresses qui lui servent de base et de refuge en hiver. Au pied de la forteresse s’installent des colons, qui construisent peu à peu de véritables villes : dès 1231 Thorn (auj. Toruń), en 1233 Culm (auj. Chełmno) et Marienwerder (auj. Kwidzyń), en 1237 Elbing (auj. Elbląg), en 1255 Königsberg, etc. Entre 1230 et 1280, toute la Prusse est conquise. À la population balte originaire, en régression, se substitue une population d’origine allemande. En 1237, l’ordre Teutonique fusionne avec l’ordre des chevaliers Porte-Glaive, qui est installé dans les provinces baltes, mais qui a à lutter contre ses voisins russes et polonais. En 1410, les chevaliers Teutoniques sont battus à la bataille de Tannenberg (ou de Grunwald). Et, par le traité de Thorn en 1466, l’ordre est forcé d’abandonner tous ses territoires, sauf ce que l’on appelle la Prusse-Orientale, à la Pologne, dont elle se reconnaît le vassal. Il semble que c’en soit fini dans ces régions de la puissance germanique. Or, au même moment commence à se développer au-delà de l’Oder le margraviat de Brandebourg. En 1511, l’ordre Teutonique élit grand maître Albert de Brandebourg (1490-1568), qui, en 1525, est attiré à la Réforme, sécularise l’ordre et prend le titre de duc. Son fils sera placé sous la tutelle des Hohenzollern de Brandebourg, qui, en 1618, recueillent son héritage.