Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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prison (suite)

C’est dans ce souci que bon nombre de ceux qui s’intéressent aux prisons vont demander le rattachement de celles-ci au ministère de la Justice. Ils pensent, notamment, que ce transfert permettra aux magistrats de s’intéresser davantage aux prisonniers. En 1911, un décret leur donne gain de cause ; l’administration pénitentiaire, détachée du ministère de l’Intérieur, est confiée au ministère de la Justice jusqu’en 1940.

La réforme pénitentiaire est entreprise après la Seconde Guerre mondiale ; elle est le fait d’hommes qui ont connu les problèmes de la détention dans les camps de prisonniers. Une commission de réforme est créée en décembre 1944. Elle formule en mai 1945 les quatorze principes fondamentaux de réforme qui serviront de base à l’action future.

Malgré la misère de l’époque, qui rend particulièrement ardue la mise en œuvre d’un tel programme, de nombreuses réalisations se succèdent : ouverture de maisons centrales à régime progressif (Mulhouse, Haguenau, Ensisheim, etc.), création de la prison-école d’Œrmingen en 1947, du centre agricole de Casabianda en 1948, de l’école de formation professionnelle d’Écrouves et du Centre national d’orientation de Fresnes. Mais les événements d’Algérie et l’incarcération d’un nombre considérable de détenus nord-africains vont bloquer les institutions et mettre un terme à l’effort de réforme. Ce sont ensuite les activistes de l’O. A. S. qui vont remplir les prisons. En 1962, ils seront 4 000 pour une population pénale de 28 000 détenus.

En 1972, à la suite de la mutinerie de la maison centrale de Toul, un certain nombre de mesures tendant à libéraliser le régime de la détention sont promulguées. Elles ne permettent cependant pas à l’Administration française de rattraper le retard accumulé sur les traitements pénaux effectués à l’étranger. Mais il faut attendre les mutineries de 1974 pour qu’une réforme du régime pénitentiaire soit mise en œuvre.


Les bâtiments


Le patrimoine pénitentiaire

L’administration pénitentiaire gère 175 établissements très disparates. Les dimensions de ceux-ci diffèrent beaucoup : à la maison d’arrêt de Guéret, il y a 23 détenus et 11 surveillants, alors que la maison d’arrêt de Fleury-Mérogis renferme plus de 3 000 détenus et possède 900 membres du personnel. D’autre part les établissements sont très divers selon leur âge et leur destination initiale : anciennes abbayes (Clairvaux), anciens forts de Vauban (centre pénitentiaire de Saint-Martin-de-Ré), anciennes casernes (maison d’arrêt de Nancy), locaux récupérés sur l’armée américaine (centre de Bédenac-Bussac, près de Bordeaux). Très peu d’établissements ont été construits pour être des prisons, et, dans ce cas, il s’agit surtout de grandes maisons d’arrêt (la Santé en 1867, Fresnes en 1899, les Baumettes, à Marseille en 1960, et Fleury-Mérogis en 1968). De ces différences d’âge et de destination résultent de grandes disparités quant aux conditions de détention. À la maison d’arrêt de Gradignan, près de Bordeaux, chaque cellule est chauffée, dispose de l’eau courante et de la radio. À la maison de correction de Versailles, il n’y a pas de cellules, mais des dortoirs, et l’eau courante et le chauffage font défaut.

Dans le rapport de l’administration pénitentiaire de 1972, il est apparu que, sur les 172 établissements de détention pour hommes, 54 sont insuffisamment chauffés, et 111 pratiquement dépourvus d’un équipement sanitaire individuel. Le rapport a conclu à la suppression de 77 établissements.

L’équipement pénitentiaire reste insuffisant : sa capacité est de 27 000 places pour un peu plus de 30 000 détenus. Cette insuffisance est encore accrue du fait de la mauvaise implantation de la majorité des établissements ; de nombreuses petites maisons d’arrêt ont beaucoup de cellules vides, alors que d’autres, généralement situées dans des villes importantes, sont surpeuplées.


Les principaux locaux d’une prison

• La détention. C’est le lieu où se trouvent les cellules ; en règle générale, celles-ci sont disposées de part et d’autre d’une grande allée (coursive) et sur deux ou trois étages.

• La cellule. Elle peut être individuelle (maison d’arrêt de Fleury-Mérogis) ou ressembler plus à un petit dortoir, comme à la maison centrale de Toul, où elle enferme huit détenus. La cellule est généralement faite pour trois personnes.

• Les cours de promenade. Il s’agit d’espaces clos aux murs d’environ 3 m de haut, parfois recouverts de grillage et qui ne dépassent pas une superficie de 40 m2 ; une dizaine de détenus y passent une heure par jour ; ils ne sont plus, comme autrefois, astreints à tourner en silence. Seules quelques prisons possèdent un terrain de sports.

• Le parloir. C’est l’endroit où le détenu peut communiquer avec l’extérieur. De façon générale, les parloirs se composent d’une succession de boxes de 0,90 m de large. Une ou parfois deux vitres séparent le détenu des visiteurs. Un surveillant est toujours présent, mais le plus difficile à supporter pour le détenu est toujours le bruit. Aucune conversation intime n’est possible.

• Les ateliers. Peu d’établissements possèdent des ateliers. Il n’est guère que dans les constructions récentes que le problème du travail en commun a été pris en considération (Fleury-Mérogis).

• Le mitard, ou cachot. Il est généralement situé dans les sous-sols de la prison et destiné au détenu ayant enfreint le règlement intérieur. C’est une cellule dans laquelle se trouvent uniquement un tabouret et un lit scellé.


La vie quotidienne en prison

L’horaire n’est pas le même dans tous les établissements, car il dépend des activités des détenus et des heures de travail du personnel.

De nombreuses fouilles émaillent la journée du détenu, lors du retour des ateliers notamment.

Le régime alimentaire ressemble à celui des autres collectivités (casernes, hospices ou hôpitaux). Cependant, l’économe d’une prison dispose d’un budget si modeste que dans toutes les prisons a été créée une cantine payante.

Les prisonniers se classent entre eux en trois catégories : les « caïds », les « voyous » et les « caves ». Les premiers sont les chefs de bandes ; les deuxièmes sont les exécuteurs des caïds (corvées, etc.) ; les caves sont les victimes.