Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
P

Pologne (suite)

Les rubans alluviaux, proglaciaires, représentés surtout par l’Odra, forment des vallées larges telles que celles de la Warta et surtout de la Vistule, bordées de terrasses alluviales, parfois couvertes de lœss. Ils présentent des branches ouest-est, parallèles au recul de l’inlandsis, les pradoliny, visibles sur les affluents de moindre importance, comme le Bug, la Pilica, le Narew, et laissant apparaître, comme aux portes de Varsovie, de vieilles forêts (Kampinoska Puszcza) et des marais. Les vallées ont fixé le site de grandes villes : Wrocław, Poznań, Varsovie, Toruń, Bydgoszcz.

De vastes plaines fluvio-glaciaires de sables et d’argiles s’étendent vers le sud jusqu’aux plateaux et terrasses couverts de lœss et marquent l’extension jusqu’aux montagnes du sud des dépôts de l’avant-dernier stade de la glaciation dite de la Saale. Ces dépôts ont régularisé les cours hydrographiques, laissé de vastes plaines sablo-argileuses ou des cônes de déjection fluvio-glaciaires, aux sols podzoliques pauvres. Ils représentent l’image la plus classique de la Pologne moyenne, caractérisée par une agriculture pauvre et l’absence de très grandes villes.

À l’est, les plaines de Mazovie et de Podlachie, traversées par le Narew et le Bug, sont plus sèches, plus plates et plus cultivées, bien que forêts et pâturages y occupent de vastes espaces. Ces plaines sont considérées comme les régions les moins développées de la Pologne.

À l’ouest, la grande plaine de Kujawy (Couïavie) et de Grande Pologne présente des interfluves plus marqués, des moraines de fond, des marécages. Le climat, plus occidental, y est aussi plus atlantique, l’amplitude annuelle plus faible. Poznań exerce une forte influence sur les régions environnantes.

Le plateau de Łódź, au sud-ouest de Varsovie, est hercynien par le substratum qui apparaît par places et fournit quelques minerais. Mais la ville de Łódź*, grâce à la diffusion de son industrie textile, a profondément transformé la campagne, où de nombreux bourgs sont animés par l’industrie textile.

La Grande-Pologne groupe les pays monotones du sud de la Warta jusqu’à l’Odra, au sud. Elle reste dominée par Poznań au nord, par le bassin de haute Silésie au sud. Mais de vastes assainissements ont permis une fécondité des sols plus forte qu’ailleurs. C’est la plaine céréalière par excellence ; on y cultive le blé, le seigle, l’orge, la pomme de terre et la betterave à sucre, le colza et les oléagineux ; l’élevage y reste relativement réduit. La production minière, provenant d’un substratum faillé, comprend de beaux gisements de lignite encore à peine exploités et de non-ferreux, ainsi que des minerais destinés à l’industrie chimique.

Au sud-est, la plaine de Lublin et le plateau du même nom annoncent les régions marécageuses de la Biélorussie et les campagnes lœssiques qui forment à l’est de la frontière, autour de la ville de Lvov, la Polésie et de la Podolie.

A. B.


L’histoire de la Pologne jusqu’en 1945


Une très ancienne terre slave

Les termes de Pologne et de Polonais apparaissent dans les sources écrites au milieu du xe s., mais le territoire et le peuple qu’ils désignent ont alors un long passé slave.

• Très développées depuis la restauration de la Pologne, les recherches archéologiques permettent de supposer l’existence d’un peuplement protoslave dès le IIIe millénaire av. J.-C.

• 1400-400 av. J.-C. : la civilisation « lusacienne » occupe la presque totalité du territoire de la Pologne actuelle, créée ou assimilée par ces ancêtres des Slaves.

• 600-200 av. J.-C. : la civilisation poméranienne (urnes funéraires à visage) naît de leur contact avec les peuples voisins ou les envahisseurs temporaires (Baltes, Celtes, Germains, Scytho-Sarmates). Les fouilles du site fortifié de Biskupin (550-400 av. J.-C.) ou de Michelin (près de Włocławek) attestent la continuité de certains traits de civilisation jusqu’au haut Moyen Âge polonais (techniques de l’architecture en bois, formes de l’habitat).

• ier-vie s. apr. J.-C. : animé par la « route de l’ambre », le territoire polonais entre en contact avec la civilisation de l’Empire romain avant d’être traversé par les Grandes Invasions.

• Entre le viie s., qui marque la fin des migrations slaves, et le xe s., qui voit naître le duché de Pologne, l’ethnie polonaise, établie dans les bassins de l’Odra et de la Vistule, se différencie au sein de la communauté des Slaves occidentaux.


Genèse de l’État polonais (viie-xe s.)

• viie-ixe s. : grâce à la reprise des activités commerciales dans le centre de l’Europe, qui favorisent l’agriculture de labourage (usage de l’araire à soc de fer) et l’artisanat, les tribus groupées autour de leurs castra (grody) se donnent une organisation politique régionale, dominée par les plus puissantes d’entre elles : en Silésie autour de Wrocław et Opole, les Slézanes ; en Pologne centrale autour de Gniezno et Poznań, les Polanes (de pole, le champ) ; en Pologne méridionale autour de Cracovie, les Vislanes. Malgré une position géographique très favorable, un développement économique plus rapide qu’ailleurs (la grande voie commerciale ouest-est passe par Cracovie) et une puissance réelle, les Vislanes ne jouent pas un rôle actif dans la formation de la Pologne. Vers 875-879, ils résistent en vain à l’expansion évangélisatrice des Moraves (saint Méthode), puis passent sous le contrôle des Tchèques et enfin des Polanes.

• Milieu du ixe s. : l’unification part de Gniezno et se fait autour de la Grande (ou Vieille) Pologne, au profit des princes polanes : la dynastie des Piast*.

• 960-992 : le duc Mieszko Ier* est le premier Piast historique. Il fait entrer son peuple dans la chrétienté romaine (966), et sauvegarde son indépendance aux portes du Saint Empire romain germanique. Il donne à son État les frontières que la Pologne a retrouvées, à peu de chose près, en 1945.