Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
P

pilotage maritime (suite)

Le régime français

Les textes de base sont la loi du 28 mars 1928 et le décret d’application du 14 décembre 1929, modifiés et complétés depuis lors à plusieurs reprises et, notamment, par un décret du 19 mai 1969. Les pilotes sont des inscrits maritimes titulaires, dans la majorité des cas, de brevets de commandement et nommés après concours par le ministre chargé de la Marine marchande. Ils doivent, à leur nomination, être âgés de 24 ans au moins et de 35 ans au plus et compter 6 ans de navigation dans la marine nationale ou la marine marchande. Lorsque l’importance du service le justifie, le ministre nomme un chef responsable. Les stations sont au nombre de trente-sept pour la métropole et les départements d’outre-mer. Les pilotes sont copropriétaires de leur matériel, dont la gestion est sous contrôle de l’administration des Affaires maritimes, assurée par les syndicats qu’ils forment dans le cadre de la loi de 1884. Le pilote entrant en service verse le montant d’une part de matériel, tandis que la pilote sortant en est remboursé. Il doit, aussi, fournir un cautionnement dont l’abandon peut l’affranchir de sa responsabilité civile, sauf s’il y a faute sanctionnée par le Code disciplinaire et pénal de la marine marchande.

Les tarifs de pilotage, calculés sur la jauge nette des navires, sont fixés, pour chaque port, par le ministre chargé de la Marine marchande après avis d’une assemblée commerciale où sont représentés les divers intérêts en cause. Sur le montant des recettes, les pilotes prélèvent les sommes nécessaires aux dépenses d’exploitation et amortissements. Les recettes nettes servent d’une part à la rémunération des pilotes en activité et d’autre part au versement aux pilotes retraités de pensions complétant celles qu’ils perçoivent comme inscrits maritimes.

Une dérogation au monopole des pilotes peut être accordée à des capitaines fréquentant régulièrement un même port auxquels est délivrée une licence de capitaine-pilote. Tel est, par exemple, le cas des commandants des car-ferries trans-Manche, qui n’acquittent alors qu’une taxe réduite.

Les pilotes, embarqués à tour de rôle sur leurs bateaux-pilotes, vont attendre les navires, à bord desquels leur transfert par embarcation risque parfois d’être difficile sinon dangereux par mauvais temps.

H. C.

➙ Affaires maritimes (Administration des) / Marin du commerce / Navigation.

 R. Rodière, Droit maritime (Dalloz, 1962 ; nouv. éd., 1971). / F. Luporsi, Pilote de port (Fédération française des syndicats professionnels de pilotes maritimes, 1968).

Piłsudski (Józef)

Homme d’État polonais (Żułowo, Lituanie, 1867 - Varsovie 1935).



Le patriotisme familial

De vieille noblesse polono-lituanienne, Józef Piłsudski fut élevé dans le culte des traditions insurrectionnelles par une mère inconsolable du « désastre national » de 1863 (le père de Józef avait été commissaire politique de l’insurrection). Le jeune homme suivit l’itinéraire classique des sujets insoumis du tsar : société secrète de lycéens patriotes à Wilno (Vilnious), rêves d’insurrection contre l’« oppression moscovite », rencontre avec un socialisme nébuleux venu de Russie (1884), un an d’université à Kharkov, où il mena de front des études médicales et la politique, puis la prison. Mêlé à tort avec son aîné au complot terroriste d’Aleksandr J. Oulianov, frère du futur Lénine, il fut déporté pour cinq ans en Sibérie orientale (1887-1892). Là, Piłsudski précisa ses convictions socialistes (lisant Marx, Spencer), rompit à jamais avec l’influence russe, mais ne devint pas marxiste. Rentré à Wilno, il renonça à reprendre des études pour se consacrer à l’action révolutionnaire, convaincu que « le socialisme en Pologne doit tendre à l’indépendance de la patrie et [que] cette indépendance est la condition essentielle de la victoire du socialisme dans ce pays ».


Le chef du parti socialiste polonais : 1893-1908

Délégué de Wilno lors de la fondation du parti socialiste polonais (PPS) en 1893, élu membre de son comité central ouvrier, il entra pour vingt ans dans la vie clandestine du « révolutionnaire professionnel ». Homme d’action, il bousculait les débats théoriques. Son dévouement enthousiaste, son génie de l’organisation clandestine servi par une volonté de fer et une audace légendaire, son ascendant d’orateur populaire en firent aussitôt le chef du parti. Publiciste, agitateur, propagandiste, le « camarade Wiktor », alias « Ziuk », fut la cheville ouvrière des progrès et du prestige du PPS. Écrits en 1903, ses Souvenirs d’un révolutionnaire (Bibuła) évoquent avec brio le pivot de cette action : l’insaisissable Robotnik, organe clandestin qu’il réussit à imprimer pendant six ans à Wilno, puis à Łódź, au grand dam de la police tsariste. Piłsudski suscitait déjà des ferveurs indéfectibles. Incarcéré à la terrible citadelle de Varsovie (fév. 1900), il simula la folie : transféré à l’hôpital psychiatrique de Saint-Pétersbourg, il s’en évada (mai 1901), gagna Londres puis Cracovie, d’où il reprit en main l’organisation. Il dénonçait le « centralisme impérialiste » des socialistes russes et refusait de voir dans le PPS « un simple auxiliaire de la révolution russe ». Les « jeunes » du parti se détachaient de ce « social-patriotisme ». Ils désapprouvèrent l’offre que Piłsudski fit à Tōkyō de soulever la Pologne sur les arrières russes (1904).

Le cours de la révolution de 1905 accentua ce divorce quand Piłsudski entreprit de préparer dans « l’organisation de combat » du PPS les cadres de la future insurrection armée (« on ne tue pas un soldat avec le nom de K. Marx »). Après la scission (nov. 1906), la « fraction révolutionnaire » le suivit dans la guérilla contre le tsarisme (« évasion des dix », expropriation de Bezdany). Assailli sur sa gauche (marxistes internationalistes) et sur sa droite (nationaux-démocrates), Piłsudski cherchait des voies nouvelles. En 1908, sans rupture réelle, l’étape socialiste de sa vie s’acheva : la période nationale commençait.