Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
P

Pologne (suite)

Les autres conséquences de ces translations ont été considérables sur les structures de la population : la composition s’est considérablement simplifiée par homogénéisation. Le recensement de 1921 admettait seulement 59 p. 100 de Polonais, plus de 18 p. 100 d’Ukrainiens, presque 10 p. 100 de Juifs, comptés à part, 5,6 p. 100 de Biélorusses, 3,1 p. 100 de Lituaniens, 4,1 p. 100 d’Allemands. La composition nationale actuelle comprend plus de 95 p. 100 de Polonais, parlant le polonais, et quelques minorités nationales, y compris quelques centaines de milliers de Juifs. La Pologne est délivrée des problèmes de minorités, notamment de celles de l’Est et de l’Ouest, restant attachées aux Russes ou aux Allemands.

Un autre problème subsiste avec certains territoires de l’Est, désertés en raison de leur caractère marécageux ou de sols infertiles, de la proximité d’une frontière soviétique étanche. Ainsi, les densités de population restent-elles faibles dans le district de Lublin (en ne comptant pas la ville), dans ceux de Koszalin (43), d’Olsztyn (47), de Białystok (51). Le rééquilibrage marqué par le pourcentage d’investissements, la création de groupes de villages, les gromada, la création des « cercles agricoles » sont cependant en voie de réussir.

On a donc affaire à un État plus recentré, équilibré dans tous ses secteurs économiques et ses divisions administratives. Dès 1960, les territoires du Nord et de l’Ouest, qui représentent 34 p. 100 de la superficie de la Pologne, assuraient presque le tiers de sa production agricole (fournissant 29 p. 100 des céréales, 22 p. 100 des pommes de terre, 36 p. 100 du froment). Les taux de densité de bétail étaient au moins égaux à ceux de l’intérieur du pays. La polonisation se marque par l’usage de la langue unique et par l’activité accrue des villes industrielles.

Un autre trait de la population est son urbanisation : les pourcentages de population citadine, de l’ordre de 30 p. 100 avant la guerre, dépassent, comme dans la plupart des pays socialistes, 50 p. 100 au milieu des années 1960. C’est une conséquence de l’industrialisation, de la croissance des services dans les villes et de la mécanisation de l’agriculture, même privée. Le mouvement témoigne d’une migration annuelle de 130 000 habitants dans les années 1950, de plus de 75 000 habitants dans les années 1960 (avec des pointes de 114 000 en 1964 et de 134 000 en 1968). Le problème polonais est que Varsovie dépasse de peu le million d’habitants et n’apparaît pas encore comme la grande capitale d’un État qui en compte plus de 30 millions.

La répartition par âges montre un début de vieillissement. Malgré les rentrants de la pyramide des âges, on assiste à un renouvellement d’une population d’âge scolaire dans les vingt premières années du régime, d’âge actif actuellement, ce qui explique en partie la progression rapide de l’économie.

Les conséquences de la guerre s’expriment en outre par l’évolution des taux de masculinité ; ceux-ci étaient très faibles dans les années qui ont suivi la guerre, mais, comme dans tous les États de l’Est, un retour à l’équilibre réapparaît lentement. La longévité moyenne est passée de 48 ans en 1931 à plus de 51 ans pour les hommes et à 70 ans pour les femmes durant la dernière période. La population non agricole, qui s’élevait encore à 39 p. 100 seulement en 1960, est passée à plus de 40 p. 100 dans les années 1960, à plus de 60 p. 100 au début des années 1970.

Enfin, l’originalité profonde de la population réside dans sa foi catholique ; de 80 à 90 p. 100 des Polonais sont croyants et pratiquants. Les églises sont presque constamment pleines, le pèlerinage annuel de Częstochowa attire des milliers de personnes. On peut sans exagérer parler d’une authentique organisation catholique, ayant sa presse, ses différents modes d’expression culturelle, qui forme, face au communisme monolithique, un groupe puissant, contraint à une grande prudence, mais dont certaines initiatives se révèlent au grand jour. Les prélats parlent presque sur un pied d’égalité avec les chefs communistes, qui observent de leur côté la même attitude, si bien que, plus ou moins secrètement, les deux forces s’équilibrent. Cela explique la grande timidité dans la collectivisation des terres, la religion étant plus répandue à la campagne qu’à la ville, et c’est un des traits essentiels qui différencie la Pologne des pays socialistes voisins.


L’économie


Les plans

Le développement économique général est resté très « orthodoxe », conséquence de la dépendance à l’égard de l’U. R. S. S. pour certaines matières premières, comme le minerai de fer et les hydrocarbures. Les réalisations ont été bonnes, grâce à la qualité des ressources. Libéralisation limitée et décentralisation sont intervenues après les émeutes de Poznań et des ports de la Baltique. Il reste de très faibles taux de productivité, des gaspillages et des erreurs dans la distribution industrielle, des méthodes de gestion excessivement centralisées, si bien que l’approvisionnement des entreprises en matières premières demeure parfois difficile. Mais depuis quelques années on encourage les investissements à court terme et les industries d’équipement (mécanique, moyens de transport, industries alimentaires). On généralise un nouveau système de gestion : indépendance des entreprises à l’égard de Varsovie, refonte des prix et fixation de ceux-ci par les usines elles-mêmes ; essai d’un marché sous l’influence des idées de l’économiste Oskar Lange (1904-1965).

Le premier plan (1945-1949) vise en priorité la reconstruction et l’aide aux territoires recouvrés ; de 1950 à 1955, un plan sexennal donne la priorité à l’industrie lourde et à la haute Silésie ; depuis, les plans se modèlent exactement sur les autres durées de planification du Comecon. Le plan achevé en 1970 prévoyait 6 p. 100 par an de croissance de revenu national, la création de 1 600 000 emplois nouveaux, la croissance des industries de la construction (la Pologne est le pays des villes nouvelles) et des engrais. L’institution de plans dits « alternatifs » dans les entreprises (avec échanges et décentralisation), une meilleure liberté de celles-ci en ce qui concerne le commerce extérieur ont contribué à libéraliser et diversifier la production.