Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
P

Proudhon (Pierre Joseph) (suite)

 E. Droz, P. J. Proudhon (Librairie de « Pages libres », 1909). / C. Bouglé, la Sociologie de Proudhon (A. Colin, 1911). / D. Halévy, la Jeunesse de Proudhon (E. Figuière, Moulins, 1913). / G. Gurvitch, l’Idée de droit social (Sirey, 1932) ; les Fondateurs français de la sociologie contemporaine, t. II : Proudhon sociologue (C. D. U., 1956) ; Proudhon (P. U. F., 1965). / E. Dolléans, Proudhon (Gallimard, 1946). / H. de Lubac, Proudhon et le christianisme (Éd. du Seuil, 1946). / A. Marc, Proudhon, œuvres choisies (Libr. de l’univ. Georg, Genève, 1946). / P. Haubtmann, Marx et Proudhon (Économie et humanisme, 1947) ; la Philosophie sociale de P. J. Proudhon (Univ. de Paris, 1962 ; 2 vol.) ; P. J. Proudhon, genèse d’un antithéisme (Mame, 1969). / D. Guérin, l’Anarchisme, de la doctrine à l’action (Gallimard, 1965). / J. Bancal, la Socio-Économie de Proudhon (I. S. E. A., 1966) ; Proudhon, pluralisme et autogestion (Montaigne, 1970 ; 2 vol.). / P. Ansart, Sociologie de Proudhon (P. U. F., 1967) ; Naissance de l’anarchisme. Esquisse d’une théorie sociologique du proudhonisme (P. U. F., 1970). / L’Actualité de Proudhon (Institut de sociologie, Bruxelles, 1967). / B. Voyenne, Histoire de l’idée fédéraliste, t. II : le Fédéralisme de Proudhon (Presse d’Europe, 1973).

Proust (Marcel)

Écrivain français (Paris 1871 - id. 1922).



L’enfance

Parler de l’enfance privilégiée de Marcel Proust ne serait pas exact. Il vaut mieux dire enfance protégée, s’il est vrai que Proust vit ses premières années s’écouler dans un univers ouaté grâce à la tendresse vigilante d’une mère adorée. Jeanne Weil appartenait à une famille juive, d’origine lorraine et de solide fortune : délicate et cultivée, elle entoura de son immense affection ses deux fils, Marcel et Robert. On sait avec quelle impatience, avec quelle angoisse Marcel attendait le soir le baiser maternel. Cette sensibilité presque maladive le trahira toujours. Son père, le professeur Adrien Proust, médecin réputé, était un homme froid mais bon, désarmé par ce fils aîné à la santé fragile, qui, à l’âge de neuf ans, a sa première crise d’asthme.

Les années d’enfance se passent dans quatre décors familiers aux lecteurs d’À la recherche du temps perdu. Le premier décor est la maison bourgeoise du boulevard Malesherbes ainsi que les jardins des Champs-Élysées, où, chaque après-midi, l’on conduit Marcel. Le deuxième est Illiers, où la famille Proust va en vacances et qui deviendra Combray. Le troisième est la demeure de l’oncle Louis Weil à Auteuil, chez qui l’on se rend par les jours de chaleur. Le quatrième est Trouville ou Dieppe, plus tard Cabourg, les belles plages d’où naîtra Balbec.


L’éducation du monde

Après de très bonnes études au lycée Condorcet et une excellente année de philosophie sous la direction d’Alphonse Darlu, Proust donne ses premiers essais littéraires dans la Revue verte et la Revue lilas, qu’ont fondées ses condisciples. C’est également le temps de fiévreuses lectures : Saint-Simon, La Bruyère, Mme de Sévigné. Un an de volontariat à l’armée conduit Proust à Orléans. Cet adolescent en reviendra plus que jamais soucieux de connaître la société, car il a un goût du monde qui va jusqu’au besoin. Chez Madeleine Lemaire, dont l’atelier est alors un salon, il aperçoit la comtesse Greffulhe et Mme de Chevigné, ses futurs modèles. C’est là qu’il se lie avec Reynaldo Hahn. Il fait connaissance de Charles Haas chez Mme Straus et d’Anatole France chez Mme Arman de Caillavet. Il va aussi chez Mme Aubernon. Sa rencontre avec Robert de Montesquiou l’introduit du côté de Guermantes.

Marcel Proust est alors un jeune homme comblé, partout reçu, toujours aimé. Après une licence de lettres, il est nommé « attaché non rétribué » à la bibliothèque Mazarine. Il n’y mettra jamais les pieds, mais fait paraître les Plaisirs et les jours, livre à la grâce un peu surannée, à l’écriture recherchée. « Du Bernardin de Saint-Pierre dépravé et du Pétrone ingénu », dira Anatole France. En secret, Proust travaille à un roman, Jean Santeuil, dont sa propre vie lui fournit la substance et où il y a les mêmes matériaux que dans la Recherche. Cet ouvrage est abandonné au bout de quelques années, car l’écrivain n’est pas encore mûr pour l’œuvre.

L’affaire Dreyfus le bouleverse. Proust prend part à la pétition en vue de la révision du procès. L’année suivante (1899), il découvre John Ruskin*, qu’il traduit patiemment et dont l’œuvre exercera sur lui une profonde et durable influence. Il collabore également au Figaro, continue à mener une vie brillante et mondaine jusqu’au jour où la mort frappe les siens. En novembre 1903, son père meurt ; deux ans plus tard, en septembre 1905, Mme Proust disparaît à son tour. La douleur de Proust est telle que, pendant un mois, « il resta au lit dans une insomnie totale, sans s’arrêter de pleurer ». Obligé de déménager, il s’installe dans un appartement situé au premier étage du 102, boulevard Haussmann. Il y restera plus de douze ans. Il compose une étude sur Sainte-Beuve dont les deux premiers chapitres serviront d’ouverture à Du côté de chez Swann ; il accumule les éléments qui apparaîtront dans différents passages de la Recherche. Il rédige encore d’extraordinaires pastiches qui sont publiés dans le Figaro (Balzac, Faguet, Edmond de Goncourt, Flaubert, Sainte-Beuve, Renan).


Vivre pour son œuvre

Tous ses amis vantent sa générosité, qui va jusqu’à la prodigalité, sa délicatesse raffinée, non sans regimber parfois contre sa susceptibilité, qui grossit démesurément le moindre incident. Son manuscrit prend de plus en plus d’ampleur, et Proust est à la recherche d’un éditeur. Eugène Fasquelle et la N. R. F. se récusent. Enfin, Bernard Grasset accepte pour « une première édition de 1 200 exemplaires au prix de 3,50 F, sur lesquels Proust ne recevait que 1,50 F par exemplaire ». Du côté de chez Swann paraît en novembre 1913. Les articles flatteurs de Lucien Daudet, de Cocteau, celui, plus réservé, de Paul Souday lancent le livre.