Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Pologne (suite)

Le plan 1971-1975 prévoyait une extension de la nationalisation de l’industrie (aux deux tiers à la fin du plan) avec des modifications de structures : important développement de la chimie et des matières plastiques (dont la production doit augmenter de 270 000 t en 1970 à 600 000 t en 1975), grâce aux nouvelles usines de Gorzów Wielkopolski et Torún. Ce plan accorde, d’autre part, une priorité aux productions de machines, vêtements, aliments, fibres synthétiques.

En 1975, le pays devait produire 85 000 voitures de tourisme, lancer 900 000 t de port en lourd, fournir plus de 700 000 t d’engrais phosphatés, 600 000 t de fibres synthétiques, 630 000 téléviseurs, près d’un demi-million de réfrigérateurs, plus de 300 000 magnétophones et plus de 150 000 logements.

Dans l’ensemble, la Pologne suit fidèlement les orientations majeures du Comecon et coopère étroitement dans le domaine des transports (routes, trains rapides, passages des frontières) avec la Tchécoslovaquie. Elle fait activement partie d’institutions du Comecon, comme Intermetall ; elle suit les recommandations qui lui sont adressées par les organismes de celui-ci. Elle fournit des travailleurs frontaliers à la R. D. A., qui en manque, et de nouveaux exemples de collaboration avec ce dernier pays viennent attester la volonté d’exploiter une situation géographique et stratégique entre Allemands et Russes. La Pologne a accru ses exportations vers le sud-est de l’Europe, où ses ingénieurs sont appréciés et où elle livre des usines « clés en main ». Elle se comporte de plus en plus non seulement comme une puissance renaissante, mais expansive, d’importance moyenne en Europe et dans le camp socialiste.


L’agriculture

La Pologne se distingue de tous les membres du Comecon par l’absence de collectivisation de l’agriculture. Elle a décollectivisé dès 1968 lorsque le leader Gomułka* a proclamé que l’opération était une faillite ; le taux de collectivisation restait d’ailleurs très faible. Le fait est en apparence original : placée dans les conditions géographiques que l’on sait, soumise au contrôle de l’U. R. S. S., la Pologne aurait dû donner l’exemple dans ce domaine. Or, dès 1945, des lois ont autorisé le maintien ou la constitution de fermes de plus de 50 ha (plus de 100 dans le Nord-Ouest). En fait, la majorité de celles-ci n’occupe que quelques hectares. Mais beaucoup possèdent en propre un cheptel de qualité, tracteurs et autres engins, bâtiments d’exploitation. Ce secteur resté libre est rentable puisque le tableau statistique des productions agricoles montre des progressions de l’avant-guerre à 1970 beaucoup plus efficaces que celles de tous les autres pays socialistes qui ont collectivisé. Il se maintient un secteur très réduit de coopératives, constitué par des paysans transférés sans terre dans l’Ouest (env. 1 p. 100), et un secteur d’État, plus considérable par la production céréalière, les plantes techniques et les produits animaux que ne l’indique le pourcentage de superficie qu’il occupe (env. de 12 à 14 p. 100 des terres agricoles). Il comprend de vastes domaines en Mazurie et en Kachoubie qui, faute de main-d’œuvre, ont été fortement dotés en investissements et assurent une partie du ravitaillement des villes : leur superficie moyenne est de l’ordre de 500 ha.

Les raisons de cette politique ne sont pas toutes claires. Les collectivisations effectuées au hasard par la contrainte, sans moyen, ont été un échec. Le gouvernement n’a pas osé heurter de front la résistance passive du clergé, encore tout-puissant à la campagne et qui défendait les petits et moyens paysans. Le surpeuplement des campagnes lœssiques du Sud, d’où la mécanisation aurait chassé rapidement vers les villes sans espoir d’emploi des millions de paysans inutiles, a imposé le maintien d’un travail agricole ou artisanal à la campagne. La réforme « bourgeoise » d’avant guerre avait, malgré de nombreuses restrictions, attribué des lots de plusieurs hectares à des paysans sans terre. La nécessité de ravitailler de grandes agglomérations, notamment dans les années d’après guerre, a conduit à maintenir un marché libre des prix de vente agricoles, reliant des fermes individuelles directement aux marchés des villes ouvrières. C’est ainsi que fut gagnée la bataille du ravitaillement.

Les coopératives offrent des types très variés, certaines étant spécialisées dans des denrées de qualité. Il s’agit d’ailleurs uniquement de coopératives d’approvisionnement et de vente, sans mainmise de l’État ni collectivisation des terres.

On constate une volonté efficace de faire progresser la production grâce aux moyens techniques. La Pologne reste avec les Allemagnes et l’U. R. S. S. le plus grand producteur de seigle et de pomme de terre, mais la croissance de la betterave à sucre, des oléagineux, des cultures maraîchères et fruitières atteint des taux analogues.

Naturellement, les exploitations privées reçoivent le secours de l’État afin de maintenir une productivité élevée et une forte capacité de travail. La Banque agricole octroie des prêts. En garantie de leur pleine propriété, les agriculteurs doivent fournir de 10 à 15 q de céréales à l’hectare par an. Les trop petites exploitations sont agrandies par le jeu des mutations et grâce aux emprunts d’État : en 1950, la moitié avait moins de 5 ha et représentait moins du quart des terres agricoles ; 16 p. 100, plus de 15 ha et cultivant une part égale du territoire. Les exploitations privées sont presque obligatoirement réunies en « cercles agricoles » qui fournissent engrais et semences. Des coopératives d’entraide mutuelle ont été formées, ainsi que des « cercles de ménagères agricoles » pour les soins de la ferme et les petits élevages ; les tracteurs ont été fournis par l’État.

Ainsi ont été réglés d’une façon originale le problème du ravitaillement des villes, la « liquidation des friches », la croissance des rendements, la qualité de la vulgarisation agricole, assurée par des milliers d’agronomes. On évalue à un tiers la contribution de l’agriculture au revenu national, et au même pourcentage la population qui a conservé des activités agraires. Le parti conduit étroitement les modalités de cette politique. Les objectifs des plans affectent des normes de production végétale et animale, notamment dans le domaine de la betterave à sucre et des céréales. Des décisions nationales ou régionales sont prises annuellement. Il reste à régler le problème des exploitants âgés, l’amélioration des sols, l’exportation, sous forme de conserves, de certaines denrées.